Mais quand arrêterons-nous de foncer dans le torchon rouge ?
Mais quand arrêterons-nous de foncer dans le torchon rouge que nous tend le taurillon des Hauts-de-Seine ? Quand arrêterons-nous de lui servir la soupe, ainsi qu’au plus vil de ses séïdes puisqu’il est issu de nos rangs ?
Je rentre de Vendée. Près de trois heures sous des bourrasques de pluie mais à l’abri, grâce à la musique, de toutes sortes de contrariétés. Aux infos radios de ce soir, en arrivant : Benoit Hamon condamne le débat sur l’identité nationale, Ségolène demande que l’on apprenne la Marseillaise dès l’école. Rien de tout cela n’est en soi mauvais, ce qui l’est c’est notre servilité à réagir à toutes les injonctions de ce pouvoir discrédité, malfaisant, déshonorant.
Que ne lançons-nous nos propres débats ? Un au moins rallierait 100% des suffrages : « Vos élus doivent-ils être exemplaires, et d’abord le premier d’entre eux ? » Voilà ce que nous devions lancer dès le début de la farce Jean Sarkozy.
Au lieu de cela, nous enfourchons un poncif, pourtant déjà éculé, sur lequel la droite rallie l’extrème-droite, occupe le paysage médiatique, fait oublier les épisodes précédents, et divise le PS. Faire d’une pierre quatre coups, cela ne serait pas possible sans nous. Pourquoi sommes-nous si bêtes ?
Le débat où est-il aujourd’hui si nous voulons parler des valeurs ? L’exemplarité républicaine, mais oui, à condition de ne pas l’appeler ainsi sous peine de passer pour des ringards. Et avec une question subsidiaire à l’intention du félon-filou : « Un élu peut-il rejoindre un camp différent de celui qui l’a fait élire sans démissionner de la totalité de ses mandats et de ses charges ?
Autrement dit : peut-on trahir sans se démettre ?
Ou encore : Est-on engagé envers ses électeurs ?
Promis : ça ferait un tabac. Les électeurs en question n’en peuvent plus des affaires, des combines, des prébendes, des petits népotes intouchables. Si le prochain Président n’est pas un juste, notre pays est mort. Il n’en peut plus de n’avoir plus ni exemple, ni référence, ni valeurs auxquelles on puisse croire.
Premier novembre
En Vendée, sur les tombes familiales comme tant d’entre nous. Temps de Novembre, curieusement convoqué à heure pile par le calendrier. La pluie s’est mise de la partie au moment exact d’arriver dans le cimetière, ajoutant au gris du voyage.
Le culte des morts a un sens. Non pas tant de les célébrer parce qu’ils sont morts -nous les préfererions vivants- mais de demeurer en familiarité avec la mort. La crémation qui concerne aujourd’hui 30% des décès, si elle a un sens profond pour l’individu (retourner en poussière), dérobe à la collectivité la présence du mort qui n’est aujourd’hui que trop cachée, éloignée, niée. Quatre-vingt pour cent des Français meurent à l’hôpital, sans doute un autre pourcentage en maison de retraite ou en EHPAD, la continuité de la vie à la mort devient de plus en plus invisible, intangible, inconséquente.
Pas de morbidité particulière dans ma certitude que ce lien ne doit pas être rompu ni dérobé à la perception. Il est au contraire un puissant stimulant de la vie, mais une vie qui fait mieux la part des choses (au sens le plus profond de cette part des choses) et la part de l’essentiel.
Les Malgaches ont pour tradition de devoir chaque année retourner leurs morts. Physiquement retourner les cadavres. C’est une épreuve surhumaine qui a, dit-on, lourdement marqué leur civilisation. Notre célébration, faite de fleurs et d’un moment de recueillement, est moins affligeante, moins émotionnellement éprouvante et je crois qu’elle doit perdurer. Elle ne sert à rien, les morts n’en savent rien, mais nous nous oublions un tout petit peu moins à quel point, d’un jour à l’autre, d’un instant à l’autre, nous sommes mortels.