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Le médecin au coeur du contrat social

De tout temps, le médecin a été au coeur de l’humain, et cela reste fondamentalement vrai.

Il endosse aujourd’hui une responsabilité nouvelle. La fracture de santé qui s’élargit chaque jour davantage dans notre pays, les inégalités territoriales, l’enchérissement des médicaments et des techniques le placent aujourd’hui au coeur du contrat social.

Nous sommes aujourd’hui entrain de retrouver une situation que la deuxième partie du XXème siècle avait beaucoup atténuée et que l’on pouvait espérer voir disparaître : celle où la santé devient un marqueur social.

Il y a un siècle et au delà, les maladies de la malnutrition, la tuberculose, l’alcoolisme étaient -pour une part plus ou moins grande- des marqueurs de pauvreté. Aujourd’hui ces marqueurs ont changé mais ils gagnent continuellement en importance et en signification. L’obésité, le diabète « gras », le mauvais état bucco-dentaire des enfants (calculé sur le nombre de caries obturées) sont à leur tour des marqueurs sociaux, dont la prévalence est strictement en proportion inverse des revenus et du capital social. L’information, le suivi, l’accès au soin, en grande partie aux mains des médecins, les situent au coeur de cette problématique sociale et sanitaire. Nous ne sommes pas très loin du moment où les médecins devront être autant des militants -ou des missionnaires, selon le vocabulaire que l’on préfère- pour lutter contre cette fracture de santé.

Les inégalités territoriales de santé constituent un autre exemple. Des territoires entiers sont privés de spécialistes (le département de la Lozère par exemple n’a aucun urologue, alors que cette spécialité gagne chaque jour en importance du fait du vieillissement de la population), et demain -demain matin, en réalité- ces territoires seront privés de généralistes. Les « médecins de campagne » et beaucoup de médecins de quartiers, âgés, ne trouvent plus de successeur. Une de mes consoeurs de l’ordre national des médecins résume la situation ainsi : « demain, le médecin généraliste sera une médecin remplaçante », résumant en une seule formule deux faits : la médecine se féminise grandement, les médecins s’installent de plus en plus tard et, pendant une longue période, « font des remplacements ».

Une troisième responsabilité, pas la moindre, tombe aujourd’hui aussi sur les épaules du médecin : le coût de la santé. Ou plus justement, le coût de la maladie, qu’il s’agisse des traitements ou des techniques. J’en donne souvent un exemple : quand j’ai commencé mes études, on détectait les métastases par un cliché pulmonaire (40 euros), au cours de ma spécialisation on s’est mis à pratiquer des scanners (400 euros), et aujourd’hui des Pet-scans (8000 euros).

L’exemple mériterait d’être expliqué et nuancé mais la proportion est juste : le coût des médicaments et des explorations innovantes correspond à une multiplication par 20 en quarante ans.

Le médecin doit aujourd’hui peser ses prescriptions à l’aune très précise de leur utilité. C’est une responsabilité considérable et pas toujours facile à comprendre. A l’hôpital, je devais expliquer pourquoi je ne signerais pas le bon de transport d’un patient valide : parce que le coût du remboursement obérait la prise en charge d’une chimiothérapie innovante ou d’un dispositif médical indispensable.

Les exemples pourraient être multipliés de cette « Responsabilité Sociale des Médecins ». J’utilise des majuscules pour la mettre en parallèle de la « RSE » (Responsabilité Sociale des Entreprises).

Ce parallèle n’est pas une identité : la médecine n’est pas une entreprise, et la responsabilité n’en est que plus grande.

Qui n’a rien à cacher n’a rien à craindre

Avec cette phrase, que l’on a entendue encore récemment à l’occasion de la rébellion contre Edvige, on peut justifier tous les excès de la politique sécuritaire : écoutes téléphoniques, visites de comptes bancaires (Besancenot récemment), vidéo surveillance, punaises enregistreuses au mur des appartements, fouille de la mémoire des ordinateurs … Nous ne sommes en la matière, certainement ni au bout de nos peines, ni au bout de nos surprises.

Le dernier né de la famille sécuritaire, sous un petit air médical qui glace, est un bel exemple d’imagination perverse . Il s’agit du « scanner qui déshabille », déjà en fonction dans certains aéroports européens. Au passage dans un portique, le voyageur est exposé complètement nu à l’examen du personnel de la sécurité aérienne.

Un de mes amis m’avait vendu comme précepte pour ne ressentir aucune crainte devant un notable quelconque « Imagine-le nu ». Je n’ai jamais eu vraiment besoin de la mettre en pratique, mais la leçon n’est pas sans signification : déshabiller, mettre à nu, est un moyen de priver l’homme de sa dignité et de son intimité. Les prisonniers en savent quelque chose.

Il ne suffira donc bientôt plus, pour prendre un avion, d’enlever ses chaussures, d’ouvrir sa valise, de sortir son ordinateur de son enveloppe et le petit sachet contenant ses objets de toilette, ni de se prêter bras écartés à une fouille corporelle. Sans parler d’abandonner le modeste ciseau à ongles qui ne pourrait attenter qu’à à la vie d’une mouche (alors qu’un tesson de la bouteille de vin servie en première classe est beaucoup plus dangereuse). Toutes ces petites contraintes sont déjà des petites humiliations et pour peu que l’employé soit désagréable, elles rendent le voyage détestable.

Pourquoi s’arrêter d’ailleurs aéroports dans ce progrès continu du délire sécuritaire ? Un terroriste serait-il moins efficace dans un train ? Un wagon qui explose fait dérailler le train entier et en choisissant bien ses horaires, on peut aisément s’assurer plusieurs centaines de morts.

Pourquoi pas non plus à l’entrée des hôpitaux ? Le tripode de Bordeaux, avec ses quatorze étages, est de ce point de vue un objectif de choix. Les médecins pourraient au passage bénéficier des images du scanner qui déshabille qui leur épargnerait la charge d’examiner leurs malades un à un, dans l’intimité de leur chambre.

Revenons au fond du problème : l’Etat sécuritaire fait de ses citoyens des suspects et les traite comme des prisonniers que l’on va encelluler. La commission européenne vient d’autoriserla généralisation du « qui déshabille ». Autorisé, pas imposé, mais on peut quand même se poser quelques questions et d’abord celle-ci : les membres de la commission n’ont-ils pas par hasard confondu « Europe sans frontières » et « Europe sans limites » ?

Un homme = 823 vaches

Mais pas n’importe quel homme ! Je prescris, comme un véritable anti-dépresseur, le commentaire 9, fait par Alain au billet précédent. Manière de bien entrer dans la journée tout en posant de bonnes questions.

Les voyages autour de la terre du Président de la République polluent à l’égal d’un troupeau d’honnêtes vaches laitières pendant une année. Encore Alain, dans sa comptabilité ne prend il pas en compte nombre de comportements collatéraux aussi absurdes que méprisants des réalités.

Lors de sa dernière venue à Bordeaux, Nicolas Sarkozy a bien sûr emprunté, presque tout seul hors service de sécurité, son avion personnel … de 90 places. Pendant ce temps, sa voiture blindée arrivait de Paris sur une remorque de manière à lui faire parcourir en toute sécurité le trajet Mérignac-place de la Bourse et retour. Quand Sarkozy a repris l’avion, trois heures plus tard dans son avion jumbo, la voiture est remontée sur sa remorque …

Avion jumbo, mais pas tout à fait assez ! J’ai dénoncé dans ce blog le coût insensé du renouvellement de la flotte présidentielle, c’est à dire des 6 avions gouvernementaux. Quand Nicolas Sarkozy est aller voir George Bush, il a été bluffé par son « air force one » et n’a eu de cesse d’en vouloir un aussi beau, aussi grand, aussi fort ! Coût total du caprice : 350 millions d’euros. Dans le budget de la défense, taillé comme on sait à la serpe, le renouvellement de la flotte était un des seuls chapitres sanctuarisés. Les militaires ont avalé avec grand peine l’énorme pilule. Qui en parle ?

La hausse du bilan carbone présidentiel sera à la mesure de la dépense. Ce n’est qu’un exemple de l’incroyable faul-culisme du discours écologique et de la distance entre la pratique et la recommandation, celle-ci toujours à destination des autres.

On s’empoigne ces jours-ci à l’Assemblée sur la taxation des sacs bio-dégradables. Dans le même temps, nos municipalités exigent que trois pelletées de feuilles mortes soient hermétiquement ensachées de plastique pour que « les déchets verts » puissent être acceptés par les services compétents, alors que les trois pelletées pourraient être si bénéfiquement compostées dans une déchetterie ad-hoc. « Leclerc » ne donne plus aux caisses de sacs plastiques, mais vend bien volontiers par rouleaux entiers des sacs poubelles.

Votre lierre déborde sur l’espace public, réjouissant toute la rue du volute de ses branches, tout en stockant un peu du CO2 sarkozien ? Tel l’agneau de La Fontaine, coupable d’avoir tondu un pré de toute la largeur de sa langue, il devra être abattu. Dans le même temps et pour l’affichage, on édifiera de toutes pièces, des murs végétaux entièrement artificiels pour plusieurs dizaines de milliers d’euros.

De quoi vous décourager de risquer six mois d’hospitalisation en service d’orthopédie pour avoir décidé de vous rendre à votre travail en vélo, dans le centre de Bordeaux.

Très bonne nouvelle : « contact » est de nouveau opérationnel.

Vous pouvez de nouveau m’envoyer un message par la rubrique contact de ce blog, sur la colonne droite.

Curieusement cette possibilité ne fonctionnait plus depuis quelques mois, et grâce à l’aide hautement experte de notre ami Matthieu Rouveyre, elle est de nouveau active. Pardon à tous ceux qui ont tenté de me joindre par cette voie pendant la période de panne.

Il n’en est rien encore pour la touche « news letter » : si vous souhaitez la recevoir il faut donc passer par la rubrique contact.

Projet « Hôpital, Patient, Santé, Territoires » : où est la prévention ?

Le projet de loi “HPST”, présenté par Roselyne Bachelot comme une réforme majeure de notre système de santé, ignore presque totalement la finalité même de ce système de santé : la santé de la population, qui est pour la majorité de ses déterminants, très en amont de la maladie et du soin.

Les deux piliers de la santé publique, prévention et dépistage, n’ont qu’une maigre part au projet de loi.

Décevant, fondamentalement, mais aussi au regard de la volonté de Nicolas Sarkozy de « passer d’une attitude purement curative à une culture de la prévention », affirmée dans son discours du 18 septembre 2008 sur la santé publique.

La prévention doit être au coeur, et non pas en marge, de notre système de santé, dans un temps où le développement épidémique des maladies sociétales et comportementales est en train de bouleverser la pratique médicale et, ce qui n’est pas négligeable en ces temps de rigueur, d’obérer les budgets publics.

Or, que trouvons-nous au chapitre de la prévention dans le plan de Roselyne Bachelot, distillé avec gourmandise sur tous les médias : la limitation de la vente d’alcool aux mineurs et l’interdiction des « cigarettes-bonbons », aromatisées et sucrées pour attirer et piéger les plus jeunes. Cela ne constitue pas un plan de santé publique.

– Aucune mesure sur la prévention de l’obésité et du diabète de type II alors même que Nicolas Sarkozy déclarait que « la politique de prevention doit être le fer de lance du combat contre l’obésité”. Il semble que, pour le gouvernement, la mise en place de la mission d’information sur l’obésité, présidée par Valérie Boyer, tienne lieu de politique. Le rapport de cette mission n’apporte au demeurant aucune proposition nouvelle.

– Aucune mesure sur la prévention des cancers évitables, des troubles du comportement, des addictions, de la perte de contrôle et des troubles de sommeil des enfants …

En matière de dépistage, aucune mesure concernant le dépistage précoce des maladies mentales, des maladies génétiques et métaboliques.. Mais c’est surtout en matière de dépistage des cancers et singulièrement du cancer du sein que l’on aurait attendu que cette loi organise, de manière audacieuse, la généralisation de ce dépistage.

J’aborderai en temps utile les autres chapitres de ce projet de loi. Je me suis portée candidate pour être rapporteur pour le groupe SRC de l’énorme volet « Hôpital » de ce texte : dans ce domaine, la réforme est nécessaire, mais elle ne se conçoit qu’avec les moyens de la mener à bien.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel