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« l’action de Nicolas Sarkozy près de chez vous »

Dans un mail en date du 2 mars, Nicolas Sarkozy s’adresse une nouvelle fois aux Bordelais pour mettre en lumière son action auprès d’eux. Un des 4 piliers de cette action est constitué par ses déplacements sur notre territoire depuis 2007 : 7 déplacements ! Nous avons encore de la chance car ces déplacements ne sont que 7 sur un total de 227 déplacements intérieurs pendant son quinquennat. Pourquoi de la chance ? Parce que ces déplacements de quelques heures voire d’une ou deux sont incroyablement couteux : chacun d’eux étant estimé à un minimum de 100 000 euros, certains les ayant largement dépassés, ceci pour les seules heures de vol pour lui-même, son entourage et bien souvent sa voiture. L’énormité des forces de sécurité déployées (12h de 1000 policiers représentent 450 000 euros) non plus que les frais engagés par les Collectivités Locales, notre Mairie en particulier, ne sont comptés dans ces 100 000 euros. On ne donne ici qu’un exemple de ces frais annexes: la fabrication d’un fond de scène devant lequel le Chef de l’Etat s’exprime : celui-ci toujours différent, représente pour chaque prise de parole 141 000 euros.

Ces chiffres sont issus de l’ouvrage de René Dosière « l’argent de l’Etat » éditions Seuil, pages 130 à 144, et correspondent tous à des évaluations officielles demandées par le député par voie de questions écrites publiées au Journal Officiel.

Pour être tout à fait complet, les 3 autres piliers de « l’action de Nicolas Sarkozy près de chez vous » sont la baisse de 12 % de la délinquance en Gironde depuis…. 2002, la multiplication par 2 du nombre d’entreprises créées dans ce département entre 2008 et 2010, dossier où le Chef de l’Etat a peu de rôle, en tout cas bien moindre que nos Collectivités et enfin, la somme de 900 millions d’euros engagés sur notre territoire pour des investissements qualifiés « d’avenir », y compris probablement les 25 millions du Grand Stade.

Santé et bien-être au travail : faire résolument de l’anti-sarkozisme primaire

Outre l’action individuelle, dans son milieu professionnel, que peut-on faire contre ce désastre que sont la souffrance et le suicide au travail ?

« On » : les pouvoirs publics, le législateur, le candidat aux présidentielles.

En charge de cette partie, apparemment modeste mais essentielle, dans la campagne de François Hollande, j’ai été à plusieurs reprises interrogée sur le sujet. Et je le reconnais, je découvre de la part des journalistes une certaine déception à ne pas m’entendre annoncer une mesure décisive, du genre « l’extinction du paupérisme après 18 heures » mais seulement des pistes de travail, c’est bien le cas de le dire.

Toutes ces pistes ont pourtant un fil directeur : faire l’opposé absolu de ce que fait la droite depuis 10 ans et son Président depuis 5.

« Travailler plus pour gagner plus », ce slogan que j’ose qualifier de misérable, réduisant le travail au gain, quand, parallèlement le décile des plus hauts revenus de notre pays crevait tous les plafonds et que Sarkozy lui-même s’entourait de gens gagnant 500 fois et plus le SMIC, la réforme des retraites confondant pénibilité et invalidité, le show de dernière heure sur « le coût du travail » qu’il fallait réduire par une TVA dite sociale, et tant d’autres mesures comme la confusion du « travail du dimanche » avec le « commerce du dimanche », nous ont donné tout bonnement envie de vomir.

Je ne suis pas coutumière des mots forts, voire excessifs, mais c’est ce que j’ai exactement ressenti. Le travail est pour moi une valeur fondatrice, de l’individu comme de la société, et tout ce qui le dévalorise, le foule au pied, me révolte.

Alain Juppé dans son blog a, il y a un nombre certain de mois, fustigé les salaires faramineux des chefs d’entreprises ou des sportifs. Quand Hollande leur donne une autre dimension et propose qu’ils participent à l’effort national, Juppé dit que « ce n’est pas la bonne méthode ». La bonne méthode, c’est quoi ? Ne rien faire, comme d’habitude. Juppé est l’artiste du « laver sans mouiller ». Il dénonce à la marge et s’empresse de passer à autre chose.

Alors, redonner son sens au travail, retrouver sa valeur, la PARTAGER, montrer qu’il est le premier de nos échanges, de la réciprocité qui nous unit, que nul ne peut vivre sans le travail de l’autre, et que l’effort ou la performance de l’un sont égaux quel qu’en soit le domaine, il ne faut compter ni sur Sarkozy, ni sur son premier lieutenant pour le démontrer.

Et c’est pourtant une des clefs de notre redressement. Santé et bien-être au travail sont les clefs de l’efficience et de la performance. Nous le savons tous sans avoir besoin de faire appel ni à des experts, ni à des « coaches », mais seulement à notre jugement individuel, à notre expérience personnelle, et à ce qu’on appelle depuis des dizaines de générations « le bon sens ».

Je le reconnais, depuis le discours de Sarkozy à Bordeaux hier, avilissant, abêtissant, médiocre non dans sa forme mais dans ce qu’il prétend solliciter dans cet individu sans grandeur qu’est pour eux l’électeur, je suis remontée comme une vielle pendule. Mais dans le domaine du travail, oui, c’est certain, depuis dix ans, ils ont tout faux;

Venez débattre demain avec nous (Bordeaux, Athénée municipal à Bordeaux, 18 h 30). « Travailler mieux pour vivre mieux », comme ça, au premier abord ça parait pas sexy, mais c’est le noyau de l’atome de notre vie et de notre vie en société.

Bordeaux, de la fraude sociale à la viande halal

Bordeaux restera marquée et salie par le discours sur la fraude sociale du 15 nov 2011 et par le discours de campagne du même Sarkozy aujourd’hui 3 mars 2, que j’ose appeler le discours sur le « marquage de la viande halal » avec tout ce que cela suppose d’arrière-plan.

Pourquoi le choix de notre ville pour ces discours ? L’un de petit poujadisme médiocre, l’autre de franche haine qui a vu défiler tout le pot pourri -très pourri- du vocabulaire et des images d’extrême droite. Habitudes alimentaires, piscines, délits et récidives, civilisations et bien sûr le retour de la fraude sociale, qu’il a servi avec ce sourire mince et satisfait qui est le contraire d’un sourire. Il ne manquait que « l’odeur » qu’avait en son temps risquée Chirac.

Je ne réponds pas à la question « pourquoi le choix de notre ville ? ». Son Maire le fera peut-être.

Le désastre de la souffrance au travail

Je ne l’ai formalisé que progressivement, mais, au fil des mois, l’association toujours plus pregnante de « souffrance » à « travail » et pire encore de « suicide » à travail a été pour moi une sorte de choc, de remise en cause, d’aberration, de révolte, vraiment grave, vraiment importante et si j’ose dire radicalement politique.

Qu’on me pardonne de personnaliser. Je ne le fais que parce que je sais que je ne suis pas seule dans ce cas. Plusieurs générations qui ont vécu le travail comme central de la construction de la personnalité comme de la société elle-même, qui y ont vu en premier lieu un outil d’identité et de liberté -en tout premier lieu pour les femmes- sont violemment agressées à l’idée que quelqu’un d’apparemment sain se rende sur les lieux de son travail pour clamer sa souffrance en se suicidant.

Non qu’il n’y ait pas, presque obligatoirement, de la souffrance au coeur même du travail. Je ne parle pas même du dos cassé du maçon, des mains rougies de la champignonniste qui travaille dans le froid et de la tête explosée de la vendeuse qui supporte toute la journée une sono tonitruante et débile. Je parle de la souffrance inhérente à l’exercice même de tout travail : expérimenter, tenter de vaincre la difficulté, s’affronter au réel, quelquefois l’emporter, bien souvent échouer et recommencer. C’est le chirurgien qui affronte un accident opératoire, un mécanicien qui voit une pièce se briser, une DRH qui doit assurer un service avec la moitié de son équipe. Marx appelait cela « le travail vivant », c’est à dire le travail à l’épreuve du vivant.

Cette souffrance est sinon normale, obligatoire à des moments que l’on souhaite les moins nombreux possibles. Ces moments sont également constructeurs de celui qui les éprouve pour peu qu’ils soient « reconnus » et ce mot a bien des sens.

Le désastre, c’est le travail qui vainc, qui humilie, qui isole et qui, directement ou indirectement, détruit. C’est le travail où l’on se rend en ayant peur, en sachant que l’on ne sera ni regardé, ni apprécié, que l’on ne parlera à personne, que l’on sera seul sur sa machine ou à son bureau sans autre désir que celui que l’heure passe.

Le problème est éminemment complexe. Le travail en tant que tel n’est pas seul en cause, le malaise social, beaucoup plus général qui fait que les cas de dépression augmentent de manière épidémique, que les autres affections psychiatriques sont elles aussi plus nombreuses, y entre pour une part. La souffrance au travail réunit à la fois les souffrants qui travaillent et ceux que leur travail fait souffrir. La somme des deux et ses conséquences émarge pour 2 à 3% du PIB dans les pays européens. Première raison d’en faire un dossier prioritaire. Souffrance, on ne l’a pas assez compris, est antagoniste de performance.

Les causes de la souffrance liée au travail sont nombreuses. En tête de peloton, sans aucun doute, le rétrécissement du marché de l’emploi et la précarisation du travail qui font que nombreux sont les salariés qui vivent dans la crainte de perdre leur emploi. Ce risque ouvre aussi la porte a des conduites profondément délétères de petits ou grands chefs qui utilisent ce risque dans leur management. « Si vous n’êtes pas content, il y en a des dizaines pour vous remplacer ». Le droit du travail protège encore mais le marché du travail fragilise. Les emplois à durée déterminée sont concernés en premier lieu.

La pression, la définition d’objectifs individuels à remplir dans un temps déterminé, la mobilité imposée, sont également en tête des motifs de souffrance et particulièrement de suicide comme on l’a vu dans de grandes entreprises avec aujourd’hui un effort pour y remédier.

Presque dans tous ces exemples, se profile en arrière plan, l’isolement du salarié. Sa situation ne s’inscrit pas dans un effort ni dans un destin collectif, il est mis en face d’une situation à risque qui le concerne individuellement (par ex sa mutation), d’un objectif qui le met en cause personnellement et qu’il ne peut pas partager, voire qui le pose en concurrence avec ses homologues et distend ses rapports avec eux. Chaque « plan social » fait culminer cette concurrence : lequel sera écarté, lequel sera épargné ?

L’état du dialogue social dans l’entreprise, le fait que l’avis des salariés soit ou non sollicité sur les conditions de travail et les moyens de les améliorer, mais aussi sur l’organisation et la gestion du travail constituent des paramêtres essentiels, comme bien sûr l’existence d’un service de santé au travail. On sait la faiblesse numérique des médecins du travail et la réforme votée en juillet 2011 apparait davantage comme une réforme destinée à gérer la pénurie qu’à améliorer la santé au travail.

Tous ces éléments seront au coeur de la conférence-débat que nous tiendrons le lundi 5 mars à 18 h 30 à l’Athénée municipal de Bordeaux autour d’Alain Vidalies. Elle s’inscrit dans la campagne de François Hollande mais la question est si fondamentale que je souhaite y inviter tous ceux qui, comme tant d’entre nous, veulent tout mettre en oeuvre pour que le travail retrouve son sens et sa valeur.

Juste un mot, au coeur de ce que je crois

François Hollande est le premier à dire simplement que les « talents », les leaders, les élus, les grands chefs d’entreprises, les artistes/sportifs/chercheurs de haut niveau peuvent être menés par autre chose que par l’argent, qu’ils ont le droit comme tout le monde à la liberté de jugement, au choix de leurs valeurs et à se comporter enfin, enfin, comme des élites !

Patriotes, pas seulement. Humains et humains qui pensent et qui savent, et qui savent ce que vivre veut dire.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel