Tabac : tous les indicateurs sont au rouge
Une étude récente, parue dans la très prestigieuse revue « New England Journal Medicine‘ fait état d’une relation de cause à effet entre tabagisme et des maladies mortelles considérées jusque-là comme indépendantes de la consommation de ce produit. Cela signifie que les chiffres de mortalité dont nous disposons sont très largement sous-estimés (pour mémoire, chaque année 73 000 morts en France, 700 000 dans l’Union Européenne, 480 000 aux Etats Unis, 5 à 6 millions dans le monde, soit davantage que Sida, paludisme et guerres réunis). Pour la France, exemple qui nous concerne, le vrai chiffre pourrait n’être pas de 73 000 mais de 90 000 décès annuels.
Qu’est que cela signifie ? Qu’ajoutée à l’augmentation générale du nombre de fumeurs (femmes et pays jusqu’alors peu touchés..) c’est bien une catastrophe sanitaire que nous laissons se développer.
En regard de ces chiffres chaque jour grandissants, les politiques mises en oeuvre dans la quasi-totalité des pays ne sont pas à la hauteur de la gravité et de l’urgence du risque ; celles qui sont introduites, malgré la pression des lobbies -massive, multiple, universelle- sont combattues par toutes les voies possibles.
Le « paquet neutre » qui sera introduit en France, après l’Australie et l’Irlande, en est l’exemple. A l’Assemblée nationale, les cigarettiers sont venus nous menacer d’actions judiciaires pouvant induire « des centaines de millions » de pénalités à notre Gouvernement. L’Australie est en ce moment-même l’objet de 3 actions de cette sorte, dont l’une a d’ailleurs été gagnée par le Gouvernement. Les deux autres sont en cours.
Ce sont aujourd’hui les buralistes qui, selon ce qui est pour eux presque une habitude, lancent une pétition, fort hypocrite au demeurant : « Oui, à la prévention, non à la punition ».
La prévention est menée depuis près de 50 ans. Des millions y ont été consacrés et le chiffre des morts annuels, le coût des dégâts sanitaires dus au tabac, ne cesse d’augmenter. On continue comme ça ?
Punition pour qui ? Pour 26 000 buralistes qui craignent de voir baisser leurs recettes ; ceci alors que leur revenu global est en augmentation de 54 %, ce qu’aucune autre profession n’atteint et que le montant des aides annuelles que l’Etat leur accorde -en plus de leurs recettes- est égal à près des deux tiers du budget dont j’ai disposé pour faire la loi vieillissement, soit 400 millions pour 645 consacré à l’aide aux âgés et à leur famille !
Quel poids doit être accordé à ces buralistes au regard de la vie de près de dizaines de milliers de personnes et de la mise en péril du financement de notre système de santé ? Sont-ils de ces points de vue crédibles ? NON. Plus personne aujourd’hui ne croit que l’on lutte contre le tabac et ses méfaits pour autre chose qu’un objectif de santé publique. A Bordeaux, on m’aborde pour me féliciter de mon action et m’engager à poursuivre. Ce n’est jamais d’excès de courage ou d’engagement que les Français accusent les politiques. Le tabac est une cause d’égale importance aujourd’hui à l’abolition de la peine de mort. Nous avons le devoir de la porter.