Nicolas Sarkozy : la « révolution managériale » de l’hôpital
Nicolas Sarkozy était aujourd’hui en visite au CHU de Bordeaux, sur le site de Pellegrin. Députée de la circonscription, j’ai donc eu l’honneur de l’y accueillir et de l’accompagner tout au long de sa visite.
Toujours formelle et de bon genre, je l’ai accueillie par ces mots « je suis heureuse de vous accueillir sur un site hospitalier, à la fois en qualité de députée et de médecin hospitalo universitaire ».
Sa réponse m’a laissée stupéfaite : – l’hôpital est malade, je viens pour le soigner !
Il arrivait dans un hôpital qui est un des fleurons de la médecine française, qui marche bien, la remarque était quelque peu surprenante. La tenue de son discours de fin de visite nous a éclairé sur la nature des soins qu’il entend prodiguer.
Ce n’est en effet pas une réforme qu’entend mener Nicolas Sarkozy, mais une « révolution managériale ». Chacun des mots qu’il a utilisé, chaque axe des actions qu’il entend mener, appartiennent au domaine de l’entreprise et j’en donne ici les grandes lignes :
– autogestion, comme pour les Universités et budget alloué en fonction de l’activité
– le directeur de l’hôpital devient un véritable « patron », n’ayant plus de comptes à rendre en particulier à ce qui constitue actuellement « la commission médicale d’établissement », c’est à dire les représentants des médecins.
– intéressement du personnel à tous les niveaux (des médecins aux ouvriers des services techniques)
– introduction de la logique « travailler plus pour gagner plus » et gestion des heures supplémentaires selon les principes de la loi qui vient d’être votée (au sein du paquet fiscal)
– assouplissement de la part d’activité privée au sein du public et contrats de gré à gré avec les médecins
– compte épargne temps (qui mesure le temps de dépassement en heures des médecins relativement aux 35 heures que les hôpitaux sont tous incapables de financer) en points pour la retraite complémentaire
A cette dernière disposition près, qui relève de la maigreur budgétaire, toutes les autres propositions sont de pure logique managériale. Nous ne sommes plus dans un hôpital mais dans une entreprise du Cac40, ce qui va bousculer grandement l’esprit même de nos hôpitaux.
Le discours de Nicolas Sarkozy pose la question hospitalière en sens inverse qu’elle devrait. Les études des médecins et des soignants relèvent d’un financement public, la totalité des actes et des soins médicaux est financée par l’assurance sociale. A ce double titre, il n’y a pas de médecine « privée » ou « libérale », toute la médecine est en réalité publique. Chaque secteur doit donc assurer sa part de missions de service public et c’est à la médecine libérale de prendre sa part en terme d’accès, de qualité et de permancence des soins.
Au contraire, dans la présentation qui a été faite à Bordeaux ce matin, c’est tout l’hôpital public qui est soumis à une logique libérale dans une logique de rentabilité, d’intéressement, et non de qualité des pratiques et de valorisation des métiers.