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Bioéthique : implantation post mortem et don du sang par les homosexuels

Deux autres avancées ont été entérinées avant hier et hier par notre commission de bioéthique à l’Assemblée : l’autorisation de l’implantation d’embryons post mortem et le don du sang par les homosexuels.

L’implantation post mortem souffre de sa dénomination qui la met sous le signe du deuil et non de la naissance. Avec raison puisqu’il s’agit d’une circonstance dramatique : l’implantation après la mort du père d’un embryon conçu dans le cadre d’une procréation médicalement assistée.

Nous avons voté hier son retour dans le texte de révision des lois de bioéthique alors que le Sénat (à l’origine par ailleurs d’avancées) l’en avait exclu. Saluons au passage le rôle positif de la députée UMP de Paris, Martine Aurillac, personnalité respectée que je n’ai jamais entendue prendre la parole de manière excessive ou contestable.

La question de cette implantation après la mort du père se pose heureusement rarement. Elle correspond à une situation où un projet parental a été engagé de manière indiscutables par deux personnes adultes. L’une est interrompue dans ce projet par un décès le plus souvent accidentel (les longues maladies n’incitent pas à la mise en route de cette procédure), faut-il pour autant priver l’autre de sa réalisation ?

Nous avons répondu « oui », en assortissant l’autorisation de conditions de délais : pas avant six mois pour que la décision ne soit pas prise par la mère sous le choc du deuil et avant 18 mois pour que l’enfant ne naisse pas à trop grande distance de la mort de son père.

Réfléchissons à ce que serait l’avenir de cet embryon en l’absence de cette autorisation : il serait soit détruit, soit implanté à une autre femme. Peut-on concevoir cet avenir en face d’une mère qui l’a conçue et veut, de manière responsable et réfléchie, le mener à terme.

La seconde avancée n’a pas la même gravité existentielle mais elle n’est pas pour autant négligeable. Le texte du Sénat avait entériné que le don du sang ne pourrait être refusé à aucun candidat donneur hors d’une raison médicale. Une ambiguïté subsistait : le refus en cas de rapport homosexuel masculin antérieur au don était classé dans l’arrêté régissant le don du sang au sein des raisons médicales (risque de transmission d’affection virale). Nous devrons donc lors de la deuxième lecture en hémicycle soit obtenir que l’arrêté soit revu et autorise explicitement ce don, soit voter un amendement le précisant.

Ces sujets sont austères. Ils sont l’occasion de discussions autour des valeurs que chacun de nous portent qui dépassent largement les clivages gauche-droite. Nous avons perçu, à gauche comme à droite, que l’un ou l’autre député avait mission de tenter de faire pencher le débat dans une direction purement politique et nous l’avons regretté… et outrepassé. Cette remarque n’a rien d’ « odieux » comme l’a évoqué un commentateur du précédent billet. Au contraire, en l’absence de tout manichéïsme, je souligne que les valeurs l’ont emporté sur les partis pris.

La commission de bioéthique de l’Assemblée autorise la recherche sur les cellules embryonnaires

La commission de bioéthique de l’Assemblée est un lieu privilégié du débat. Disons au passage que si elle s’intéressait aux conditions de vie – c’est-à-dire au social- et pas seulement à la vie stricto sensu, la majorité des lois de ce gouvernement auraient été retoquées. Mais ce n’est pas le sujet.

En commission ce matin, nous avons repris le débat sur la révision des lois de bioéthique après son passage au Sénat. Les sénateurs, au contraire de leur réputation de conformisme, ont obtenu quelques avancées du texte qu’il nous appartenait ce matin de maintenir, voire de prolonger.

La plus importante concerne la recherche sur les cellules souches embryonnaires. Depuis la dernière loi de 2004, notre pays est confiné dans une hypocrisie qu’il convient de lever : elle interdit les recherches … sauf dérogations. Je passe sur les détails de ces dérogations -qui n’en sont d’ailleurs pas- pour rester dans le principe même du texte.

Notre proposition, dès la première lecture à l’Assemblée, était au contraire d’inscrire dans la loi une autorisation encadrée (c’est à dire dans certaines limites et pour des finalités définies). Dans la pratique « interdiction avec dérogations » et « autorisation encadrée » ne sont pas si éloignées et des chercheurs engagés dans ce domaine que nous avons auditionnés nous ont dit clairement n’avoir pas été limités ni contraints dans leurs travaux.

La différence est par contre grande dans le principe de la loi. D’un côté, l’interdiction, qui marque un signe de défiance envers nos chercheurs qui, entre nous, connaissent et pratiquent aussi bien l’éthique que nous ; et aussi, un affichage peu éclairé de notre pays au regard de la recherche internationale. Certains députés de droite défendent mordicus cette interdiction comme un signe à portée symbolique du maintien de l’interdit dont ils veulent entourer l’embryon.

Cet interdit ne tient pas et à mon sens, il ne tient pas même au regard des engagements spirituels de certains d’entre nous. Les embryons sur lesquels est pratiquée la recherche sont des embryons surnuméraires après fécondation in vitro et ces embryons surnuméraires sont destinés à la destruction. Autrement dit, la recherche ne compromet pas le développement de cet embryon puisque celui-ci n’aurait de toutes manières pas lieu.

D’autre part, les recherches visent, entre autres finalités, l’embryon lui-même. Un de leurs objets est de comprendre pourquoi tel embryon est viable et tel autre ne l’est pas et, dans un deuxième point, d’identifier des techniques permettant de pallier la cause de non-viabiité identifiée. La recherche va donc dans le sens de la vie et non seulement elle n’attente pas à la vocation de l’embryon qui est de fabriquer de la vie, mais elle la défend en cherchant à connaître et à traiter ce qui rendrait impossible cette « vocation ».

Le terme de vocation a ici le sens de « évolution naturelle ». Je n’ai voulu utiliser ni « essence de l’embryon », ni « identité de l’embryon » et j’ai choisi celui de vocation. L’humain a vocation à naître, se développer et mourir, et l’embryon est de l’humain en préparation qui partage cette vocation.

Au terme d’un vrai débat, respectueux même quand nous sentions qu’il y avait derrière certaines prises de paroles la main d’un dieu elyséen désireux de rallier un électorat que le bling-blingisme a un peu éloigné. Nous l’avons emporté et l’autorisation est désormais inscrite dans le « texte de la commission ». Une étape encore : la deuxième lecture en séance.

Commémoration du 8 mai 45

Jamais autant que dans les cérémonies – toujours parfaites dans leur déroulement et d’autant plus intenses qu’elles sont brèves- , je n’ai le sentiment de représenter les Bordelais et d’être là ès qualités. Je me fais un devoir de n’en manquer aucune.

Cette conscience d’être présente « au nom de et avec » est très forte en face des murs gris chargés de noms des soldats morts pendant les guerres du siècle passé. Ces grands murs dressés et leurs colonnes de patronymes, récemment sortis de la pierre par une redorure très bienvenue, sont non seulement beaux mais ils ont un vrai sens. Nous avons la chance d’avoir un monument aux morts qui échappe à tout kitsch et les cérémonies y trouvent leur pleine ampleur.

Je l’ai déjà évoqué : un regret marque pour moi chaque année le 8 mai comme le 11 novembre. Aucune allusion n’y est faite à la construction européenne qui est pourtant la plus belle réponse qui ait été donnée à la suite des 3 conflits 70-14/18-40-45. Le consul général d’Allemagne est constamment présent, mais pas invité au rang des officiels alors que rien ne l’empêcherait. Nulle évocation dans le traditionnel message du Ministre de la Défense et surtout, nul hymne européen, pourtant si beau et si grandiose, qui viendrait prolonger notre Marseillaise.

Tant que nous ne saurons pas mieux incarner l’Europe, en montrer la grandeur en même temps que la familiarité chaleureuse, elle continuera de s’abîmer et de s’enliser au bénéfice des égoïsmes nationaux et du repli sur soi.

A Françoise Olivier-Coupeau

Elle n’avait pas choisi le panache mais la discrétion et je ne lui rend hommage qu’aujourd’hui parce qu’elle-même avait choisi de ne pas rendre publique sa maladie.

Françoise Olivier-Coupeau, députée du Morbihan, est morte le 4 mai à 51 ans, une trentaine d’heures après Patrick Roy. Leur combat a été à la fois le même, face au même risque, aux mêmes épreuves, aux mêmes traitements mais il a été aussi très différent, parce que le cancer était différent mais surtout parce que leur personnalité était radicalement opposée.

La maladie de Françoise a duré plusieurs années. Elle connaissait déjà tout de son cancer lors de son élection en 2007 et s’est battue jour après jour, toujours présente à l’Assemblée sauf dans les épisodes d’aggravation et de reprise des traitements. Elle nous a époustouflé de courage en acceptant des missions qui demandaient beaucoup de résistance et d’énergie.

Membre de la commission de la Défense, elle s’est rendue sur le terrain avec nos soldats en Afghanistan et elle a « crapauté » avec eux. C’est à cette occasion que nous avons le plus parlé, particulièrement sur le sujet trop ignoré qu’est la place de la culture du pavot et de la fabrication de la drogue dans les enjeux du conflit. Comme moi, elle pensait qu’un rôle important de nos forces était de favoriser et de financer la substitution de la culture du pavot par celle du safran, plus rentable pour les agriculteurs et moins soumise à des réseaux criminels.

Françoise était bretonne et nous n’avons jamais parlé directement de sa maladie mais ses proches collègues me tenaient au courant. Je lui ai écrit la veille de sa mort : elle n’aura jamais cette lettre.

Ces deux morts dans un si court espace de temps ont beaucoup marqué nos journées à l’Assemblée cette semaine. Partout, on sentait la gravité et l’émotion.

Françoise non plus que Patrick n’ont pas été « mes » malades. Mais ils ont rejoint beaucoup d’entre eux au panthéon de ceux qui m’ont impressionnée par leur force de caractère et leur dignité.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel