Oublié depuis trente années, le Temple des Chartrons, bâtiment patrimonial de Bordeaux, doit retrouver toute sa place dans la vie culturelle et spirituelle de notre ville. Le projet présenté au Maire de Bordeaux se situe en parfait respect de la laïcité, laquelle sépare radicalement l’Etat des églises, mais réunit croyants et non croyants, laïcs et religieux de toutes confessions, dans une même liberté de conscience.
Proposition au Maire de Bordeaux
A l’occasion d’un entretien, Michèle DELAUNAY a proposé le 16 février au Maire de Bordeaux, actuel propriétaire des lieux de par son mandat, de rendre au Temple sa noblesse et son attractivité, en renouant avec sa vocation culturelle, spirituelle et sociale.
Après avoir consulté personnellement les responsables des différents cultes et reçu leur assentiment à cette proposition, Michèle DELAUNAY soumet le projet de faire évoluer le Temple des Chartrons en un lieu de spiritualité et de dialogue inter-religieux, dans le plein respect de la laïcité. Pour mémoire, on rappelle que le Maire est également propriétaire des églises de la ville et subvient en partie à leur entretien. On rappelle également que le temple est officiellement désaffecté.
1-Tout d’abord, la nouvelle définition de ce lieu viendrait concrétiser et amplifier de manière éloquente la démarche de Bordeaux-Partages, qui est unanimement saluée et se situe en parfaite adéquation avec l’esprit de notre ville. L’existence d’un lieu de rencontre, d’échanges, de conférences, de débats, est vivement souhaitée par les acteurs de Bordeaux Partages.
La qualité des lieux, leur noblesse mais aussi leur volume permettront de leur donner une dimension culturelle et spirituelle internationale.
Fidèles et non croyants, laïcs et religieux pourront ainsi mieux se comprendre et progresser dans la connaissance de ce qui les rassemble et fait leurs particularités. Ceci constituera en outre pour les jeunes des « travaux pratiques » complétant l’enseignement du fait religieux dans les établissements scolaires
2-Une dimension supplémentaire, celle de lieu de célébration commun, situera Bordeaux à l’avant garde d’une laïcité de dialogue et de concorde. Il matérialiserait un rapprochement interreligieux respectant l’identité de chaque culte mais manifestant que toutes rejettent que l’on puisse tuer, condamner, agresser, injurier au nom d’un dieu.
On propose ainsi que, dans des circonstances particulières nécessitant un lieu empli de solennité et de noblesse où les différents responsables des cultes puissent célébrer ensemble, comme ils le font par exemple dans des cérémonies endeuillant des fidèles des diverses religions (ex : catastrophe de Sharm el-Sheikh).
Les événements douloureux que notre pays vient de traverser (assassinat de l’otage en Algérie, attentats contre l’école juive de Toulouse, contre l’Hyper Casher, contre Charlie Hebdo) ont été l’occasion dans notre ville, de marches interreligieuses et de réunions laïques de haute signification. L’absence d’un « lieu neutre » n’a cependant pas permis de célébration commune où chaque responsable religieux aurait pu conjointement et dans les formes des différents cultes manifester leur convergence dans le rejet de ces événements.
De telles célébrations communes auraient une forte signification pour l’ensemble des fidèles de ces diverses religions, quel que soit leur âge et leur origine.
3-Dans cette même perspective, le temple pourra être mis à disposition des familles de Bordelais ou de personnalités extérieures ayant émis le souhait d’une cérémonie républicaine strictement laïque et/ou multi-confessionnelle pour les accompagner à leur mort. Ce type de lieu manque cruellement dans l’ensemble du territoire de notre pays et répond pourtant à une attente fréquemment exprimée.
Bien évidemment, cette démarche ne se réduit pas à des circonstances difficiles ou douloureuses, elle peut être liée à des événements solennels à caractère républicain (conférences de hautes personnalités nationales et étrangères, parrainages républicains), particulièrement en direction de la paix.
Ces exemples et ces orientations constituent un schéma pour la réflexion que chaque culte, comme chacun des citoyens et des élus de notre ville, viendra poursuivre et partager.
La laïcité sépare radicalement l’Etat des Eglises, mais elle a plus que jamais, dans un temps où les religions sont utilisées comme des armes ou des instruments, la mission de rassembler l’ensemble des citoyens.
Histoire
Le temple a été construit entre 1832 et 1835 après la Révolution et l’obtention de la liberté de culte. Les fidèles sont alors nombreux et la possibilité de bénéficier d’un fonds de soutien du Gouvernement « afin de procurer de l’ouvrage à la classe ouvrière » emporte la décision de construire un Temple d’envergure, en remplacement de lieux de culte exigus. Le financement est cependant majoritairement privé, issu des « grandes familles protestantes » qui connaissent alors leur âge d’or.
Le temple est achevé et consacré en 1835. La baisse de fréquentation des fidèles, la moindre influence économique et politique des protestants bordelais, font émerger l’idée de s’en séparer. Le Temple est finalement vendu « dans la douleur » par ses propriétaires en 1985 à la Ville de Bordeaux et désaffecté.
Il sert actuellement de dépôt pour les costumes et les décors de l’ONBA, ce qui n’est bien sûr pas en rapport ni avec sa valeur patrimoniale, ni avec sa place dans l’histoire de la ville et dans celle du protestantisme français.
Situation
Situé au 10 de la rue Notre Dame dans le quartier des Chartrons et à quelques dizaines de mètres du Cours Xavier Arnozan et des demeures des familles patronymiques du protestantisme bordelais et de leurs anciens lieux de négoce, le Temple des Chartrons fait partie du patrimoine classé de la ville et bénéficie d’un emplacement à la fois central et remarquable. Son intérêt, y compris touristique, est évident.
Après 30 ans d’oubli et d’un usage qui n’est ni à la hauteur de son histoire ni de sa qualité architecturale et de son emplacement au cœur du quartier emblématique de Bordeaux, le Temple des Chartrons doit retrouver sa place dans l’Histoire et la vie bordelaise.
Courrier AJ – 16022015