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Le double objet

Le tabac est le pire fléau sanitaire de l’histoire. A la fin de ce siècle, un milliard d’humains auront payé de leur vie notre tolérance à sa consommation et à sa vente. Ceci malgré les chiffres qui s’alourdissent, et les preuves scientifiques irréfutables de sa responsabilité.

L’ « Alliance contre le tabac » a lancé « l’appel des 100 000 », première « mobilisation générale » de l’ensemble des acteurs de santé pour un objectif de santé publique, lequel comporte un engagement à ne jamais laisser personne (patient, client, collègue..) sans évoquer avec lui la question du tabac et l’accompagner en direction du sevrage. Arrêter de fumer est très difficile, ce produit étant plus addictif que l’héroïne, les candidats à cet arrêt doivent être soutenus (c’est en particulier l’objectif de l’opération « moi(s) sans tabac » actuellement en cours).

Le premier objet de l’appel est donc cet engagement, qui n’est pas totalement superflu… Une étude a montré que la question du tabac n’est évoqué lors des consultations que dans 17% des cas, dont pour 11% à la demande du patient lui-même.

Le second motif est d’imposer la question de la santé et particulièrement celle du tabac au sein du débat présidentiel. A chaque orée de quinquennat, l’Alliance et les associations qui la composent interrogent chacun des candidats sur ses engagements pour lutter contre le tabagisme et publie les réponses qu’elle reçoit (ou pas) dans la grande presse. L’objet est donc de peser sur les prises de position des candidats sur le plan national et européen. Il est bien évident que si l’interrogation est portée au nom de plusieurs milliers de signatures, elle aura un impact de beaucoup supérieur à la fois sur la politique à venir et sur l’opinion.

Merci à tous de votre concours à cette mobilisation dépourvue de tout caractère partisan et soutenue par des personnalités de toutes sensibilités politiques, des associations et des institutions dont l’indépendance ne peut être mise en doute.

 

 

 

 

 

La méritocratie républicaine a-t-elle vécu ?

Crainte devant l’épidémie de dénigrement de l’ « élite » et du « système » qui gagne les candidats aux primaires de la droite de voir l’idéal républicain d’émancipation, d’éducation et de liberté brûlé en place publique. Que restera-t-il après lui ?

« Le peuple a toujours raison » est démenti par l’histoire. Pas toujours, pas totalement, mais « le peuple » s’est quelquefois lourdement et dramatiquement trompé. Je ne veux pas citer d’exemples, pourtant l’histoire contemporaine en est riche (ou plutôt : pauvre, pauvre de manière effrayante et terrible, et ceci dans des pays très différents).

Alors quoi ? Le peuple n’a pas non plus tort. Ni aujourd’hui, ni hier. Sa voix, toute aberrante qu’elle puisse paraître  dans une occasion ou autre (comme nous parait aujourd’hui l’élection de Donald Trump), a des raisons de s’interroger. Aujourd’hui, c’est la connivence d’une partie de l’élite avec ses comparses de domaines très différents qui légitimement, choque.  Economie et finance, médias, politique, doivent être, non pas radicalement séparés (nul ne peut gouverner ni légiférer sans une connaissance des domaines des uns et des autres) mais tenus à distance par un « mur de transparence » les différenciant clairement. Je le dis fortement : ce quinquennat a fait beaucoup en ce sens. Continuons et ne prenons jamais le risque de jeter des millions de bébés dans l’eau boueuse d’un bain sâle.

La méritocratie républicaine, significative d’effort, d’apprentissage culturel et professionnel, doit rester un idéal et un idéal atteignable par tous (ce qui n’est que trop peu le cas). Ne le noyons pas dans cet espèce de vachi-vacha populo-compassionnnel que l’on devrait abhorrer. « Je pense donc je suis » ne doit pas devenir « je suis (du verbe suivre) donc je n’ai pas besoin de penser ».

 

 

 

 

Leonard Cohen

Quelques mots, quelques lignes pour fixer la date où l’on découvre que la voix qu’on entendra toujours, que l’on a toujours entendue, ne parlera plus jamais, qu’elle viendra désormais d’ailleurs comme une blessure que l’on rouvre.

So long, Leonard.. Depuis tant d’années, compagnon de vie, fréquent ou occasionnel, dans des lieux ou des moments si différents mais toujours avec une sorte de communication directe, instantanée, au premier mot, au premier son. Cette masculinité blessée, cette voix si profondément sonore qui aurait pu donner des ordres, rendre bouleversant un discours politique, et qui avait choisi un tout autre registre : celui d’un mot, d’un son, de faire croire à qui l’écoutait que c’était lui, l’ « écoutant », qui avait du talent, lui, personne d’autre, qui avait été un jour bouleversé, remué et qui en garderait éternellement la marque.

Il y a 20 ans, sûrement plus, j’avais traduit « Suzanne » en français (qui retrouvera un jour ce papier parmi tous les autres de mes papiers ?) pour voir si l’émotion ne venait que de la voix ou aussi du texte, pour faire, à l’inverse et dans une autre langue, ce que Ferré a fait des poèmes de Verlaine ou de Baudelaire.

Pour le moins, j’aurais voulu que Cohen partage le Nobel avec Bob Dylan, l’impact universel et l’inexplicable symbiose entre texte, mélodie et voix sont pour moi plus grands encore pour le premier que pour le second.

Il est mort. Trois mots si simples et si terribles que l’on n’utilise qu’avec crainte et quelque fois pas du tout, les remplaçant par toutes sortes de formules. Non, il ne nous a pas quittés, il ne s’est pas éteint, il est mort, comme avant lui sa « muse » à laquelle il disait qu’elle le devançait à peine de la longueur d’un bras..

Compagnon d’une vie pour tant d’humains de tous pays de ma génération. Plus mystique que rock star, tellement plus fascinant que tant d’autres talentueux et inspirés pourtant qui l’ont précédé dans ces derniers mois terribles pour le chant et la musique populaire contemporaine.

Celui qu’on entendra toujours et qui ne parlera ni n’entendra plus dans un néant, tellement néant, que l’imagination ne peut pas même concevoir.

Quand en finira-t-on avec l’aberration du tabac ?

Quand en finira-t-on avec l’aberration du tabac ? Qui oserait aujourd’hui en légaliser la consommation ? Qui, dans dix ou 20 ans, tolèrera qu’il soit en vente libre à tous les coins de rue ? C’est pour moi une révolte au quotidien, ne serait-ce qu’en voyant jeunes gens et jeunes filles attroupés devant les lycées […]

Les maladies de la misère

L’espérance de vie à Denain est de… 58 ans. Retour 50 années en arrière dans ce pays sinistré par la fermeture d’Arcelor Mittel et la dévastation du marché de l’emploi. Ce sont aujourd’hui les maladies de la misère qui prospèrent, aux effets plus spectaculaires encore que du temps de Zola parce que, à quelques encablures de là, l’état de santé général s’améliore et l’espérance de vie continue –lentement- de progresser (70 ans aujourd’hui en moyenne F/H dans notre pays).

Ce ne sont plus la tuberculose, ni les maladies vénériennes qui font la différence : en France, leur responsabilité dans la durée de vie est contrôlée. Le trio de tête des maladies de la misère est aujourd’hui, dans l’ordre, le tabac, l’alcool et l’obésité. Est-ce que cela ne vaut pas qu’on les considère comme une priorité absolue ?

Je parle du tabac plus souvent que des deux autres, non parce que je suis élue de Bordeaux –cela n’a aucun sens- mais parce que le tabac est un toxique totalement négatif (aucun effet positif, y compris le plaisir qui n’est lié qu’à l’assouvissement de l’addiction), qu’il est le tueur de très loin le plus efficace (un fumeur sur deux) et qu’il est exclusivement lié à des puissances financières plus cyniques encore ici qu’ailleurs.

L’arme la plus efficace contre le tabac – en particulier contre l’entrée dans le tabagisme- est l’augmentation du prix. C’est un fait scientifique universellement établi et reconnu. Le problème éthique apparaît aussitôt et il est soulevé chaque année, lors des lois de finances réglant la fiscalité du tabac : en augmentant les prix, on sanctionne en premier lieu les moins riches. Du moins, paraît-on le faire.

J’ai posé cette question devant bien des assemblées, dont celles qui s’occupent en priorité de santé publique. Toutes l’ont résolue comme moi : la santé des pauvres doit être la première préoccupation : elle est plus mauvaise et eux-mêmes disposent beaucoup moins que les plus favorisés des informations sur les risques du tabac et les moyens d’en sortir. Je prends un exemple vécu au quotidien : tous les parlementaires fumeurs sont dans une démarche de sevrage et la plupart y parviennent alors que ce sont 50% des chômeurs qui sont et qui restent fumeurs.

Alors bien évidemment, il ne faut pas faire qu’augmenter le prix mais au contraire parvenir à la gratuité des moyens de sevrage et accompagner particulièrement ceux qui sont en difficulté dans leur démarche afin qu’ils reprennent considération pour leur santé et pour leur corps (activité sportive, meilleure alimentation, prise en charge psychologique). L’extension du forfait sevrage à tous ceux qui veulent arrêter de fumer va être voté cette année et si la prise en charge totale des médicaments du sevrage n’a pu être obtenue c’est parce que les firmes pharmaceutiques n’acceptent pas d’être astreintes à la fixation d’un prix sécurité sociale.

Je bataillerai encore cette année (dans la semaine à venir) contre des députés qui dupliquent les amendements fournis par cigarettiers, fournis d’ailleurs par l’agence de communication qui leur est habituelle et permet de les identifier plus facilement encore. L’augmentation du prix du tabac à rouler – qui n’était jusqu’alors qu’un prix d’appel  permettant l’entrée de tous dans une addiction dont ils mettraient 40 ans à sortir- est efficace et aucun gouvernement n’avait osé le faire : nous entendrons une fois encore les bons esprits pleurer sur les pauvres qui n’ont qu’un seul plaisir et qu’il faut pour cela laisser mourir. Le cynisme n’a pas de limites.

Nous devons gagner la bataille du tabac : c’est une bataille d’égalité et de liberté. Les plus inacceptables des marqueurs sociaux sont ceux qui concernent la santé. Dans le désordre et la misère croissante de ce siècle, c’est un enjeu de première grandeur de les réduire.

 

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel