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Proposition de loi socialiste visant à prévenir les conflits d’intérêts : intervention de Michèle Delaunay en séance

Monsieur le Président, Monsieur le Ministre, Monsieur le Rapporteur,

Les médecins hospitaliers et universitaires, les scientifiques, ont une pratique habituelle de la notion de conflit d’intérêts. Ils vivent l’obligation de s’y conformer non comme une contrainte mais comme une démarche naturelle en accord non seulement avec la simple morale mais avec la rigueur scientifique.

Ainsi, dans tous leurs travaux de recherche, clinique ou fondamentale, signent-ils un protocole précis garantissant que leur participation à ces travaux, les résultats qu’ils seront amenés à donner et même leur motivation d’entrer dans l’étude sont exempts de toute possibilité de conflits d’intérêts.

Pour ma part, et je ne mets aucune malignité à cette remarque, je me suis toujours étonnée que leur engagement ne concerne pas systématiquement leurs parents et alliés de premier degré. J’aurais pour ma part trouvé comme incompatible d’analyser les effets d’une molécule du laboratoire Pierre ou Paul si mon conjoint, mon père ou mon fils avaient eu quelque connivence financière que ce soit avec les résultats de la recherche.

Cette expression de conflit d’intérêts est toujours un peu surprenante quand on n’est pas accoutumé de ce jargon. Ces conflits sont bien souvent des convergences d’intérêts susceptibles de brider ou de fausser la liberté de jugement.

Cette faiblesse n’est pas au demeurant une obligation, mais le meilleur n’est pas infaillible. La loi ne doit pas être là pour jeter sur lui la suspicion mais au contraire pour l’en débarrasser et faire que personne ne puisse soupçonner sa probité.

Aussi cette proposition de loi fondée sur un concept bien connu, expérimenté en médecine comme d’ailleurs en politique, me paraît devoir recueillir le plus large consensus.

Ce qui est vrai pour la médecine l’est au moins autant pour l’action publique, pour nos votes et je souscrirai à l’amendement élargissant le cadre de ce projet de loi.

C’est vrai bien sûr pour les choix et les décisions que sont amenés à prendre les Ministres. Ceux-ci ne sont pas indépendants de leurs engagements, et c’est pour cela qu’ils ont été choisis et le plus souvent élus. Mais tout citoyen doit avoir la garantie qu’aucun intérêt personnel, matériel, financier n’entache la crédibilité de celui qui prend la décision et partant de l’ensemble de ses congénères et de la classe politique toute entière.

Voter ce texte ne nous accuse pas, n’accuse aucun d’entre nous au contraire. Cela nous décharge du poids de pouvoir être accusés, mal compris, mis en doute.

J’ai exercé consécutivement des responsabilités médicales puis ce mandat de députée. Les unes ne sont pas supérieures à l’autre, ni l’inverse, et les deux ont en commun l’obligation de crédibilité, le besoin de recevoir la confiance et le devoir d’en faire usage avec conscience et responsabilité.

Vous partagez sans doute cette assurance. Comme moi, quand un homme politique est incriminé, vous sentez que tous en sont entachés et je souhaite que nous votions ensemble cette proposition de loi simplement dans un esprit de confraternité.

Lire le texte de la Proposition de loi pour une République décente

Réconfortant, non ?

Alain Juppé hier, aujourd’hui les 5 ministres que nous auditionnions à l’Assemblée avant le débat sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), tous unanimement sont pleinement satisfaits : notre sécurité sociale et son financement vont bien.

C’est un des grands talents de ce gouvernement de faire passer des dettes pour des crédits. On l’a vu à son maximum avec le Grand Emprunt, qui est présenté partout comme un afflux positif de financement en faveur de la recherche et de l’innovation. Une nouvelle leçon de prestidigitation nous a été donnée aujourd’hui par le quintett Baroin, Woerth, Bachelot, Morano, Berra : présenter comme un succès un déficit moindre que redouté.

Trente cinq milliards de déficit dont 23,1 pour la branche générale de la Sécurité sociale, une accélération jamais atteinte de la croissance annuelle de ce déficit, un système à l’agonie si on ne le remet pas urgemment à l’endroit : nous devons être contents et dire merci à ce bon gouvernement. Le déficit aurait pu être plus grand encore, et le Ministre Baroin a confié qu’il tablait sur 27 milliards. Grâce à ses quatre accolytes de ce matin, respectivement ministres du travail, de la santé et secrétaires d’Etat à la famille et aux « ainés », ce déficit annoncé a pu être réduit de près de 4 milliards.

Merci qui ?

Nous en sommes restés pantois et jusqu’aux bancs de droite, il y en avait pour se jeter des regards d’étonnement quand ce n’était pas d’admiration pour nos 5 magiciens.

Pour ma part, je me suis risquée à une comparaison. Qu’aurait pensé un malade hospitalisé dans mon service depuis 4 mois et que je serais allée voir avec cette annonce : « Cher Monsieur, j’ai une bonne nouvelle pour vous. Selon toute probabilité, quand vous êtes arrivé, vous aviez au mieux 3 mois à vivre. Et que constatez vous comme moi ? Mes bons soins vous ont accordé un mois de plus ! »

Nous en sommes là. Là exactement. Réconfortant, non ?

LOL

J’ai beaucoup ri hier, dans mon faible intérieur, lors de la réunion du Conseil de Surveillance du CHU de Bordeaux, d’écouter notre estimé Président Alain Juppé se déclarer fort satisfait de notre système de santé « que le monde entier nous envie ».

Les circonstances sont la raison de ce « LOL ». Venait de nous être présenté l’achat par le CHU de nouveaux appareils d’imagerie de haut niveau : scanner, IRM, TEP (tomographe à émission de positron). De beaux jouets entre 1 et 3 millions d’euros qu’il convient de renouveler tous les 5 à 8 ans. Je me suis félicitée devant l’assemblée de ces achats, positionnant favorablement l’hôpital public dans l’aménagement territorial en imagerie médicale et… économisant des masses d’euros au regard du coût des examens réalisés selon les mêmes technique dans le privé.

Un précédent billet rend compte du scandaleux surcoût pour la sécurité sociale des examens pratiqués par les radiologues privés. J’ai donné le montant de la facture tel que Didier Migaud l’a détaillé lors de sa présentation du rapport de la cour des comptes sur les comptes de la sécurité sociale.

Je n’attaquais ni Pierre, ni Paul (ni Alain, ni Nicolas), notre estimé Président aurait pu comme moi se féliciter de l’excellence et de la rentabilité financière du service public.

Il n’en fût rien. Le voilà tout au contraire parti dans une apologie du système de soin français de coexistence public-privé. « Le monde entier nous l’envie à commencer par les USA et le Canada » conclut-il.

Et que bien sûr ! Nous n’avons qu’à nous réjouïr : 35 milliards de déficit, qui pourrait dire mieux ? Se réjouïr davantage ? Voir l’avenir d’un meilleur oeil ?

Ce qu’oubliait de dire Alain Juppé, c’est qu’Etats-Unis et Canada, s’ils regardent du côté du système français, c’est pour tenter d’introduire davantage de public dans leur système, ruineusement inégalitaire, parce que presque exclusivement privé. L’inverse de ce qu’il voulait démontrer.

C’est comme le mythe du système fiscal allemand que nous sert Sarkozy depuis trois ans : le contraire de ce qu’il affirme.

Ce qui par contre est bien américain, c’est ce petit LOL que les jeunes ajoutent en dérision à ce dont ils ne croient pas un mot.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel