A quoi sert la prison ?
« A rien », a malheureusement confirmé Nicolas Sarkozy par sa déclaration-rodomontade d’hier. Bien sûr, il ne s’est pas directement exprimé ainsi, mais c’est ce que signifie son bla-bla de conquistador de banlieue.
J’ai évoqué à plusieurs reprises le sujet dans le blog. La prison a trois missions : protéger la société, dissuader, préparer au retour dans la société.
Seul le premier de ces objectifs est assurément rempli : peu d’évasions, la prison est un coffre-fort solide.
Le deuxième est largement sujet à débat, le troisième est un échec absolu. Je rappelle au passage ce chiffre terrible : 8,4% du budget de la pénitentiaire est consacré à la réinsertion sous tous ses aspects.
Hier, nous avons entendu Nicolas Sarkozy, annoncer comme s’il venait de trouver l’oeuf de Colomb, qu’à l’issue de leur peine, les délinquants sexuels seraient « évalués » , puis soignés ; et que s’ils ne voulaient pas être soignés, on les maintiendrait dans des lieux d’enfermement. Au passage, remarquons que la sanction établie par les juges sera tenue pour du beurre.
Qu’est-ce que cela veut dire : que pendant la durée de leur incarcération, rien n’aura été fait. Ils arriveront à la date de sortie dans l’état où ils étaient à la date d’entrée, et en général dans un état pire.
D’une vision purement Sarkozienne, quand on connait le coût par journée d’un détenu, voilà qui n’est guère productif ! Mais que fait donc Mme Lagarde au lieu de ne s’occuper que des traders et des banquiers ?
La démonstration par l’exemple de cette « inutilité-inefficacité », vient d’être donnée par le cas de Francis Evrard : il venait de passer, en plusieurs séjours, 27 ans en prison.
Les cheveux se dressent sur la tête devant l’autisme de Sarkozy et de Rachida Dati : le simple bon sens amène à la conclusion qu’il faut que le temps de prison soit mis à profit pour un accompagnement social et psychologique, voire des traitements médicaux, et qu’il est indispensable par ailleurs d’accompagner la sortie d’un suivi étroit (Francis Evrard avait son premier rendez-vous avec le juge d’application des peines fin août..)
Je posais à l’occasion de la loi sur la récidive, votée en juillet, la question de la nature des traitements. Seuls ont été abordés les traitements psychiatriques dans le volet « injonction de soin » de cette loi. Le viol du petit Eunice repose la question des traitements anti-hormonaux (énanthone et androcure) ; bien sûr, administrés si le malade le veut. Les effets de ces traitements sont un amoindrissement des pulsions sexuelles pendant le temps du traitement, c’est à dire non définitif. En aucun cas, il ne s’agit de la castration chimique qui est, heureusement illégale, en dehors de la demande expresse d’un malade informé.
Tout cela demande une réflexion approfondie, et non pas comme cela vient d’être fait, le vote d’une loi hâtive et l’annonce, hier, de mesures à destination d’ un public non informé dont on espère qu’il ne réfléchit pas. Ne nous lassons pas quant à nous d’expliquer et d’expliquer encore.
(Je conseille la lecture à ce sujet du commentaire de BB à la suite du billet précédent.)