Sarkozy : un pesant malaise
Je voulais hier soir coucher sur le blog en direct mes réactions à l’oral de rattrapage de Nicolas Sarkozy. Un pesant malaise pendant l’interview, et plus encore pendant l’échange avec « les Français- m’en a empêché.
Pourquoi : parce qu’il s’agissait d’un éxercice trop inégal. Tout d’abord, en face de Laurence Ferrari, qui s’est conduite en présentatrice plus qu’en journaliste et qu’il a d’emblée privée de toute vélléité investigatrice en évocant son salaire. En avait-elle de ces vélléités ? Des questions telles que « La popularité de votre Premier Ministre augmente, est-ce que cela vous dérange ? ». Que pouvait répondre Sarkozy d’autre que ce panégérique de Fillon et de ses relations avec lui ?
Ensuite et plus gravement, l’inégalité entre un Président, grand professionnel de la communication, d’autant meilleur quand il sait être supérieur et ne pouvoir être pris en défaut, et un « pannel » de Français qui étaient pour la première fois sur un plateau, avaient consigne de parler vite et de ne poser d’une question, sans reprendre ensuite la parole, faussait complètement le jeu.
Ces Français ne s’en sont pour autant pas mal sortis. Combien, ils avaient envie, pour plusieurs d’entre eux de retourner à la charge ! Qu’a dû ressentir le menuisier de Langon, écrasé sans recours par une grosse entreprise, en écoutant la tirade finale de Sarkozy « Vous avez des droits » ? Combien de fois ces droits sont foulés, déchirés aux pieds, inatteignables pour les plus modestes et les moins armés ?
Qu’a pensé la productrice de lait quand nous avons écouté l’inévitable antienne « personne ne sera laissé sur le bord de la route » ou « Je n’accepte pas que celui qui travaille voit ses revenus diminuer ». Les producteurs, que le désespoir a conduit au suicide, c’est vrai, ils n’étaient pas sur le bord de la route, mais au beau milieu de la chaussée et ils ont été écrasés.
L’employée de supermarché, qui travaille 32 heures, y a-t-elle cru quand on lui proposé comme seule chance de « joindre les deux bouts » de faire des heures supplémentaires. Le Président n’a-t-il pas connaissance des temps partiels subis ?
Notre menuisier, encore lui, fait à 68 ans une heure de scooter pour se rendre à son travail et en revenir. Pour son confort et son prestige, Nicolas Sarkozy a renouvellé la flotte présidentielle à hauteur de 350 millions.
Devant ses vies si difficiles, de Français qui tenaient à faire bon visage, exposant leur situation sans dolorisme, dignement, où était l’exemplarité, la vraie réponse, la mise en perspective ?
C’est ce qu’à mon tour, reprenant une formule vingt fois utilisée, martelée, par Nicolas Sarkozy « je n’accepte pas ».