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Jour de deuil

En réponse à l’attentat d’hier dans les locaux du journal Charlie Hebdo, le Président de la République a décrété un jour de deuil national.

Il s’agit d’un événement rare,  généralement réservé aux funérailles des Présidents de la République. La Vème République en a connu trois (Général de Gaulle, Georges Pompidou, François Mitterrand) et un quatrième, en réalité jour de deuil européen le 14 septembre 2001 (à la suite de l’attentat aux twin towers de New York)

Ce cinquième jour de la 5 ème République a donc un sens particulier. C’est bien de la France, c’est bien de notre République avec lesquelles il s’agit de partager, dans l’union, le deuil.

Cette décision est pleinement justifiée. Par la cruauté du geste, qui est en réalité davantage une lâche exécution qu’un attentat. L’exécution de 10 journalistes, symboles de la liberté d’expression et de deux policiers en charge de la sécurité des citoyens. A ces deux mots, liberté et sécurité le rassemblement citoyen spontané et massif qui a suivi en ajoute un troisième : la fraternité.

Le Pape disait dans son discours au Parlement Européen que le dénominateur de l’Europe était la dignité humaine ; c’est aussi cela qu’ont atteint les exécuteurs de Charlie hebdo.

Le journaliste du Monde Arnaud Leparmentier parlait hier dans un interview d’ « atteinte à notre humanité ». Ce que les bourreaux de rangs divers qui ont exprimé au cours de ces derniers mois leur barbarie veulent détruire, c’est en effet le meilleur de ce que nous sommes et que les trois mots de notre devise républicaine résument de manière concise.

La République n’est pas pour autant un mot, ni même trois : elle est une somme de luttes et de conquêtes qui ont coûté bien des vies. Nous redécouvrons à l’occasion de cet attentat et de ce jour de deuil que les droits et libertés acquis ne le sont jamais pour toujours et qu’il nous faut les défendre.

Les trop bavards, les amateurs de buzz et de phrases assassines, les jeteurs d’huile et les embraseurs de flammes sont appelés à responsabilité. Les Français d’ailleurs en ont assez des anathèmes et du sectarisme. Le temps, l’urgence, l’exigence sont à l’union.

Ce jour de deuil, nous devons en faire un jour de force et de fierté. Forts de cette capacité d’union, fiers de ce qu’il s’agit d’en faire.

 

 

Redéfinir l’Etat

Redéfinir, redéfinir… Encore faudrait-il que nous en ayons déjà tous une claire définition. Je répugne à aller quérir celle que donnent les bons auteurs de dictionnaire. La mienne a à voir avec le bien collectif, l’union des citoyens autour de ce bien et le service que depuis des générations on lui dévoue. L’Etat entretient un flirt  poussé avec la République, une relation plus ambigüe avec la Nation, et puisque c’est du nôtre qu’il s’agit, aussi avec ce beau mot de « France » auquel nous sommes attachés. Etat -Nation, Etat souverain, Etat dans l’Etat, bien des formes de pacs traduisent les amours entre ces mots.

L’Etat est au fond comme le temps : tous savent bien ce qu’il est quand on ne leur demande rien, mais dès qu’on les interroge, ne savent plus trop quoi dire.

Notre Gouvernement se propose pour l’année 2015 non seulement de poser la question mais d’y donner une nouvelle réponse ; redéfinir les missions de l’Etat, dire s’il fait bien ce qu’il doit faire, pointer ce qu’il faisait et qu’il ne devrait plus faire, identifier des missions nouvelles que des données nouvelles pourraient imposer (par exemple, internet). Thierry Mandon, déjà en charge de la « simplification », s’est vu confier cette épineuse réforme.

La question des autoroutes illustre concrètement le sujet. Question nouvelle, datant d’à peine quelques décennies, problème immémorial. Déjà Anne de Bretagne s’était prononcée contre tout péage ou cession à autrui. Les routes de Bretagne devaient être et rester libres. Les Bretons ont assez bien réussi d’ailleurs à faire fructifier cette parole patrimoniale, quelquefois avec excès et violence.

Routes et chemins appartiennent incontestablement au bien commun des habitants d’un territoire. Ils y travaillent, les construisent ou les entretiennent depuis des générations. Les « voies », comme la terre, les villes et les villages, font partie de la définition d’un territoire.

Concession n’est pas cession, pour autant celle qu’a permise Dominique de Villepin en 2006, s’y apparente : l’immense difficulté à y revenir démontre que l’Etat n’est plus vraiment propriétaire de son bien. La contrainte budgétaire actuelle accuse cette dépendance et nous demeurons tête basse en voyant les 20% de bénéfices annuels tomber dans l’escarcelle des sociétés autoroutières.

Quelle est la justification d’un péage ? L’utilisation d’une voie bien au-delà du service de l’Etat et de ceux qui le composent. Les grandes autoroutes qui traversent la France et permettent le commerce international doivent légitimement être entretenues par tous sous la forme d’une redevance. L’Etat doit cependant en rester maître.

Des péages « de convenance » comme celui que vient de proposer Alain Juppé aux portes de Bordeaux (le trajet Bordeaux-Salles de la route Bordeaux-Arcachon) ne sont pas légitimes. Ici pour deux raisons : le péage est censé assurer le paiement d’une facture extérieure au projet (le dernier tronçon de la rocade de Bordeaux). La facture est « one shot », le péage risque d’être durable. De plus, ce péage concernerait principalement les usagers pendulaires qui entrent ou sortent de Bordeaux pour leur travail. Tout ceux-là sont des locaux : les routes leur appartiennent.

Un autre cas, tout à fait différent, interroge également notre sens de l’Etat : le tabac. La vente de celui-ci est concédée aux buralistes depuis de nombreuses décennies. Ces buralistes (on n’employait pas encore le mot) étaient des personnes méritantes, veuves de guerre en premier lieu, auxquelles la concession était donnée pour reconnaissance de la République. On est loin de là.. Non que les buralistes ne soient pas méritants, mais ce commerce s’achète désormais comme tous les autres, au prix de son chiffre d’affaires.

Et l’Etat, là-dedans ? Il décide (enfin..) de la fiscalité et finance le coût social et sanitaire de ce serial killer à nul autre égal. Comme pour les autoroutes, il est gravement floué. Plus encore, vendre au nom de l’Etat le produit le plus dangereux pour la santé (autre domaine de l’Etat), est-ce encore acceptable ?

C’est un sujet tout à fait majeur. Au cours de la précédente législature, Daniel Vaillant, avait envisagé de placer la vente de cannabis sous monopole d’Etat. Je m’étais associée à cette réflexion. La conscience de ce qu’est devenue la vente du tabac, soumise à toutes les pressions et dépossédant l’Etat d’une grande partie de son pouvoir, me font craindre qu’il en soit de même pour le cannabis.

Deux exemples, très différents, qui devront être interrogés -et résolus- lors de cette « Réforme de l’Etat » à laquelle Thierry Mandon s’est attelé. J’ose à peine lui dire: « Bonne année à toi ! »

 

 

 

 

 

 

 

Sud Ouest – 23/12/14 – Péage sur l’A63 : Michèle Delaunay s’oppose à Alain Juppé

Péage sur l’A 63 pour financer la rocade de Bordeaux : Michèle Delaunay s’oppose à Alain Juppé

 

Sur son blog, la députée de la Gironde expose ses vues et tacle le maire de Bordeaux et président de la CUB

Députée PS de la Gironde et ancienne ministre du gouvernement Ayrault, Michèle Delaunay s’en prend sur son blog à la proposition d’Alain Juppé de privatiser le tronçon entre Bordeaux et Salles de l’A 63pour financer la fin de la mise à deux fois trois voies de la rocade bordelaise.Car la CUB n’a pas les moyens de cofinancer avec l’Etat, dans une proportion de 50%, ces travaux et l’Etat ne peut lui-même aller au-delà des 50% en raison d’un déficit sur l’entretien des infrastructures (AFITF) qui, précise l’élue bordelaise, « est en grande partie la conséquence de la privatisation des autoroutes par le gouvernement Villepin, pour un prix reconnu comme très faible (14 milliards d’euros) ».

La proposition du maire de Bordeaux ne trouve pas grâce aux yeux de son opposante à la mairie pour plusieurs raisons. « Une fois la concession faite et la facture de la rocade payée, on ne reviendra pas sur la dite concession et l’utilisateur de l’A 63 continuera de payer au bénéfice d’un allocataire privé, précise-t-elle. Le montant des travaux de la rocade, qui justifie la proposition, est exactement celui acquitté par l’argent public dans le Grand Stade (80 millions) alors que cette structure bénéficiera à un club privé et aurait dû être financée par lui. »

« La proposition d’Alain Juppé donne un aperçu de ce que serait sa gestion des affaires de l’Etat s’il parvenait à sa tête » conclut Michèle Delaunay qui se rallie « totalement à la teneur du courrier à Manuel Valls des 152 députés qui soutiennent le rachat des concessions autoroutières, évalué aujourd’hui à 25 milliards, soit après 8 ans le double du prix d’achat. Le rendement financier de ces autoroutes est de 20 %, ce qui correspond à un amortissement sur 5 ans » assure-t-elle en espérant que « la gauche sera très mobilisée sur ce sujet ».

La citrouille et le carrosse

Ma collaboratrice Marie m’a offert hier une « main » (cette mesure un peu désuète convient bien à son objet d’aujourd’hui) de graines de potiron. Le potiron a non seulement le plus joli des noms mais il est également parfait par ses dimensions, sa couleur et ses formes, sans parler de ses bienfaits quand une main familiale l’a transformé en soupe.

Cela m’a fait souvenir d’une histoire que Mamaman adorait raconter. A l’occasion de la confection d’une de ces soupes, elle avait planté un peu au hasard une graine de potiron en lisière d’un gazon rustique de notre jardin. Quelques mois après, la baronne Pauline de Rothschild vient la visiter. Mamaman n’était plus tout à fait jeune, il s’agissait d’une visite tout à fait privée et d’autant plus précieuse.

Par quelque grâce, la modeste petite graine avait fait carrière. Elle était devenue aussi grosse et rebondie que la citrouille de Cendrillon et s’était installée au bout de sa tige tortillée sur le gazon. Nos deux dames entament un tour de jardin et la baronne, sincèrement ravie, s’enthousiasme;

– « Mais, ma chère amie, même les jardiniers anglais n’ont jamais eu cette audace ! Cette citrouille, son feuillage, sa tige, sur ce gazon, voilà ce que je n’ai jamais vu, non plus à Tintinhull qu’à Jenkin place.. Je vais suggérer qu’on prenne ce risque sur les pelouses de Mouton ».

Les amateurs de vin savent ce qu’est « Mouton ». Je ne sais pour ma part s’il y eut jamais de citrouille sur le gazon de cette noble demeure. Mais il est vrai qu’aucun jardin anglais dont j’ai pu consulter les images ou connaître les pelouses n’en a connu jusqu’alors de parcourues de la tige élégante de ce non moins noble cucurbitacé.

Ma mère n’était pas femme à avoir planté par audace. Elle portait en elle cette belle tradition paysanne, qui fait que quand on a une graine, on la plante. Au propre, comme au figuré, je m’aperçois à distance que son talent pédagogique n’était pas autre chose.

La baronne, n’était pas sans moins d’intelligence et de culture. Les cinq talents de la bible sont diversement distribués et plus encore diversement utilisés.

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