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Accoyer

Bernard Accoyer ce matin à France-inter. Le nom ne vous est sans doute pas encore familier : il n’a pas de véritable raison de le devenir.

Bernard Accoyer est le Président de l’Assemblée. Petit homme imbu de sa personne, regardant autour de lui si on le regarde, et surtout très absent. Je n’ai pas assisté à la totalité des séances mais il n’en a jusqu’alors présidé que deux : l’ouverture de la législature, et la présentation des deux ministres Christine Lagarde et Rachida Dati. Il a la troisième fonction de l’Etat, sans doute la plus belle résidence (l’hôtel de Lassay), un salaire sans doute décent, une plus grande assiduité ne serait pas fâcheuse.

Il parle ce matin d’un ton patelin et douceâtre que je déteste particulièrement. Et vante l’ « ouverture », la choix de Nicolas Sarkozy de confier de hautes responsabilités à des « talents » issus des rangs de l’opposition.

Quelle ouverture en réalité ? Confier à des hommes de gauche le soin de faire, mot à mot, une politique de droite, est-ce cela l’ouverture ? Faire diversion quand on fait passer des lois socialement injustes ? Nicolas Sarkozy ne s’est d’ailleurs pas caché de ses intentions : ne pas laisser à l’opposition la chance de gagner du terrain, spécialement dans la perspective des municipales. « Vous m’en remercierez demain », a-t-il dit hier aux cadres de l’UMP.

Une fois encore, ne nous laissons pas abuser. Les leçons d’instruction civique d’autrefois devraient être aujourd’hui d’abord des leçons d’esprit critique vis à vis des media et de la politique de com’ qui remplace aujourd’hui la politique.

Bruits minuscules

Le blog, mon gros tas de lecture, rendent le voyage en train presque trop court. C’est un moment de halte, à l’abri, et osons le mot, un moment heureux. Le ciel commence doucement à s’assombrir. De vagues conversations me parviennent à travers le couloir. On n’est jamais assez attentif aux petites, toutes petites choses de la vie.

Un écrivain raconte dans un livre (je ne me souviens du nom ni de l’un, ni de l’autre) une histoire assez touchante. Il est séparé de sa femme et réécoute les cassettes où il a dicté une partie de ses livres, du temps où ils vivaient ensemble. En fond sonore, le bruit des pas de sa femme, quelquefois une porte que l’on ferme ou l’éclat d’un objet que l’on heurte.

L’écrivain se souvient qu’alors, le moindre bruit l’énervait et qu’il en voulait à sa femme même de bouger. Réécoutant les cassettes, ce sont ces bruits minuscules qu’il cherche à discerner, et non sa voix ni les histoires qu’il racontait. Les petits bruits d’une vie enfuie.

Petit plaisir

Le contrôleur se penche vers moi et me dit tout le plaisir qu’ « un certain soir » lui a fait mon élection. -« Nous étions heureux, vous pouvez pas savoir ! »

Oui, c’est vrai ça me fait plaisir. Je lui réponds que je vais essayer de confirmer dans les mois et les années à venir. Cela me ramène à la question posée dans le billet précédent : « que faire ? » pour que cette élection ait un impact sur la vie de ceux auxquels elle a fait plaisir ?

Un mois déjà..

Un mois déjà que les Bordelais m’ont élue pour les représenter et me voilà, une fois encore, dans le train de retour de l’Assemblée, chargée comme un âne de la masse de courrier, publications, documents divers que nous recevons quotidiennement. Il faudrait plusieurs vies pour tout lire. J’ai élagué avant le départ : à la poubelle la revue des pêcheurs de rivière, la documentation de la filière du bois… Tout cela est certainement très intéressant, mais la deuxième circonscription de Bordeaux n’est rurale et boisée qu’à la marge, je fais l’impasse. Les grosses poubelles débordantes qui s’entassent dans nos couloirs ne sont pas très dans le coup du développement durable. Que faire ?

Un mois déjà et j’ai l’impression d’avoir beaucoup appris du fonctionnement de l’Assemblée, des us et coutumes de mes collègues, du bâtiment lui-même qui est fort complexe car construit autour de plusieurs cours, ce qui amène à faire de nombreux tours avant de se retrouver d’où l’on est parti. C’est incontestablement un métier fort intéressant que celui de député à condition de bien le faire, de bosser les textes, de comprendre le sens de la loi, d’essayer de glisser son grain de sel.

L’austérité est bien sûr d’appartenir à la minorité. Sarkozy parle beaucoup d’ouverture mais il ne pratique pas la seule qui vaudrait : accepter, au moins de temps en temps, les amendements de l’opposition. J’ai été tout à fait frappée de la qualité de ce que nous avons proposé dans tous les domaines abordés dans ces quelques semaines. Beaucoup de propositions auraient constitué objectivement des améliorations de la loi. Toutes ont été rejetées sans autre forme de procès.

Là aussi, quoi faire ? Où faut-il agir ? Comment, en ce moment, mobiliser l’opinion publique sur les peines planchers, l’ « excuse de minorité » ou l’injonction de soins aux délinquants ?Tout cela est austère, très austère, aucun fait divers (heureusement) ne l’illustre en ce moment et ne le porte à l’attention des media. Je m’attache à croire à la force d’essaimage d’internet et j’espère que ce blog y contribue tant soit peu.

Rachida Dati et la loi de lutte contre la récidive

Rachida Dati vient de présenter en séance plénière la loi « renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs ». D’une voix timide et monocorde, lisant son texte avec application, très en deça de l’image de « dame de fer » que l’on donne d’elle. Elle a exprimé son émotion de s’exprimer à la tribune de l’assemblée et l’on conçoit bien ce qu’elle pouvait ressentir en connaissance de son parcours.

Cette loi comporte trois volets : l’établissement de peines planchers en cas de récidive, l’atténuation des dispositions en faveur des mineurs pour les jeunes de plus de 16 ans et l’injonction de soin après infraction sexuelle.

Les deux premiers volets de la loi ont des connexions : entre 2002 et 2005, l’augmentation du taux de récidive sanctionnée a dépassé 70 % ; 30% des mineurs condamnés récidivent dans les cinq ans ; 46 % des vols sont perpétrés par des jeunes de moins de 18 ans.

L’instauration d’une peine plancher limite, sinon supprime, le principe constitutionnel de l’individualité de la peine. Le recours en inconstitutionnalité posé par la gauche a été écarté sous prétexte que la peine plancher est différente selon qu’il s’agit d’une première récidive, ou d’une deuxième ou troisième ; également, parce qu’il existe des dispositions également graduelles pour que le juge puisse à titre exceptionnel prononcer une peine moindre. Pour une primo-récidive, ces exceptions sont les suivantes : des circonstances particulières, la personnalité du prévenu, des garanties d’insertion. Pour une récidive de rang plus élevé, l’adoucissement de la peine plancher devient extrèmement difficile et réduite à des « garanties exceptionnelles d’insertion ».

Le vocabulaire juridique est un peu sec et l’explication de ces dispositions l’est aussi, mais n’enlève pas le grand intérêt qu’il y a à comprendre exactement de quoi il s’agit.

Deux faits indiscutables plaident contre les deux premiers volet de la loi. Toutes les études, dans les pays où des dispositions semblables ont été prises, montrent leur inefficacité. Aux Etats-Unis par exemple, le « tarif » des peines réservées aux mineurs a été élevé : leur taux d’incarcération est le plus élevé du monde.

Le pire est pourtant cette constatation : le plus grand générateur de récidive est la prison elle-même, et ce n’est ni en élevant le nombre de personnes, et a fortiori de jeunes, incarcérés, ni en augmentant la durée de leur incarcération que l’on limitera le risque de récidive. Dans l’état actuel, la prison est pratiquement inefficace en terme de réinsertion et de réadaption dans l’activité.

Alors que la prison a trois objectifs : mettre la société à l’abri des délinquants, dissuader, préparer la réinsertion, ce ne sont que 8,4% du budget de l’administration pénitentiaire qui sont consacrés au troisième et au plus important de ces rôles. Ceci alors que 40% des prisonniers ont moins de trente ans et qu’ils auront en sortant une vie à faire .

La droite a une fois encore stigmatisé l « angélisme » de la gauche. C’est faux. La sanction est légitime, mais il lui faut une double utilité : pour l’individu et pour la société. Quand une sanction -dans le cas l’emprisonnement- se révèle comme une école de la récidive, ni l’individu, ni la société, n’y trouvent leur compte.

La loi de Rachida Dati, proposée dans l’urgence, aurait du suivre et non précéder deux faits : la mise en place et l’extension de peines différentes de l’emprisonnement, le désengorgement des prisons.

La précipitation, la volonté affichée d’effets d’annonce font qu’aujourd’hui nous allons donner une mauvaise réponse à une vraie grave question.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel