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Préfets : serviteurs de l’Etat, mais pas au pourboire !

Jusqu’où ce gouvernement ira-t-il dans la dévalorisation de la chose publique, la perte de sens et la confusion des genres ?

Nous apprenons aujourd’hui que Préfets et sous-Préfets touchent depuis fin 2009 des « super-primes » (indemnités de fonction) quand ils alignent des résultats qui satisfont le gouvernement. Elles peuvent atteindre 66 000 euros par an et sont attribuées à la discrétion du Ministère de l’intérieur pour les Préfets (et des Préfets eux-mêmes pour leur sous préfets). A leur maximum, les primes de ces hauts fonctionnaires représenteraient un total -c’est à dire une charge pour les contribuables- de __26 766 000 euros.

Les Préfets, représentants de l’Etat, garants de son impartialité et de son indépendance de toute pression, se voient aujourd’hui appliqués une logique managériale, à l’opposé du sens de leur fonction.

On rappelle qu’un Préfet ne représente pas le chef de l’Etat, non plus que le gouvernement, mais l’Etat. Il vient en premier dans son Département ou sa Région dans l’ordre républicain pour bien montrer la prééminence et l’indépendance de sa fonction sur la totalité des fonctions électives, administratives, religieuses…

Imagine-t-on qu’il puisse travailler à la prime ? Ceci d’autant que l’évaluation de ses résultats est hautement sujette à caution : les résultats chiffrés ne montrent rien d’autre que la prééminence de la politique du chiffre sur le travail de fond et les résultats administratifs risquent bien d’être mesurés à l’aune de la politique partisane du gouvernement.

En outre, dans cette période de rigueur et alors que les fonctionnaires, stigmatisés comme « trop coûteux », seront parmi les premiers touchés par les mesures actuelles (gel de salaires, hausse de cotisations… ), ces primes sont également insultantes pour la fonction publique à laquelle elle donne une fois de plus le spectacle d’une gestion à deux vitesses, où le salaire des uns est gelé quand d’autres sont récompensés en fonction de leur proximité du pouvoir.__

A l’évidence, cette politique de pourboire n’a d’autres buts que de raffermir la main mise par ce gouvernement sur le corps préfectoral, coupable a priori de préférer le service de l’Etat à celui de son chef.

Réduire les budgets sociaux nuit gravement à la santé

Depuis plus de dix ans, des publications de toutes origines mais principales américaines, alertent sur les liens entre santé et équité sociale. Les sociétés qui vont le mieux sont les moins inégalitaires, selon le principe connu depuis Sénèque « il n’est pire pauvreté que celle qui est vécue dans l’opulence ».

J’ai peu d’espoir d’être entendue en conseillant à Nicolas Sarkoz la lecture de Sénèque. Peut-être la chance est-elle moins improbable de lui indiquer une publication du 24 juin du British Medical Journal sur laquelle je viens moi-même d’être aiguillée par la lecture du Monde. Carla ou Mme Lagarde la lui traduiront aisément et ce sera faire d’une pierre trois coups : ces deux dames y gagneront aussi en instruction.

Trois scientifiques, deux Anglais, un Américain ont mis au point un modèle mathématique permettant d’étudier parallèlement les données de mortalité dans quinze pays de l’Union Européenne et les budgets sociaux.

Chaque augmentation de 100 dollars par individu du Produit National Brut est associée à une diminution statistiquement significative de 0,11% de la mortalité. Une hausse équivalente des budgets sociaux entraine une __baisse sept fois plus importante de la mortalité.

Cette même augmentation de 100 dollars des budgets sociaux (dans lesquels ne sont pas comprises les dépenses de santé) diminue de 2,8% les décès liés à l’alcool, de 1,2% la mortalité cardio-vasculaire, de 0,62% les morts par suicide et 4,34% celles dues à la tuberculose. Une augmentation de même niveau des dépenses de santé diminue de manière moindre la mortalité d’origine cardio vasculaire et celle due au suicide ; paradoxalement en apparence, elle élève la mortalité due à l’alcool et à la tuberculose qui sont des maladies sociales.

La leçon à tirer de ce travail est double.

– La première concerne les économies à faire face aux dettes des pays. Elle ne doivent concerner que ce qui n’altère pas la santé sociale d’un pays, ni son développement et la situation de l’emploi. Ce sont les dépenses improductives dans ces deux domaines qui doivent seules en faire les frais.

– La deuxième, que je rabache dans chacune de mes prises de parole et dans quasiment tous les documents que j’écris : il faut mettre la santé au coeur des décisions politiques. Les dépenses sociales sont des dépenses de santé et donc des dépenses pour l’avenir.

Au passage, et comme le montre cette étude, ces dépenses sont aussi des économies : diminuer la mortalité veut dire aussi diminuer le besoin de soins et réduire d’autant les dépenses sanitaires.

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Est-ce que vraiment plus rien n’a de valeur ?

La faute implacable qui sera mise sur le compte de ce gouvernement, et au premier chef du Président de la République, c’est la dévaluation de la chose publique, la dégradation des mots, des signes, des fonctions.

Je n’en prendrai aujourd’hui qu’un exemple que d’aucun trouvera relativement futile, mais qui au regard du passé encore proche ne l’est pas : l’ordre de la légion d’honneur.

Bien des nominations dans cet ordre nous ont déjà choqués. Je dis « nous » car bien souvent on m’en fait part et on s’y réfère quelquefois pour ne pas accepter cette distinction ou simplement remplir le dossier qui appuie la proposition qu’une personne habilitée a faite.

Je n’en évoque qu’une aujoud’hui, O combien au coeur de l’actualité : la distinction de Patrice de Maistre, décoré des mains d’Eric Woerth, et sans doute proposé par lui, dans les locaux mêmes de son ministère à Bercy.

Qui est Patrice de Maistre ? Le gestionnaire de biens de Mme Bettencourt. C’est à dire la personne en charge de « placer » sa fortune, dont on sait maintenant que ce fût souvent dans des comptes en Suisse, des achats d’Iles non déclarés au fisc et autres manoeuvres dont nous ne connaitrons jamais tout.

Ces hauts faits méritent-ils la plus haute distinction de la République française ? Celle que quelques-uns ont reçu sur le champ de bataille, au prix d’actes d’héroïsme et bien souvent de lourdes blessures? Celle que l’on remet à titre posthume à ceux qui ont sacrifié leur vie? Celle qui vient couronner de longues années au service de l’Etat ? Ou un mérite particulier faisant honneur à la France .

J’entends déjà qu’on me suggère que Patrice de Maistre a d’autres mérites. Il a par exemple épousé la première femme de Bernard Arnault qui le dispute à Liliane Bettencourt dans l’ordre des grandes fortunes de France. Les plus cultureux ajoutent qu’il est un lointain descendant de Joseph de Maistre, farouche adversaire de la Révolution française dont je mets au défi les lecteur de ce blog d’avoir jamais lu une seule ligne.

Même d’un gouvernement de droite, volontiers complice de quelques relans intégristes, ce dernier fait ne peut être le seul motif. L’avant-dernier par contre a, en Sarkozie occidentale, valeur de faits d’armes.

J’aimerais connaître la teneur du discours d’ Eric Woerth lors de la remise de la décoration, flattant comme il se doit les mérites du récipiendaire. Je doute cependant qu’en en demandant copie à son cabinet, j’obtienne satisfaction. Il y a des actes dont ce n’est qu’après coup qu’on se rend compte combien ils ont été inconsidérés et celui-ci doit peser lourd sur la poitrine du Ministre. je n’ai pas osé écrire « sur sa conscience », car de celle-ci nous ne savons rien.

Voilà, j’en ai gros sur le coeur. J’ai proposé à cette distinction des « évadés de France », des grands noms de la médecine bordelaise, pour ne recevoir qu’un rejet.

Cela non plus, après tant d’autres exemples, n’est pas acceptable.

Une marée de manifestants

Raz de marée de manifestants et une très belle représentation du Parti socialiste aujourd’hui à Bordeaux. Si la mobilisation est partout en proportion, le succès ne pourra pas être discuté.

Partout dans les rangs de manifestants, on devinait que cette mobilisation n’allait pas seulement à l’encontre de la réforme des retraites. La somme des « affaires » qui n’ont pas débrayé un seul jour depuis plusieurs semaines et la déconsidération du pouvoir étaient dans toutes les conversations.

Nous sommes d’ores et déjà tous comptables, non seulement de l’élection d’un Président plus soucieux de la République et de l’intérêt général, mais de la réussite du futur gouvernement. C’est cette urgence que manifestait la mobilisation d’aujourd’hui.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel