De l’Hossegorois tardif
L’Hossegorois nocturne est une authentique plaie. Je parle de cette variété tardive, hantant cette partie de la nuit qui appartient déjà au lendemain. Celui-là, aux abords de mon océan, met tout son génie à en nier l’existence et à en couvrir le bruit régulier et profond comme la musique des astres elle-même.
Une plaie d’abord pour lui-même. Savamment rempli de mélanges d’alcool blanc, gin, vodka, calva et quelques autres, souvent relevés d’herbes ne poussant pas dans les Pyrénées voisines, cet Hossegorois-là est, après quelques heures, hors d’état de nuire, dormant sur la plage ou dans un ailleurs pleins de rêves troubles qui le tiennent abasourdi jusqu’à tard dans la journée suivante. Et l’en prive.
L’Hossegorois tardif, jeune en général, quelquefois très jeune, désesperement jeune, n’ est pas pour autant privé d’altruisme : prestidigitateur capable de transformer une nuit légère et pleine d’étoiles en l’atmosphère pesante d’une cave ou d’un club quelque part à Aubervilliers ou sur cette partie des quais de Bordeaux où les jeunes filles n’ont pas toujours l’étude pour seul souci, il tient à vous faire partager sa magie à l’envers. Cris, hurlements, tams tams, vous qu’une insomnie amenait là dans le sillage de Chateaubriand, vous voilà contraint ou à la communion vociférant, ou à une piètre retraite, abandonné aux noirs constats et aux interrogations éternelles « Je suis venu trop tard dans un monde trop jeune » …
Le poète disait « un monde trop vieux », mais franchement-là, au milieu de cette variété d’Hossegorois du 4ème type, ça ne colle pas…
Un autre poète, sur les paroles duquel Mahler a déposé d’inoubliables plaintes, interrogeait « O, homme, prête attention ! Que dit la nuit profonde… »
La nuit profonde, en juillet-aout, à Hossegor côté mer, ne dit rien. Médusée, terrassée, réduite à une contemplation consternée, elle qui depuis des siècles s’était accoutumée à être laa belle ténébreuse que l’on contemplait, celle à laquelle on écrivait des poèmes, la nuit profonde la boucle.
L’océan ne s’y résout pas. Et même s’il est difficile de l’entendre, il ronfle, il bougonne, il roule ses longues et hautes mécaniques qui se fracassent bruyamment à son bord, il ne désarme pas.
Au petit jour, l’Hossegorois tardif rendu à ses réalités, à ce mélange de déceptions et de renoncements qui fait qu’on ne sait plus vivre, l’océan reprend ses droits et débarbouille la plage à longs coups de langue.
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