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Ode aux fruits, aux fleurs et aux légumes

Il fait beau. Ciel léger, air du même métal et, devant mon nez, un pot de tulipes rouges, poussées droites et craquantes sur leur tige ; le monde n’est pas loin d’être parfait. J’ai envie de vous parler des fruits, des légumes et des fleurs.

Non, je ne ferai aucune forte déclaration, du genre « je ne mangerai plus de cerises en hiver ». D’abord parce que vous devez en être rassasiés (pas des cerises…) et ensuite parce que je n’en ai jamais mangé. Paysanne depuis 60 générations, j’en ai gardé ce bon sens qu’on appelle « écologie » et qui me fait me réjouir d’un pot de tulipes au printemps plus que d’un plat de mets rares et exotiques.

Nous avons vécu hier, avec les habitants du quartier Saint Seurin, un moment de gaieté et de fraîcheur. A leur initiative, la Mairie a installé aux pourtours de la belle église du même nom, un mini-jardin partagé où poussent en bonne harmonie les salades de l’association Saint Bruno, les pensées du village Saint Seurin et les acanthes, les radis, les passiflores de quelques riverains amicaux et dépourvus de jardins.

Un vrai bonheur. Un planteur facétieux a installé dans sa mini-parcelle un terrain de footbal France-Italie où les joueurs sont remplacés par des bouchons colorés. Des tout-petits ont immédiatement compris l’enjeu et déplacé les bouchons pour faire pencher le score dans un sens ou dans l’autre. Ils étaient encore beaucoup trop jeunes pour être chauvins, et moi trop peu compétente pour suivre le match.

Le soleil, comme aujourd’hui, n’était pas chiche et le moindre bulbe paraissait destiné à devenir un potiron. Les initiateurs des lieux, M et Mme Perchais, tous les agriculteurs-de-petite-parcelle du quartier, étaient légitimement aux anges de voir petits et grands discuter en symbiose de la pousse des daturas ou des mérites comparés de la tomate romaine. Un jardin partagé, comme son nom l’indique, est un lieu idéal d’échange, de parole et de lien intergénérationnel. Un événement s’y passe tous les jours, d’autant plus grand qu’il est commenté, un marché noir de graines et de conseils de culture s’y met en place. Le bonheur.

Une ombre au tableau qui m’a laissée mal à l’aise. Alain Juppé est venu, avec son aéropage protecteur habituel, inaugurer le lieu qui se trouve à quelques mètres du domicile d’Hugues Martin. Celui-ci est apparu, avec son épouse Madeleine, mais s’est éclipsé dès l’arrivé d’AJ and Co. N’aurait-il pas été opportun que ce soit Hugues Martin, riverain du lieu depuis tant d’années, qui inaugure ce petit jardin ?

Très belle initiative, charmante réalisation. Ne boudons pas notre plaisir. Mon souhait est qu’ils puissent se généraliser à des quartiers plus sociaux, où le besoin en est encore plus grand.

Déloyauté

J’ai eu ce matin la faible de regarder l’émission « thé ou café » sur France 2 . Faiblesse, non pour la qualité de l’émission qui est agréable et alerte, mais pour les propos déloyaux qui y ont été tenus.

J’apparais brièvement dans cette émission. Quelques extraits d’une interview assez longue sur la personne et la pratique politique d’Alain Juppé. Il n’en est donné que de très brefs passages, choisis avec justesse, et rendant bien compte du ton souriant avec lequel je me suis exprimée, en accord avec le ton de l’émission elle-même. Stéphane Pusatéri apparait de la même manière, avec des propos qui ne sont pas davantage aggressifs.

On demande à Alain Juppé ce qu’il répond à nos remarques. De Stéphane Pusatéri, il décrête qu’il n’est qu’un « trublion », décrié par son entourage, mais consent à dire quelques mots de réaction. A mon sujet, il n’a qu’une phrase :

– « Quant à Mme Delaunay, allez-voir sur son site ce qu’elle dit d’Isabelle ! »

Ton catégorique, jugement péremptoire laissant entendre qu’il n’y a rien à répondre à quelqu’un qui profère des invectives, voire des insanités, à l’encontre d’ « Isabelle ».

J’en suis restée pétrifiée, ne me souvenant pas le moins du monde d’avoir jamais parlé d’Isabelle Juppé en près de trois ans de blog et de billets quotidiens. Elle appartient (ou plutôt devrait appartenir) à la sphère privée d’Alain Juppé. La « pipolisation » n’étant pas mon fort, je n’ai rien à en dire.

Heureusement, la rubrique « recherche » de ce blog m’a aidée. J’ai en effet parlé une fois d’Isabelle Juppé, dans un billet (2 mars 2008) sur la place des femmes en politique et l’interrogation que constitue pour moi l’utilisation médiatique des épouses. I J ne constituait-là qu’un exemple qui n’avait rien de personnel. Elle venait de publier un livre (ce qui est par définition un acte public) et j’ai évoqué à son propos, en une ligne, la magistrale prescription de François Mauriac : « Ne jamais rien écrire d’insignifiant ». Ceux qui ont lu cet important ouvrage jugeront.

Rien à voir donc avec l’insinuation calomnieuse de la petite phrase sifflante d’Alain Juppé. C’est décidément un standard de la pratique politique de l’UMP d’affirmer avec hauteur, d’avancer chiffres ou propos sans aucun rapport avec la réalité.

Brice, sinon de Nice, pas d’où il faudrait

Ce matin, à la radio, Brice Hortefeux, commentant, mi-hautain, mi-goguenard, les manifestations du 19 mars :

« Je ne connais aucun autre pays qui manifeste contre la crise… »

Mais non, M. Hortefeux, ce n’est pas contre la crise, mais contre le gouvernement, votre gouvernement que nous manifestons.

Difficile début dans un ministère difficile dont, semble-t-il, il ne connait rien.

Welcome !

Le 13 septembre 2007, je recevais du Préfet de la région Aquitaine, une mise en garde « sur quelques pratiques et errements qui ont pu concerner des étrangers en situation irrégulière ». Il attirait mon attention sur les peines qui peuvent s’appliquer à « toute personne qui aura, par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée, la circulation ou le séjour irrégulier, d’un étranger en France » par application de l’article 622.1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

J’étais à l’époque (et au demeurant, toujours) coupable d’accompagner des étrangers me paraissant le mériter dans leurs démarches pour obtenir un permis de séjour, et je me proposais de pratiquer le parrainage républicain de l’un d’eux.

Il s’agissait d’un jeune Kurde, prénommé Bilal. Ceux qui ont vu le film « Welcome » sauront pourquoi je précise l’origine et le prénom de mon jeune homme..

L’histoire de Bilal, ce Bilal bordelais, est toujours en cours : il travaille et reçoit des renouvellement de permis de séjour tous les six mois que nous espérons parvenir à faire pérenniser, car c’est pour lui une épreuve bi-annuelle d’attendre le papier qui l’autorisera à continuer de travailler et de se faire soigner dans notre pays.

Comme beaucoup d’entre nous, j’ai été très choquée de découvrir qu’une loi de notre République pouvait instaurer un « délit d’humanité » et le groupe socialiste s’est mis au travail pour rédiger une proposition de loi modifiant cet article 622.1

Le film Welcome est sorti à point nommé : il rend sensible « les errements et les pratiques qui concernent les étrangers en situation irrégulière ». Je reprends les mots du Préfet, mais bien sûr non pas à l’adresse de ceux qui les aident mais de ceux qui condamnent ces « aidants ».

Nous avons visionné hier à l’Assemblée « Welcome » en présence du metteur en scène Frederic Lioret et présenté notre proposition de loi. Elle est écrite avec un parfait sens de la mesure et de la responsabilité de manière à ne pouvoir, en aucun cas, faciliter ou absoudre le vilain travail des passeurs ni de tous ceux qui font commerce de la détresse des migrants.

Espérons qu’à l’inverse de la plupart de nos propositions, elle viendra en discussion complète à l’Assemblée et pourra être signée par des députés de toutes sensibilités. Sur ce sujet, le consensus honorerait les députés de droite.

Des fissures dans le bouclier

Le bouclier fiscal, mesure phare du sarkozysme triomphant, se fissure, ce qui n’est pas de très bonne augure pour un bouclier.

Vendredi dernier, en commission, le Président PS Didier Migaud a proposé de le « redéfinir » afin que le calcul du plafond de 50% prenne en compte l’ensemble des revenus, sans exonérer la part qui, soumise à déducations d’impôts diverses, lui échappe encore. C’était lui porter un premier coup, et aurait constituté une victoire très forte pour notre groupe, difficile à retoquer complètement dans l’hémicycle.

Hélàs, comme à l’habitude, branle-bas de combat à l’UMP, députés appelés en hâte par SMS en salle de commissions et le vote de cette « redéfinition » a été négatif à quelques voix.

Quelques uns des députés et sénateurs les moins obtus de la majorité ont pourtant bien pris conscience du cynisme d’une telle mesure en temps de crise : on demande des efforts supplémentaires aux Français, mais seuls les plus fortunés échappent à ces efforts du fait du bouclier. Pierre Méhaignerie, Gérard Larcher et une poignée d’autres ont demandé une « suspension » du bouclier.

Niet de l’imperatoir élyséen que nous a répercuté hier le Ministre Eric Woerth lors des questions d’actualité au gouvernement. A notre nouvelle interrogation « allez-vous supprimer le bouclier fiscal », le Ministre a répondu sans embages : « Non (nous l’attendions), parce que c’est une mesure de justice fiscale « . Là, nous n’avons pu échapper à un mouvement de surprise.

Explication de cette justice, conception Eric Woerth « c’est justice que dans notre pays personne ne puisse travailler plus d’un jour sur deux pour l’Etat ».

Tollé sur nos bancs : Eric Woerth sait bien que les contribuables sous bouclier ne se lèvent pas chaque matin pour embaucher. Ils gèrent leurs patrimoines, leurs actions… Et d’ailleurs, Johny, non plus qu’aucun de ses semblables, s’est-il réinstallé en France ?

En effet, comment considérer comme « juste » une mesure
– qui met à l’abri de tout effort supplémentaire quand l’ensemble des Français y est au contraire appelé (par exemple pour le financement du RSA)
– qui touche pour l’immense majorité des cas des gros revenus avec des patrimoines plus gros encore.
– qui « rapporte » d’autant plus qu’on dépasse le plafond : les chèques de remboursement sont proportionnels à ce dépassement

Ce sont en France 23 176 personnes qui se sont partagés 221 849 413 euros. Le chiffre moyen de 16 613 euros par tête n’a pas de sens : la poignée de petits contribuables qui en bénéficie cache le fait que pour les plus riches l’enveloppe est beaucoup supérieure.

En Aquitaine, ils sont 499 à avoir empoché 5 212 048 euros.

Alain Juppé, lit-on à chaque page de tous les journaux d’Europe et de Navarre, cherche à se démarquer de Nicolas Sarkozy. Que ne rejoint-il Larcher et Méhaignerie ? Voilà une mesure parfaitement équitable, profitable au budget de l’Etat et surtout plus concrête que de gloser sur le sens de la rupture.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel