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Un héros de notre temps

Ce n’est pas à Bernard Giraudeau, ni à ses semblables dans l’épreuve que pensait le poète Lermontov en intitulant ainsi un court roman. C’est à ce titre de roman au contraire que j’ai si souvent pensé en soignant, en connaissant chaque jour davantage tant de cancéreux graves qui vont de rechutes en traitements lourds avec un héroïsme discret et anonyme qui a toujours forcé mon admiration.

Je ne connais pas le détail de l’épreuve de Bernard Giraudeau et je ne l’ai en rien partagée. Dix ans depuis le diagnostic d’un cancer du rein, quatre récidives et autant de longues séquences thérapeutiques. J’ai seulement écouté un interview de lui, il y a quelques semaines à peine. Il s’exprimait avec une ludicité, une connaissance de sa maladie et une élégance qui m’ont fait une fois de plus évoquer le héros de Lermontov.

Les traitements du cancer du rein qui comportent souvent des biothérapies par interleukine sont difficiles à supporter. Plus difficile encore, et ceci quel que soit le cancer quand il se complique, est la suite d’épreuves que constitue chaque récidive, l’attente des résultats des examens qui les découvrent, la mise en oeuvre d’un traitement, puis d’un autre quand il ne marche pas, ce feu incessant de l’ennemi qui a incontestablement quelque chose à voir avec la guerre.

Dans cette bataille de plusieurs années, quelquefois dix comme pour Bernard Giraudeau, quelquefois bien davantage, nombreux, très nombreux sont les malades qui font preuve de ce que je n’hésite pas à qualifier d’héroïsme. Nul ne sait s’il a en lui cet héroïsme, non plus que les militaires ne connaissent pas à l’avance leurs réactions devant le feu, non plus qu’aucun citoyen ne peut dire s’il aurait été résistant ou s’il aurait tenu devant la torture. J’ai rencontré pour ma part de véritables héros, non seulement par leur courage, mais par l’élégance avec laquelle ils l’ont manifesté, leur attention à leurs proches, leur volonté de n’en rien montrer, d’assumer leurs engagements ou de conduire leurs affaires. Quelquefois, de continuer à soigner leurs malades.

J’ai évoqué un jour cet héroïsme avec un militaire. Il n’avait jamais connu l’engagement direct en « opérations » , comme on dit maintenant, mais il s’est conduit en face d’une maladie particulièrement éprouvante par le nombre de tumeurs visibles sur son corps, comme un de ces héros. Il m’avait dit, comparant au courage militaire : « Sur le champ de bataille, on risque sa vie ; dans la maladie, on cherche à la sauver ». Lui, ne cherchait plus à la sauver, il savait et voulait seulement être ce « héros de notre temps ».

Hommage donc. A lui, à Bernard Giraudeau pour tous les autres auxquels je pense, non pas toujours, mais toujours intensément.

Pour une justice indépendante

Soyons très nombreux à manifester notre exigence d’une justice indépendante.

Dans l’affaire Woerth-Bettencourt comme dans les autres.

Une pétition n’est certainement pas une arme mais au moins un bon outil. On se souvient qu’une pétition a précédemment participé à faire reculer Nicolas Sarkozy dans la nomination de son fils à la tête de l’EPAD.

Signons en ligne la pétition pour la nomination d’un juge d’instruction dans l’affaire Woerth-Bettencourt.

Une société de simplicité et de rigueur

Je garde comme un trésor une ligne d’un petit cahier de mon père : « Travaille à une société de simplicité et de rigueur ».

La phrase figurait sans signature dans mon premier document électoral. Elle a constitué pour moi beaucoup plus qu’un conseil. Elle gagne chaque jour un peu plus de force et d’actualité.

Est-il besoin de commenter le mot « simplicité » ? C’est celui qui revient aux lèvres de ceux qui ont la gentillesse d’évoquer encore le souvenir de mon père et même si j’ai plaisir à le noter, ce n’est certainement pas le sujet de ce jour. Une phrase de Gandhi, qu’Alain Rousset a choisi d’afficher en grandes lettres dans l’attique de l’hôtel de région, résume et définit mieux ce que contient le mot « Vivre simplement pour que d’autres, simplement, puissent vivre ».

Mais « rigueur » ? Les médias s’émerveillent que François Fillon ait aujourd’hui prononcé le mot, pensant aux restrictions budgétaires appliquées à notre économie. Combien j’aurais préféré qu’il l’utilise enfin dans son sens le plus complet et le plus fort !

La rigueur ce ne sont pas des « rabotages » (modestes) de niches fiscales, des coupes dans le budget des ministères, réalisées avec un ciseau à angles ; moins encore une réduction des budgets sociaux, des crédits aux étudiants ou aux handicapés. La rigueur c’est un état d’esprit, une morale, une méthode, un souci permanent, une exigence. Comme j’aurais aimé que Fillon la décrète aujourd’hui et prenne la mesure de ses conséquences !

Comme nous aurions tous aimé qu’il perçoive comme une évidence, lui qui il y a trois jours à l’Assemblée nous disait que « nous avions perdu » parce qu’un rapport de l’inspection des finances n’ayant trouvé aucune trace écrite de directives ministérielles obligatoirement verbales avait « innocenté » le maître financier de l’ump, qu’il fallait à cette rigueur des preuves ! Une autorité de justice indépendante dans l’affaire qui secoue actuellement notre République, une attitude exemplaire de tous les Ministres largement pourvus en casseroles diverses, le respect de la presse d’investigation et de divers autres contre-pouvoirs…

Travaille à une société de simplicité et de rigueur. Fût-ce avec une toute petite cuillère, comme les archéologues dans le terrain des fouilles, fût-ce dans l’inquiétude et sa soeur l’incertitude, c’est le job que nous devons nous assigner pour tenter de sauver le radeau de la méduse qu’est devenu notre pays.

Réforme des retraites : le scandale de la pénibilité

De la pénibilité ou plus justement de son absence de prise en compte réelle.

Eric Woerth a présenté le 13 juillet, au Conseil des Ministres d’abord, puis à la commission des affaires sociales de l’Assemblée, un projet de réforme des retraites strictement inchangé par rapport à la mouture initiale. Le dernier tour de concertation avec les partenaires sociaux, la manifestation populaire massive du 24 juin ont eu l’effet d’un cautère sur une jambe de bois.

Long préambule où il a répété que la réforme était « juste, courageuse et équilibrée ». Trilogie relayée par le Maire de Bordeaux mais dont la répétition ne suffit pas à faire une vérité.

Le point le plus noir, l’impardonnable défaut, est la non-prise en compte de la pénibilité du travail au profit du taux d’invalidité.

C’est impardonnable parce que nous avons aujourd’hui toutes les connaissances permettant d’apprécier la pénibilité. Eric Woerth, alors que je l’interrogeais sur ce point, s’est réfugié dans la difficulté à définir la pénibilité et j’ai essayé de montrer qu’il n’en était rien. Exercice inutile. Il le sait bien évidemment.

La pénibilité a été définie en tenant compte de critères validés par les partenaires sociaux qui mettent au premier plan l’espérance de vie, de 7 ans plus courte chez les ouvriers que chez les cadres supérieurs. Je l’avoue cette définition ne me satisfait pas entièrement car elle met au premier plan, les dégâts de la pénibilité au lieu de sa possibilité de prévention.

Nous avons tous les moyens de mesurer la pénibilité pour la prévenir dans les travaux et statistiques issus de la médecine du travail, des études de santé publique et des statistiques de l’INSEE.

Pour tous les grands groupes professionnels, nous connaissons les risques encourus, leur taux, le taux de morbidité (c’est à dire le pourcentage de maladies et de troubles), le type de ces maladies, leur âge de survenue et le temps d’éxercice au bout duquel ils surviennent de manière prépondérante.

Ne disposerions-nous pas de ces données, le bon sens suffirait pour savoir qu’un couvreur a un métier pénible, que son risque de chute augmente avec l’âge et que rester par temps de canicule ou de grand froid sur un toit est difficilement supportable. Un Ministre, fût-il du travail, ne le supporterait pas deux heures. Un député ne serait sans doute pas plus vaillant à l’éxercice.

Pour essayer d’attirer l’attention du Ministre, fin connaisseur du monde équestre, j’ai pris aussi l’exemple des jockeys de Chantilly. Avant que j’intervienne en séance, internet m’avait confirmé dans la connaissance de la pénibilité spécifique à ce mêtier qui fait que ces porteurs de casaques doivent interrompre leur métier bien avant 62 ans.

En réalité, Eric Woerth sait tout cela et il a proposé que « pour ceux chez lequel sera constatée une invalidité liée à leur profession de 20% au moins, la retraite pourra avoir lieu à 60 ans. » Pas au moment du constat d’invalidité, à 60 ans.

Eric Woerth sait aussi que cette sorte d’invalidité s’aggrave même après interruption de l’activité. Il sait aussi, qu’avec une médecine du travail dans l’état ou huit ans de gouvernement de sa majorité l’ont mise, de l’eau passera sous les ponts avant que tous les travailleurs aient vu leur état évalué et « labellisé ». Non seulement, il le sait, mais il compte dessus.

Il sait aussi que 20% c’est une réduction du cinquième des capacités de vie normale. Ce que l’âge aggravera et qui augmentera le fossé sanitaire entre les classes sociales.

Cette réforme remplace la pénibilité par les dégâts du travail. Je fais bêtement partie de ceux pour qui tout doit être fait pour que le travail donne de la force au lieu de l’enlever. De même, je pense que les conditions de travail sont plus importantes encore que la durée du travail et que nous (les socialistes) avons probablement trop agi pour la seconde et certainement pas assez pour les premières.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel