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Quand la prothèse de hanche remplace les pavés et la plage

La prothèse de hanche en passe de devenir l’intervention fétiche des ex-baby-boomers ? Où qu’on aille, y compris au delà de nos frontières, c’est l’opération tendance à laquelle il est difficile de ne pas céder. Déjà, plus de 140 000 par an en France, 400 000 aux Etats Unis alors même que les plus précoces des boomers n’ont que 70 ans ! Que sera-ce dans dix ans quand ils seront dix millions de plus à avoir atteint cet âge ?

Pour la Socialo que je suis, c’est un vrai sujet de satisfaction. Voilà au moins une mode qui respecte complètement l’équité sociale comme l’égalité entre les sexes. Chefs d’Etat ou cheminots (..), laboureurs et patureurs, business women comme pétroleuses, si « tous ne meurent point, tous sont frappés » .. Et cerise sur le gateau (et quelle belle cerise !) 100% remboursée à tous.

Ce ton léger pour parler joyeusement d’une des clefs de la réussite de la transition démographique : le progrès médical qui fait d’interventions et de traitements impensables il y a 50 ans, des actes presque routiniers et à la portée de tous, sans assurances spéciales comme aux USA, sans discrimination d’aucune sorte. Mesurons notre chance, mais aussi notre responsabilité de la sauvegarder et de mettre à profit ces progrès en les transformant en activité et en utilité.

Et un clin d’oeil (un peu tardif) à l’écrivain Colette : si elle avait pu en bénéficier, elle qui fut aussi vedette de music hall grâce à son incroyable souplesse, aurait vu sa soixantaine (et au delà) transformée, au lieu de la vivre confinée dans son appartement du palais royal. Juste pour dire que les progrès médicaux sont aussi de formidables vecteurs de changement de socièté.

 débat en cours sur ma PAGE Facebook, dédiée aux multiples questions posées par la transition démographique https://www.facebook.com/michele.delaunay/posts/1782938448493788

Le défi particulier des personnes LGBT vieillissantes

Parmi tous les défis que la génération des « boomers » a à relever pour rendre concrète la « révolution de l’âge », l’un est à la fois universel et remarquablement spécifique : celui des personnes LGBT vieillissantes.

Universel, bien sûr, car le vieillissement l’est et celui-ci n’a en soi rien de particulier ; mais aussi spécifique parce que l’histoire des personnes LGBT qui arrivent aujourd’hui dans le champ de l’âge l’est fondamentalement et qu’elle a construit une communauté qui va plus loin que l’addition d’histoires individuelles.

D’abord parce que les lois sont relativement récentes abolissant, puis punissant, les discriminations envers l’homosexualité ; puis assurant la totale égalité des droits avec la légalisation du mariage des personnes de même sexe (2013). Les personnes LGBT qui sont aujourd’hui âgées ont traversé toutes ces étapes. Ce sont elles qui ont eu la transgression et, dans bien des cas, le courage de « faire leur outing ». Plus encore que l’ensemble des (ex-baby) boomers, tous sont marqués par une culture d’émancipation qui leur rendent aujourd’hui intolérable de devoir affronter de nouveau ce qu’ils vivent comme une discrimination  dans le dernier tiers de leur vie.

Cette « discrimination ressentie » tient à de multiples éléments. Nombreux sont ceux qui ont vécu seuls et/ou qui sont seuls au moment de la retraite et au delà. Leurs pensions de retraites (et l’absence de pension de conversion si ils ont partagé la vie d’un compagnon) sont plus faibles que la moyenne et ils n’ont bien souvent pas ou peu de soutien familial, pas non plus de descendance. En maison de retraite ou en EHPAD, ils éprouvent beaucoup de difficultés à continuer d’avoir à affirmer leur identité et leur droit à l’intimité et à la sexualité.

Plus particulière encore, est leur histoire médicale. Rappelons que ce n’est qu’en 1982 que l’homosexualité a été définitivement exclue des maladies mentales. Mais surtout cette génération aujourd’hui vieillissante a traversé l’épidémie du SIDA, avec ce que cela suppose de contraintes et de drames. Ceux qui ont évité la contamination,ceux qui vivent avec un traitement, ceux qui ont perdu des proches, tous ont connu la crainte, voire la perspective, d’une mort précoce, ne pensant pas arriver à la retraite et de ce fait, ne la préparant pas, ni n’anticipant comment ils vivraient à ce moment.

Ces craintes, ces particularités de vie, sont parfaitement explicitées dans le rapport que j’ai demandé en 2013 sur ce sujet si important : le vieillissement des personnes LGBT. Ce rapport conclut en avançant 23 propositions pour la prise en compte de ces difficultés particulières. Je n’en évoquerai ici qu’une seule : la possibilité d’EHPAD(s) « gay friendly ».

La loi ne permet pas d’établissement communautaire, mais rien n’empêche que l’un ou l’autre manifeste des spécificités ou des compétences particulières. Je n’exclus pas d’avoir été la Ministre qui a visité le plus grand nombre d’EHPAD : ces établissements, leur personnel et leurs résidents m’ont appris beaucoup plus qu’une étagère entière de livres de philosophie et de sciences sociales. J’en ai retiré, en plus de tout le reste, une conviction : ce n’est pas à 85 ans (âge moyen d’entrée en EHPAD) ou au delà, que l’on change ou que l’on peut être formé ou déformé. On a, au contraire grand profit à se trouver dans un milieu compréhensif, familier et où l’on retrouve des éléments de vie qui rassurent et qui échappent à l’oubli. Telle pensionnaire, allemande, mais qui n’avait depuis des lustres pas entendu un mot de cette langue, a retrouvé la parole et l’échange aux quelques mots que je lui ai dit dans mon médiocre allemand. Tels autres, tous immigrées et rescapés du ghetto de Varsovie, retrouvaient de la couleur et de la vie en chantant des chants ashkénazes ou polonais… Ce dernier exemple, alors que j’étais prévenue contre le caractère religieux d’un EHPAD particulier, a fini de me convaincre qu’il n’y avait en ce domaine qu’UNE règle : que les résidents se sentent chez eux et se sentent libres d’être eux-mêmes.

Les sujets sont éminemment différents, mais le principe de liberté, l’absence de tout risque d’être « communautarisé » alors que l’on a atteint le grand âge, m’a incitée à porter l’idée qu’un EHPAD pouvait parfaitement témoigner d’une compétence particulière en direction des personnes LGBT ayant le souhait de se retrouver entre personnes amies et bienveillantes. Ceci n’est toujours pas une évidence, mais je décèle une prise de conscience et une réflexion autour de ce sujet de la particularité et de la liberté. Je m’en réjouis et, avec mes conscrits « soixante-huitards » , j’en porte et porterai l’idée. Cela fait partie de notre devoir, nous les « silver-boomers » d’émanciper l’âge et le grand âge d’un maximum de contraintes.

 

Sortir du tabac

Le tabac tue et a tué beaucoup plus que le nucléaire. Cette comparaison n’a d’autre sens que de mettre en perspective l’ambition que je me suis donnée et que j’ai largement diffusée « sortir du tabac en 2030 ». « Sortir du tabac » est aujourd’hui le nom compte twitter que j’anime avec le soucis d’aborder en liberté tous les aspects du tabagisme et de la lutte qu’il doit susciter sur le plan individuel, politique et culturel.

Il me semble que nous amorçons cette sortie du tabac. Les chiffres de vente fléchissent de 20%, sur tous les produits du tabac depuis l’augmentation du prix du paquet à 8 euros, preuve s’il en était besoin que le facteur prix est l’élément déterminant. On pourrait douter de la nature de cette diminution, les fumeurs faisant souvent des « provisions » dans la perspective de l’augmentation mais l’augmentation parallèle des ventes de substituts nicotiniques laisse à espérer qu’il s’agit bien d’une réduction de consommation du tabac et de l’affirmation d’une volonté plus étendue d’arrêter.

L’augmentation du prix et, en ligne de mire, la promesse d’un « paquet à 10 euros » est le facteur déterminant. Au passage, avouons que c’est une de mes fiertés en politique d’avoir lancé en 2015 ce seuil symbolique, par mes amendements à l’Assemblée et dans la presse en tant que présidente de l’alliance contre le tabac ; puis de l’avoir vu ensuite cheminer jusqu’à une prochaine concrétisation. Ce facteur déterminant n’est cependant pas le seul. Il suit des mesures dites de « débanalisation du produit » dont le paquet neutre est le meilleur exemple. Il s’ajoute aux très belles campagnes de « Moi(s)sansTabac qui sont porteuses d’un message pratique de santé publique et d’aides à arrêter, dont le remboursement prochain des substituts nicotiniques n’est pas le moindre. Cette mesure a tardé (elle vient après le forfait de 150 euros mis en place en 2017) car elle imposait d’obtenir des groupes pharmaceutiques un prix conventionné et donc remboursable pour ces produits, au lieu du prix « libre » plus avantageux pour les fabricants comme pour les vendeurs.

C’est donc une stratégie complète et diverse de prévention, telle qu’on nous l’apprend en santé publique, qui laisse entrevoir « le début de la fin » de ce commerce de mort qu’est le tabac.

Tout cela n’est ni facile, ni gratuit. Les buralistes ont ainsi obtenu cette année une enveloppe supplémentaire de l’Etat de 250 millions d’euros en vue de leur « diversification ». Cette somme est considérable et, disons par exemple, que les EHPAD ont obtenu une « rallonge » de 50 millions d’euros sur le plan d’investissement dont elle bénéficient chaque année. La loi d’adaptation de la société, qui a permis une augmentation notable d’une allocation sociale (l’APA) avait pour contrainte de ne pas excéder 650 millions. C’est donc, en ces temps d’économies, un effort considérable de l’Etat.

J’entends par ailleurs que l’on pourrait vendre « la Française des jeux » et que les buralistes (et, d’une certaine manière, les cigarettiers) pourraient faire partie des acquéreurs. Sans aller plus loin, je ne voudrais pas que cela facilite le remplacement de la pire des addictions, par une autre, l’addiction au jeu et en particulier aux jeux en ligne). Soyons attentifs à ce risque.

Cette pratique n’est pas coutumière de ce blog mais je tiens à saluer la détermination de la Ministre Agnès Buzyn, dont j’ai été convaincue,  lorsque je l’ai rencontrée pour la première fois à l’INCA (Institut National du Cancer) sur ce même sujet du tabac. Si la baisse de consommation se confirme et perdure, oui, nous pourrons espérer la « sortie du tabac en 2030 »

 

 

Tout fout le camp…

Tout fout le camp, même la pyramide des âges… A force d’être ignorée des responsables politiques, enseignée dans les écoles et dans les universités sans qu’on en décrypte les effets, la pyramide à large base, appuyée sur le nombre de naissances pour culminer de manière pointue par les rares centenaires qui l’avaient grimpée jusqu’au bout, est devenue l’obélisque des âges°.  A force de n’avoir été ni comprise, ni interprétée comme le plus grand des bouleversements du XXème siècle, elle est devenue une sorte d’obus qui éclate dans la figure des économistes comme des sociologues et de ceux-ci comme de tous ceux qui se targuent de prévoir l’avenir.

Resserrée aujourd’hui à sa base par la réduction de la fécondité, elle s’empâte désormais dans son dernier tiers à cause de la réluctance des âgés à mourir gentiment et régulièrement à partir de 60 ans. En 1950, les 0 à 5 ans représentaient 13% de la population mondiale, en 2100, ils ne compteront que pour un petit 6%. Sur la même période, les 60-65 ans vont voir leur proportion doubler pour atteindre ce même 6%. En 2100, ce n’est qu’après 80 ans, que la pyramide retrouvera sa pointe, les plus âgés se décidant quand même à quitter progressivement la scène.

L’air de rien, cette histoire de pyramide transformée en obélisque ou en obus change tout. La forme diffère un peu selon qu’il s’agit de pays développés ou non, mais la silhouette générale s’impose avec l’augmentation massive de l’espérance de vie et la réduction de la natalité. Et si, enfin, on en venait à considérer la transition démographique comme la plus radicale, en même temps que la plus humaine, des transitions ?

 

° Chiffres et schéma tiré de « La France face au vieillissement » ed Descartes 2013

Bon pied, bon oeil, oui, mais…

Bon pied, bon oeil, les âgés de ma génération dans leur grande majorité. Oui, mais grâce à qui et à quoi ? Aux progrès médicaux, évidemment. Cela paraît une banalité de le dire, mais pourtant bien peu en font mention quand ils évoquent les « nouveaux vieux ».

Les progrès sans doute les plus bénéfiques concernent la mobilité. C’était autrefois la première des pertes d’autonomie : ne plus pouvoir marcher normalement, puis ne plus pouvoir marcher du tout et enfin, devenir « grabataire ». Arthrose du genou ou des hanches, rhumatismes polyarticulaires, condamnaient à la marche avec canne, une marche claudicante et craintive, à petits pas qui proclamait l’âge et l’aggravait en réduisant la mobilité et la poursuite d’activités salutaires comme le simple jardinage.

La romancière Colette, célèbre pendant toute la première partie de sa vie pour sa souplesse qui lui permettait de donner des spectacles de music hall fut, dans sa soixantaine, condamnée aux arrêts dans son appartement de la Place royale, alors même que sa tête et sa main d’écrivain n’avaient rien perdu de leur vigueur. Aujourd’hui Colette bénéficierait autant que nécessaire d’un « changement de pièces » (prothèses de hanches, de genou, intervention orthopédiques sur les pieds..) et gagnerait dix ans de vie active.

La prothèse de hanche est sans doute l’acte chirurgical le plus emblématique de la génération des boomers. Née, comme eux, peu après la guerre, elle a évolué avec eux en se pratiquant dès un âge relativement jeune et  pour un public qui désirait beaucoup plus qu’aller prudemment de la chaise au fauteuil ou de la maison à la pharmacie du quartier. A partir des années 70, elle a gagné en solidité et perdu en suites post-opératoires. C’est aujourd’hui une intervention presque banale (on en pratique en France 140 000 chaque année et près de 300 000 aux Etats- Unis), on en parle plus aisément, c’est devenu une réparation de routine, accessible à tous (totalement remboursée) et connaissant peu d’échecs.

L’intervention de la cataracte, permet de retrouver en quelques heures une vision normale et sans hospitalisation. Implants, bridges, prothèses auditives ont relégué les antiques images du vieillard en devenant eux-mêmes invisibles.  Je ne détaillerai pas toutes les « réparations » dont sont capables médecine et chirurgie pour m’en tenir aux plus fréquemment pratiquées. Les « boomers » en font et en feront des actes de consommation courante.

Quelques mots pourtant des interventions à visée esthétique. Si on a l’âge de ses artères, il n’est pas moins vrai de dire qu’on a aussi l’âge que l’on parait, et d’abord pour soi-même. Bien souvent, on ne s’autorise une nouvelle entreprise qu’au bénéfice d’une d’une opération des paupières, voire d’un lifting ou d’une implantation de cheveux. Et qu’on ne croit pas que les femmes soient seules ou très majoritairement concernées, loin de là. La politique, où l’apparence et la confiance en soi sont de très utiles outils en fournit maints exemples. Dans l’hémicycle avec Jérôme Cahuzac, lui-même chirurgien, nous avons échangé des regards complices en devinant quelques « retouches » sur l’un ou l’autre de nos collègues députés. Jean Luc Mélenchon a ressenti le besoin d’un lifting avant de se lancer dans l’aventure de la France insoumise. J’espère qu’il ne m’en voudra pas d’évoquer ce qui n’était pas un secret tant les modifications de ses traits dans l’après-chirurgie étaient éloquentes et j’aurais garde de lui reprocher d’aucune manière cette retouche qui lui a certainement donné plus d’aise dans son jeu très convaincant de professeur boudeur.

Mais la chirurgie dite « esthétique » voit ses bienfaits limités par son coût. Si je ne suis pas favorable à un remboursement général, une mesure d’équité serait une pratique des actes les plus répandus à tarifs accessibles, ou du moins, plus accessibles. C’est le cas déjà dans quelques hôpitaux et un élargissement de cette offre serait à la fois bénéfique pour l’accès d’un public plus nombreux, une limitation des prix au-delà même de la pratique hospitalière et… pour le budget des hôpitaux. Je crains que nous n’en soyons pas là, alors que la pratique ambulatoire de nombreux actes le rend possible.

On dit bien souvent « rester jeune, c’est dans la tête ». Il serait malhonnête de ne pas ajouter « mais pas que.. » et, outre les « trente glorieuses », les boomers ont bénéficié aussi de l’accélération des progrès médicaux et sont bien décidés à continuer de le faire. Si la vieillesse n’est pas systématiquement un naufrage, la longévité est toujours un combat.

 

 

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