Cette vente pose la question de la propriété publique.
Le maire est dépositaire du patrimoine de la Ville. Il lui est déléguée la responsabilité d’entretenir ce patrimoine et non pas de le laisser se dégrader pendant 20 ans pour dire ensuite que sa réhabilitation serait trop coûteuse.
Les mandats des élus sont fragiles. Leur fonction même impose de respecter les valeurs républicaines et la conservation du patrimoine.
Délibération-2016/5
Ensemble immobilier situé 71 rue du Loup, désaffection, déclassement et mise en vente par appel d’offre sur internet. Décision. Autorisation
Hôtel Ragueneau :
Depuis maintenant 3 siècles et demi, la Ville de Bordeaux occupe l’Hôtel Ragueneau, rue du Loup, à deux pas de la place Pey-Berland. Malgré cette longue histoire commune, la Ville et le Maire décident aujourd’hui de le mettre en vente pour des motifs au combien non convaincants.
Cet hôtel a été construit entre 1643 et 1656 par la veuve d’un conseiller au Parlement de Bordeaux. La Ville y logera successivement la Chambre de l’Edit de Guyenne, les services centraux de l’octroi puis, à partir de 1939 les Archives municipales aujourd’hui transférées à la Bastide.
Ce bâtiment, de style Louis XIII est de toute beauté. Il est un des rares immeubles du XVIIème siècle encore visible à Bordeaux. Les façades côté cour et la galerie sont classées Monument Historique et la cour héberge une glycine séculaire labellisée Arbre remarquable de France en 2012.
Les derniers travaux d’envergure concernant ce bâtiment datent de 1936 et depuis vingt ans, la Ville n’a effectué aucun entretien ni réparation notables. Or c’est aujourd’hui le prétexte du coût de la remise en état qui est avancé pour justifier la vente du bâtiment.
Propriété publique :
L’hôtel de Ragueneau appartient aux Bordelais, à leur Histoire, au prestige de leur ville et à sa signature architecturale.
Ce bâtiment à l’égal du Palais Rohan ou du Palais de la Bourse, est partie intégrante de l’Histoire de Bordeaux et appartient aux Bordelais. Le Maire n’en est que le dépositaire et en aucun cas le propriétaire. Il a le devoir d’entretenir ce patrimoine mais en aucun cas de le vendre.
Cette délibération n’est en aucun cas anodine. Son sujet n’est pas la vente d’un hôtel particulier mais celui de la propriété publique, confiée aux élus le temps de leur mandat. C’est une notion dont, depuis des années, le Maire ne prend pas la mesure.
L’an dernier déjà, d’autres immeubles patrimoniaux appartenant à la Ville ont été vendus ; les élus de l’opposition s’en sont émus. Cette vente se situe donc dans la même lignée.
Exemples d’éléments patrimoniaux vendus ou délaissés par la mairie
- L’exemple désastreux des Voûtes Schyler
Les Voûtes Schyler, ces anciens chais des Chartrons, ne sont pas restées longtemps dans le patrimoine de la Ville.
La Ville en avait fait l’acquisition en 2000 dans le cadre du projet de la ZAC des Chartrons, ce nouveau quartier piloté par Domofrance entre les quais et le cours Balguerie. L’objectif de la municipalité était d’y réaliser un équipement de quartier, culturel. Le prix d’achat avait doublé l’estimation des Domaines, mais le Maire (Hugues MARTIN) avait estimé alors que cette acquisition était indispensable dans ce quartier en manque d’équipements public.
Six ans plus tard, en 2006, la Mairie n’y avait rien fait, aucun projet ne voyait le jour et les Voûtes Schyler, d’une superficie d’environ 1000 mètres carrés sont revendues par la Ville au mieux disant, pour y créer une galerie d’art contemporaine et un logement destiné à recevoir des artistes internationaux. Le prix convenu était de 250 000 euros soit 250 euros le m2.
Déjà alors, d’une voix unanime, l’opposition avait dénoncé « une nouvelle mise en vente du patrimoine municipal au profit d’un opérateur privé ».
En avril 2007, la Ville achète à Domofrance les parcelles attenantes pour y faire des places de stationnement. Un an plus tard, en juin 2008, soit deux ans après la vente initiale la Ville décide d’intégrer à la vente de la parcelle des voûtes Schyler, sans surcoût, une parcelle de 142 m2 pour des places de parking. Ce don était alors justifié par la nécessité pour la bonne réalisation du projet des acquéreurs de disposer de places de parking.
Aujourd’hui, le projet de galerie d’art a fait long feu et ce site à haute valeur historique pour notre ville et architecturale reste totalement privé, fermé aux regards des Bordelais.
Le bâtiment des voûtes Schyler actuellement :
En 2011 a eu lieu la cérémonie de clôture de l’Ecole de Santé navale après 120 ans d’histoire bordelaise.
Santé navale faisait partie intégrante du rayonnement de Bordeaux, porté par 9000 élèves depuis 1890. Au delà de la qualité architecturale des lieux, il s’agissait d’un élément de prestige international sur le plan médical et universitaire de Bordeaux.
- Immeuble au 17 Place Pey-Berland
Edifié dans les vestiges de l’ancienne église Notre-Dame de la Place sur laquelle a été plaquée une façade en pierre datant de la fin du 19ème siècle. Le sous-sol accueille une crypte de l’église du 6ème- 7ème siècle.
Désaffecté depuis 1985 après son achat par la mairie, le Temple des Chartrons
Oublié depuis trente années, le Temple des Chartrons, bâtiment patrimonial de Bordeaux, sert aujourd’hui d’entrepôt et doit retrouver toute sa place dans la vie culturelle et spirituelle de notre ville.
- Salle des Fêtes du Grand Parc
Fermée depuis 25 ans, sa réouverture est sans cesse repoussée
Pourquoi ces ventes ?
Bien souvent, sous prétexte de mauvais entretien et de coût de réhabilitation, prétexte qui ne fait qu’accuser le peu de soucis du Maire de la propriété publique. Son premier devoir est d’entretenir régulièrement ce qui lui est confié et non pas de laisser son état s’aggraver pour avancer ensuite des raison de s’en séparer.
En réalité, il s’agit de pallier le coût démesuré d’investissements de prestige tels que le Grand Stade, alors qu’aucun d’entre eux n’aura la valeur patrimoniale de l’Hôtel de Ragueneau et que beaucoup seront, prenons-en le pari, peu flatteurs pour notre ville dans une vingtaine d’années.
De vos réalisations, ou celles se faisant à Bordeaux durant le mandat du Maire, lesquelles seront encore debout dans deux siècles et demi, lesquelles feront encore honneur à notre ville d’ici 20 ou 50 ans ?
Donnons une chance à la Cité du Vin et aussi, même si le mérite ne vous en revient qu’en partie, au Pont Jacques Chaban Delmas.
Mais, qu’en sera-t-il de ces constructions ?
- Bastide 1
- Ginko
- Les Bassins à Flot
- Le Palais des Congrès
- L’immeuble « pain d’épice » au coin du Cours du Maréchal Juin et de la rue du Château d’eau
- La Cité municipale
- Le Grand Stade