Hôpital, suite
Est-ce maître Maurice Garçon ou Jean-Louis Tixier Vignancour, tous deux célébrités du barreau du temps que j’étais encore petite fille, qui avaient terminé une plaidoirie par cette phrase demeurée célèbre « Madame, quand on a été prostituée, c’est comme quand on a été ministre, on garde le titre toute sa vie ! »
C’est de peu d’importance. Ce souvenir me revient juste pour dire « quand on a est médecin, on le reste en toutes circonstances ». Et, en effet, cet après-midi, présidant le Conseil d’administration de l’hôpital Charles Perrens, c’est exactement ce que je ressentais.
Le corps médical avait décidé de ne pas siéger pour manifester son opposition à la loi Bachelot. Je suis de tout coeur et esprit avec cette opposition, même si je la trouve tardive : devais-je moi même présider ce Conseil d’administration ?
Je l’ai fait, car ce rôle vient en représentation du Président du Conseil général et au titre de cette institution. Nous avions des dossiers importants, parmi lesquels le budget prévisionnel et je voulais, comme le Directeur l’a fait lui-même, commenter cette absence médicale et l’impact de la loi sur notre hôpital.
Pour les non-Bordelais, Perrens est à la fois notre hôpital psychiatrique et fait partie du Centre Hospitalier Universitaire en abritant les services universitaires de cette spécialité : il est donc au coeur du raz de marée libéral que sous-tend et prépare la loi.
Nous avions un autre problème à évoquer : un adjoint au Maire de Bordeaux, conseiller général ump du territoire de Perrens, s’est exprimé dans le journal sud ouest en sa qualité d’administrateur de Perrens pour regretter « qu’on jette les malades à la rue au lieu de les hospitaliser ».
L’article de Sud Ouest où ces propos sont rapportés concernait les drogués et les SDF d’un quartier de Bordeaux (cours Victor Hugo). Comme moi, l’ensemble du Conseil d’administration a vécu douloureusement :
– l’amalgame fait par l’adjoint entre malades mentaux, drogués et SDF. De tels amalgames, d’inspiration très sarkozienne, conduisent loin si on les prolonge, et ceci fut fait en d’autres périodes
– la mise en cause de Perrens, qui assure 24 h sur 24, chaque jour et chaque nuit de l’année, sa mission de service public. Chaque malade est reçu, à toute heure, si son état le justifie, par un médecin, et ce médecin, sans pression ni contrainte, décide médicalement soit de l’hospitaliser, soit de le suivre à titre externe. « Jeter à la rue » ne fait pas partie, jusque là, du vocabulaire, de la pratique, ni de l’éthique des hospitaliers.
Le Conseil d’administration unanime a adressé un droit de réponse à notre quotidien Sud Ouest.
Est-ce le premier effet de cette loi dont l’objet est de dissoudre le service public hospitalier, en hospices d’un côté à destination des pelés, des tondus et des dangereux, et en établissements privés pour les soins lucratifs de l’autre ?
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