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Bien sûr, si le Maire de Bordeaux était une femme (qu’à dieu plaise..), la grande qualité du jeu de mots rapprochant ces dents-là de celles du film de Spielberg apparaîtrait de manière plus lumineuse encore…

Le Maire de Bordeaux est un homme. Il faut cependant que notre ville ait sacrément fait le deuil de son passé anglais, avec qui va l’humour, pour ne pas s’étrangler régulièrement de la drôlerie infinie de cette immense mâchoire ouverte au devant des fenêtres des bureaux de notre premier édile. Même le « piéton » qui fait quasi-quotidiennement notre bonheur dans Sud Ouest ne s’en est, à ma connaissance, pas ému.

Cette machoire de crocodile, complaisamment garnie de canines, molaires et incisives, à rendre jaloux le plus pacifique des bergers allemands, placée au premier plan de la belle façade de la Mairie, sonne comme un programme.

La finesse est poussée assez loin. La pancarte, obligeamment mise à disposition des passants, explique avec une complète innocence, que cette oeuvre n’est qu’un miroir (et en effet elle est fabriquée dans un matériau réfléchissant), destinée à traduire le destin de l’homme.

De l’homme ? Quel homme ? Bien évidemment, et c’est là toute la grandeur de l’art, de rendre évident ce qui était obscurément connu : du locataire des lieux municipaux.

Ainsi, nous avertit la pancarte, c’est tout le destin de cet homme, son ardeur à s’élever au dessus du plat miroir de l’humaine condition que cette statue de deux tonnes (dont il sera difficile de se débarrasser) illustre.

Dans l’intervalle des machoires, toute frissonnante d’émotion, de froid et d’angoisse, une jeune fille de pierre attend d’être croquée toute vive.

Disons-le sans embages : on a tort de ranger le sens de l’humour d’Alain Juppé et son intuitiion du second degré en toutes choses au rang de ceux des Allemands ou des Suisses.

Il avait déjà démenti ce soupçon , en faisant prestement enlever le nain Dwarf-Dwarf* de la cour de la Mairie avant la venue de Nicolas Sarkozy à Bordeaux . L’affaire à l’époque avait alerté, la double mâchoire apporte comme une réponse.

Le jardin de la Mairie, décidément,
 »est un temple où de vivants piliers
laissent parfois sortir de confuses paroles »

Le non dit, en politique, parle plus que l’ordinaire langue de bois.

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