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Solstice d’hiver

La nuit dernière était celle du solstice d’hiver ; la nuit la plus longue, le jour le plus court. Celle, celui, dont on dit qu’après eux, tout ne peut que renaître, recommencer, revivre, le mythe éternel de l’homme nouveau dans un monde nouveau. Le mythe du « Premier homme » dont Camus a fait son dernier roman.

Comme des milliers, au cours de milliers d’années, je déteste les jours qu’un dieu inconnu abrège et les nuits qui allongent. Comme ces mêmes milliers, je guette le plus petit signe de victoire de la lumière sur les ténèbres.

Vercingétorix et tant d’autres ne faisaient pas autre chose. C’est rassurant.

Ce soir, j’ai envie de parler de Julien Dray. Aucun rapport ou tous les rapports que l’on veut, puisque les rapports, les liens, les connivences et les connexions sont dans nos têtes plus que dans les faits ; d’étranges petites pattes entre deux neurones. Des petites pattes qui sont, en fait, des molécules, des neuro-médiateurs, des courants électriques, des choses bizarres dont nous ne saurons jamais tout.

Je ne connais pas Julien Dray. Enfin, un peu et même beaucoup, si l’on considère comme « beaucoup » de l’avoir entendu, éblouissant, profond, hardi, lors du dernier Conseil National du PS. Et d’avoir échangé un mot et deux grognements, dans le couloir du 3 AB, le soir d’avant la perquisition. Le « trois AB », 3 rue Aristide Briand, est l’adresse commune de nos bureaux à l’Assemblée, où nous nous sommes croisés très tard, la nuit était déjà avancée, lui en forme de gros ours, moi en forme d’ourse plus fragile, mais pas moins ourse.

Je connais Julien Dray pour tout cela, et pour la familiarité que donne d’appartenir à la famille ours. Et je partage sans difficulté ce qu’il vit en ce moment, dans une grande économie d’appuis et de signes d’amitié.

Julien a du coeur et du talent. Il lui faut du courage dans ce qu’il traverse, dont je ne sais rien, et lui peut-être pas grand chose.

Marche pour l’emploi

Non, ce n’était pas pour la venue du père Noël que nous manifestions hier 20 decembre. Du moins, espérons que la situation de l’emploi à Bordeaux ne dépende plus que de sa seule compétence. L’avalanche des sites fermés au cours de 2008 (Marie Brizard, Céwécolor…) pourraient le laisser craindre.

En tête de nos préoccupations, le site de Ford à Blanquefort et ses 1650 emplois. Les salariés étaient nombreux hier en tête de cortège, suivis par les organisations syndicales et les partis de gauche. Je m’étonne toujours de l’absence de toute représentation de la droite et du centre quand il s’agit de défendre la vie économique et industrielle de notre région. C’est ainsi.

Le PS, représenté en nombre, défilait derrière la bannière de la section de Villenave d’Ornon. La réflexion n’a pas manqué : « Eh bien, s’ils sont ni nombreux à Villenave d’Ornon, qu’est-ce que ce doit être quand toute la Gironde est présente ! ». C’est bien, en effet, de ce parti de masse, dont nous voudrions, pour qu’il pèse obligatoire dans tous les débats et les enjeux que nous allons connaître.

Longue marche de près de trois heures, dans l’atmosphère à la fois conviviale et grave de ce type de manifestations où la vie de nombreuses familles est en jeu. Une perspective se fait jour pour Ford avec le rachat de la totalité du site par Johann Hay, spécialiste du forgeage de pièces automobiles. Mais rien n’est fait et pour l’heure, les équipes subissent un chômage technique de 6 semaines.

Nous sommes tous autour des employés de Ford, qui se battent avec une particulière énergie.

Et si on parlait d’autre chose…

Et même de pas grand chose, juste comme ça pour parler, pour arrêter la vie, fût-ce pour un instant. J’attends deux patients retardataires à ma consultation de l’Institut Bergonié. Parenthèse imprévue, qui pour une fois n’est trouée d’aucun coup de téléphone, d’aucun dossier en surnombre.

Devant moi, les toits de Bordeaux sud, sous des nuages charbonneux. Au ras des toits, une lame de soleil qui éclaire les cheminées de plein fouet. Autant dire que ce paysage qui n’a d’autre grâce que la hauteur de laquelle on l’examine devient beau par le heurt des couleurs et le silence apparent de l’ensemble.

Les paysages que l’on voit des fenêtres d’un hôpital ont une signification particulière : on sait que pendant des heures très nombreuses, des patients très nombreux les ont examinés, détaillés, quelquefois sans trop les voir tellement leurs soucis étaient ailleurs. Plus que partout ailleurs, ce sont les regards et non le paysage lui-même qui sont porteurs de signification.

J’aime beaucoup écrire comme ça, sans avoir la moindre idée en commençant d’où les mots vont m’amener. Avouons que c’est rare sur ce blog, car je suis une femme sérieuse, responsable, supposée parler sérieusement de politique. Saint Exupéry dirait que je suis une grande personne. Et les grandes personnes ne devraient parler sans savoir ce qu’elles vont dire, elle parlent déjà si souvent sans avoir rien à dire.

Un de mes malades que j’ai vu tout à l’heure, tient à venir consulter chaque année avant Noël. Tout simplement parce qu’il considère comme un cadeau d’être vivant (il n’a pas tout à fait tort) et il veut s’en réjouir avec moi, dans la mesure au moins où mon examen ne nous apprend, à l’un et à l’autre, rien de fâcheux. Peut-être est-ce son histoire que je vous raconterai pour commencer l’année, puisque je vous raconte chaque année une belle histoire pour franchir le pas avec un peu de merveilleux dans la tête.

Mais un de mes retardataires se manifeste…

Une loi pour les temples des marchands

Atmosphère de Grand Soir dans l’hémicycle pour l’ouverture du débat sur la proposition de loi sur le travail du dimanche. Elle s’est, au passage, parée d’un nouveau titre « dérogations au repos dominical ». On saisit bien la nuance et l’intention.

Présentation du projet par son rédacteur, le député Maillé, dont j’apprends ce soir seulement qu’il est le député de « Plan-de-Campagne », l’ensemble commercial dont il s’agit de légaliser l’ouverture le dimanche hors de toute règle. Il explique sous les huées « que les femmes divorcées doivent pouvoir travailler le dimanche » (sic). Pourquoi les femmes et pas les hommes ? Pourquoi divorcées ? Les nombreuses femmes sur les bancs de la gauche manifestent à grand bruit. « S’il s’était tu, il serait resté philosophe ». Le député Maillé a manqué son entrée.

Une belle exclamation part de nos bancs « C’est une loi d’amnistie pour le temple des marchands ! ». Bien vu ..

Le Secrétaire d’Etat Luc Chatel fait un discours calamiteux autour du thême « aurons-nous le coeur d’empêcher les pauvres de pouvoir gagner plus en travaillant le dimanche ? ». Fond de pensée très XIXème siècle industriel, qui vient à son comble avec la proposition de donner la priorité le dimanche pour le travail des handicapés..

Jean-François Copé, président du groupe UMP, sent que ça ne va pas bien pour son camp et demande finalement que la séance soit suspendue. Ce qui fût.

Suite à demain. Pas question de baisser les bras sur ce texte emblématique d’un véritable choix de société.

La paille et la poutre

Lundi soir dans l’avion, mon excellente collègue Chantal Bourragué, m’a interpellée : « Ah, il est riche le Conseil Général de faire de la publicité dans Sud Ouest ! »

Propos bien imprudent quand on soutient le gouvernement de Nicolas Sarkozy.

Le lieu n’était pas au débat. Je le prolonge donc ici.

Le budget du service de communication du gouvernement (Service d’Information du Gouvernement « SIG ») a vu son budget passer de 5,8 à 23 millions d’euros depuis l’avènement de notre Président, soit une augmentation de 300% que l’on peut considérer comme assez favorable en ces temps de crise. Le service a dans le même temps été placé sous l’autorité directe du Président (au lieu du Premier Ministre) et confié à un de ses amis, Thierry Saussez.

Hors de cela, la remarque de ma collègue était doublement inopportune en ces temps de réforme audiovisuelle, puisque c’est un cadeau de 800 millions d’euros que nous faisons avec cette loi aux chaînes privées, en remerciement de leur bon comportement à l’égard du gouvernement comme de l’ex candidat.

Je suis ce matin en séance plénière au Conseil Général. Je ne suis pas sûre que le groupe UMP, qui a sans doute réfléchi, évoque ce matin le sujet.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel