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Mots creux, expressions usées jusqu’à la corde, quel politique fait aujourd’hui dresser l’oreille?

Je râle un tantinet de lire dans le Monde en date du 19-20 octobre un article sur un sujet souvent évoqué dans ce blog : la dévitalisation du discours politique.Si tous se rallient aujourd’hui à ce constat, c’est que cette réalité est devenue  criante (si l’on peut dire) et qu’elle participe du désintérêt du public, quand ce n’est pas davantage, sur tout ce que peuvent dire les politiciens TTC (TTC = Toutes Tendances Confondues).

Mots creux, soit trop jargonnants, soit vidés de leur sens par trop d’usage, expressions usées jusqu’à la corde, les interviews se succèdent, 80% d’entre eux ne laissent aucun souvenir, ne dégagent aucune idée-force et moins encore de raisonnement intelligible. Faites le test : après avoir fermé le poste, essayez de retrouver les propos décisifs, les phrases qui vous ont marqué, ce que vous avez envie de conserver pour nourrir votre pensée : le butin est généralement maigre.

On est pour cela d’autant plus surpris quand une phrase, une expression, soit par sa rudesse, soit par sa nouveauté, soit même par le ton sur lequel elle est prononcée fait lever les oreilles. Ségolène Royal, lors de la campagne de 2007 avait réussi ce rajeunissement de l’expression politique. Elle fut la première à parler des « petites retraites » et ces deux mots, si communs, si souvent employés par ceux qui les touchent, montraient qu’elle savait ce que percevoir très peu, à l’issue d’une vie de travail, signifiait de privation et même d’humiliation.

Dans cette tentative et cette ambition de faire de nouveau aimer la politique, il y a aussi cela : parler de manière à être entendue pour pouvoir être écouté, compris, approuvé, suivi.

L’affaire est toujours loin du sac..

Parité mal ordonnée

En 2013, le mode de scrutin cantonal a été modifié, de même que le découpage des cantons.

Le premier objet du nouveau découpage était d’harmoniser le nombre d’habitants au sein de chaque canton. Celui-ci pouvait jusque-là varier de.. 4000 à 40000, ce qui amenait à une disparité inacceptable de la représentation des Français. Le deuxième était d’élargir le territoire de chacun de manière à y élire non plus un, mais deux conseillers généraux (de plus en plus souvent nommés « conseillers départementaux », de même que le « conseil général » tend à devenir le « conseil départemental », ce qui va dans le sens de plus de lisibilité).

L’objet de l’élection dans un même vote et un même territoire est d’assurer la parité dans une Assemblée qui jusqu’alors en manquait gravement et durablement. La loi sur la parité elle-même n’avait permis qu’un frémissement paritaire et une faible progression des élues féminines.

En 2014, avant les prochaines élections, on ne compte en effet que 13% de conseillères générales. Autrement exprimé, il y a plus de 8,7 hommes pour 1,3 femme. En Gironde, ce sont seulement  12 femmes qui représentent leur territoire.

Atterrant. L’objectif du nouveau mode de scrutin cantonal doit donc être salué. Il permettra, en un seul scrutin, d’établir une parité qui sans lui aurait tardé plusieurs décennies. Pour mémoire en 1945, il y avait 6% de députées femmes. En 1995, 50 ans après, elles étaient 5%… La masculinitude a en politique (ailleurs ?) une force d’inertie considérable.

Sauf  que  l’objectif de parité ne se réduit à deux chiffres sur une feuille. Le mode de désignation des candidats risque fort de dévoyer le principe même de la parité, qui est bien évidemment l’égalité, non seulement en nombre mais en « droits et en dignité ».

On l’a vu, c’est parmi 87% de conseillers généraux sortants que l’on va trouver la grande majorité des candidats masculins. Hors grand âge et perte de motivation à poursuivre sa fonction, ces « sortants » bénéficieront de la prime de notoriété sur leur territoire -particulièrement en territoire rural où cette notoriété est grande-  ; bien sûr aussi de leur bilan et de leur connaissance des règles du jeu.

Craignons qu’il n’aient tendance à compléter leur binôme parmi les femmes qui leur sont proches, qui ont travaillé avec eux et envers lesquelles ils ont une confiance particulière. Ainsi beaucoup de candidates femmes risquent d’être majoritairement choisies par un homme, par la connaissance qu’IL a d’elles et l’estime qu’IL porte en ses qualités.

Ceci risque d’être particulièrement dommageable pour l’esprit même de la parité si le vote de désignation des candidats par les militants de chaque parti se fait lui aussi en binôme. Une femme nouvelle venue, accompagnée d’un homme qui ne sera pas un sortant, sera a priori très désavantagée au moment de ce vote.

Au contraire, si le vote a lieu individuellement, entre les candidats hommes d’un côté et les candidats femmes de l’autre, la personnalité de la femme, son expérience et son engagement propres, ses arguments propres seront seuls à jouer pour elles. Elle sera égale en dignité avec tout autre candidat, masculin comme féminin.

Disons-le plus concrètement : je ne me serais jamais présentée à une élection , cantonale ou pas, dans l’ombre d’un candidat masculin qui m’aurait sollicitée pour le « compléter « . J’ai affronté les votes de désignation comme individu plein et entier, me présentant avec ma personnalité, mon projet, mon programme propres à moi seule. J’exclus de cette prise de position les scrutins de liste où l’on se situe dans un groupe, tout en remarquant que les hommes en tête de la liste ne sont pas tous totalement pénétrés de l’esprit de parité.

Le binôme cantonal une fois installé dans la fonction (à l’issue de la désignation et du scrutin officiel), la femme élue dans le sillage d’un sortant ou d’une personnalité masculine déjà installée, aura grand mal à trouver sa pleine autonomie. Le temps risque d’être long où l’homme qui est venu la chercher, la considèrera peu ou prou comme une collaboratrice ou une assistante. Une fois encore, je ne généralise pas, mais la pratique du monde politique m’incite à une grande prudence.

La parité dans son essence même qui est l’Egalité et pas seulement l’identité de nombre, risque de pas y trouver son compte. Pas non plus celles qui depuis des lustres combattent pour qu’elle soit autre chose qu’un chiffre ou un mot alibi.

 

 

 

 

 

Impôts : et si tous, même très peu, y contribuaient ?

La mesure surprise de suppression de la première tranche d’imposition est positive en ce qu’elle améliore le pouvoir d’achat des moins riches parmi les Français imposables. Elle n’est pas exempte d’un défaut.

L’impôt, si décrié même en dehors du moment désagréable où l’on a à faire le chèque, est pourtant la base de la vie en société. Rien de plus moral et légitime que lui. Outil d’abord de redistribution des plus riches vers les moins riches et matériau de base de tous les services et équipements qui nous sont communs. Ecole, hôpital, justice, routes, pompiers .. l’argent public n’est que la part commune de l’argent de chacun. Rien n’est gratuit dans les services qui nous sont rendus, les équipements dont nous profitons. C’est chacun de nous qui en assume le financement comme c’est chacun de nous qui doit  s’en sentir responsable.

Cet enseignement citoyen de base n’est pas toujours clairement perçu et, sans aller jusqu’à l’universalité que j’évoquais précédemment pour les allocations familiales et d’autonomie, il me parait juste et pédagogique que le plus grand nombre y contribue. Je parle ici bien évidemment de l’imposition directe, l’impôt indirect bien que plus pesant est moins signifiant (TVA, TIPP…)

Fût ce quelques dizaines d’euros par an, voire moins, cette contribution, clairement expliquée en quelques lignes adressées avec l’avis d’imposition, participerait de la compréhension de ce que représente l’impôt. J’ai écrit « sans aller jusqu’à l’universalité » pour que le coût administratif n’excède pas de beaucoup la levée de quelques euros. Mais hors de cette réserve, je suis favorable à ce qu’on l’on appelle « l’élargissement de l’assiette ».

Cette position est partagée par Jean-Marc Ayrault dans une de ses trop rares expressions publiques d’ « après-1erMinistre ». Il en appelle à la réforme fiscale, la « remise à plat » qu’il avait annoncée il y a quelques mois dans la triple intention de plus grande justice fiscale, de simplification et de lisibilité. Il y ajoute, entre autres, la nécessité du prélèvement à la source qui simplifierait de la vie et l’établissement du budget de beaucoup d’entre nous, sans parler du travail des administrations.

 

 

Universalité des allocations familiales, mais selon quel principe?

Le principe d’universalité d’une allocation de l’Etat est né dans l’après-guerre avec les allocations familiales. On en comprend aisément la raison : l’imbécillité (elle même O combien universelle) de la guerre avait tué 600 000 milles Français), l’idée d’encourager à leur remplacement avait tout son sens et n’avait pas alors à s’encombrer des revenus des familles. Toutes avaient été touchées, toutes devaient être concernées.

En 2001, l’Allocation Personnalisée d’Autonomie a été conçue sur le même principe mais avec une forte différence : l’universalité était absolue mais le montant de l’allocation était (est encore) modulé en fonction des revenus. Disons-le de manière technique : le « ticket modérateur » définissant la participation des personnes au coût du nombre d’heures d’aides qui leur est alloué est calculé de manière progressive au prorata de leurs revenus.

Cette seule dernière phrase montre que la politique de l’âge n’a jamais été et n’est toujours pas d’une biblique simplicité. Résumons en peu de mots : tout le monde reçoit, mais plus on gagne, moins on reçoit. Est-ce moins  « égalitaire » au sens fondamental de ce terme que « tout le monde reçoit la même chose ».

Ce sujet vient de revenir sur les bancs de l’Assemblée avec les mesures proposées par le Gouvernement pour ramener à l’équilibre la branche « famille » de la sécurité sociale. Trois mesures majeures portant sur le montant de l’allocation de naissance du 2ème enfant, la revalorisation de l’allocation à 16 au lieu de 14 ans et le partage du congé familial.

Aucune de ces trois mesures n’est exempte d’incompréhension et d’effets dommageables. A la commission des affaires sociales de l’Assemblée, nous avons proposé d’en amoindrir les effets en instituant au dessus de 6000 euros de revenus pour un ménage une dégressivité des allocations familiales selon le revenu mais en conservant le principe d’universalité (tout le monde reçoit). Ainsi le montant de l’allocation serait réduit par paliers (non encore définis) faisant au total qu’un ménage gagnant 12000 euros par mois recevrait moins qu’un ménage gagnant 600 euros. Ce principe d’universalité dégressive à partir d’un palier, très proche du principe de l’APA ne me parait en rien choquant dans une période de forte contrainte budgétaire. Je dirais même que la symétrique APA/AF, c’est à dire enfance/grand âge me parait hautement signifiante et positive.
Cette perspective parait momentanément écartée. J’y souscris pour ma part totalement. Les Français ne peuvent pas s’exprimer, dans la brièveté du temps de vote du projet de loi de finances de la Sécurité Sociale, sinon à travers leurs représentants.

D’autant plus, je souhait avoir l’avis de tous.

 

 

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