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La Rochelle en direct (I) : Ségolène ou la région par la preuve

La région, pas seulement. L’écologie avec la réalisation de lycées zéro carbone, la coopération et le co-développement avec les fours solaires en Afrique, l’innovation et la compétivité avec un pôle en Poitou-Charente et le sauvetage d’Heuliez : Ségolène Royal ouvre à l’instant l’Université d’été par la preuve avec les réalisations socialistes dans sa région.

Le sous-entendu bien sûr : la politique par la preuve, le socialisme par la preuve, à l’inverse du nombrilisme aigû, de la charrue des primaires avant les boeufs du faire et de l’être.

Sono médiocre, mais auditorium surbondé : qui a dit que les Socialistes avaient l’intention de bouder l’Université d’été ? La réalité : 3500 incrits et une queue longue de plusieurs mètres pour des inscrits de dernière heure.

D’accord ou pas, elles sont désormais inévitables

Chaque année, depuis que je vais à la Rochelle, les médias imposent un thême avant que l’Université ait commencé. Il y a eu « Devine qui vient dîner ce soir ? » (Il s’agissait de Jospin, et nous étions supposés deviner derrière sa venue ou sa non venue s’il serait candidat). Une autre année « Fabius, c’est oui ou c’est non ? ». C’était cette fois le référendum au traité constitutionnel qui agitait les esprits. Et dernièrement « Hollande : l’adieu aux armes » qui ouvrait sur notre magistral congrès de Reims.

Eh bien, cette année, ce sont les primaires. Martine se proncera-t-elle ? Ratifiera-t-elle ? Le suspense est, à dire vrai, insoutenable et il va monter en puissance et, une année encore, obscurcir totalement le contenu des ateliers, les discussions, le fond. A quoi sert le fond ? Si on l’appelle ainsi, c’est bien pour qu’il y reste ! Pourquoi s’inquiéter de sujets qui n’intéressent guère qu’une soixantaine de millions de Français.

Les primaires, oui, ça c’est un bon truc. Pour tout vous dire, au marché d’Hossegor, à la Benauge, on me tirait par la manche pour me demander « Etes-vous favorable aux primaires ? Comment les voyez-vous ? Allez-vous enfin vous prononcer, nous ne pouvons rester plus longtemps dans le doute et l’inquiétude ».

L’interrogation populaire qui touche à l’obsession et qui ne fera que s’acccutiser avec les problèmes de rentrée, la nécessité où est un -ou une- Socialiste de répondre aux préoccupations quotidiennes des Français, me poussent aujourd’hui à m’exprimer : d’accord ou pas, au point où nous en sommes, les primaires sont désormais inévitables. D’ailleurs, elles ont clairement commencé avec la gesticulation médiatique de nos plus beaux quadras et quinquas depuis quelques mois. Que font-ils d’autre qu’engranger de la notoriété ? L’important, disait Talleyrand n’est pas qu’on dise du bien ou du mal de vous, c’est qu’on en parle.

Alors, pas follement enthousiaste ? En tout cas pleine d’interrogations : comment les organiser ? Qui votera réellement ? Est-ce que nous ne nous retrouverons pas finalement entre socialistes et para-socialistes, avec des candidats à gauche comme au milieu, et Sarko, tranquille, en face ?

La plus importante est celle-ci, exprimée d’ailleurs avec sa maîtrise habituelle par Laurent Fabius. C’est l’opinion et les médias qui décideront du lauréat. Pas le travail de fond, pas la force des convictions, pas la morale personnelle, pas la puissance du caractère, pas la représentativité réelle de la personnalité et du parcours des candidats. Autant de spécificités démodées chez nous, quasi-ringardes, mais que les Etats-Unis avec leurs habituelles quinze années d’avance, ont remis en selle il y peu et de belle manière.

Le rôle des partis, et bien sûr au premier rang pour moi, du Parti Socialiste, est d’ emporter l’opinion derrière eux. Le danger principal des primaires, c’est que ce soit l’opinion qui fasse désormais le Parti Socialiste.

Mais quoi : « Si on te viole et que tu ne puisses l’éviter, tâche au moins d’y prendre plaisir ». Ce n’est probablement pas un proverbe chinois, mais c’est un de mes maîtres en médecine qui me l’a enseigné alors que j’étais toute débutante. En médecine, il est de peu d’intérêt. En politique, Il sert beaucoup.

Essayons donc de faire des primaires le meilleur. Et d’attendre, sans excès de fièvre, dimanche, les déclarations de Martine.

Mon instant sur cette terre

De nouveau devant ma fenêtre après deux jours à Bordeaux. Les dernières heures quelque part sont toujours les plus parlantes. Quitter un lieu, fût-ce pour quelques mois, en dramatise chaque son, chaque couleur et ici, surtout, cette impression de grand large, d’éternité de la nature malgré toutes les alarmes écologiques qui ne suffisent pas à la précariser.

Ma fenêtre s’ouvre, selon les heures, droit devant l’Amérique (juste derrière cette ligne, souvent indécise, de l’horizon), à l’aplomb du soleil couchant que je regarde ici, les yeux dans les yeux, depuis tant de soirs, ou devant cette masse grondante, presque effrayante, qui donne plus que n’importe quoi l’impression de la faiblesse de l’homme, qu’est l’océan. Selon les heures, c’est l’un ou l’autre qui donne le « la » au spectacle toujours grandiose, toujours changeant, toujours retrouvé, que contient l’arrondi de la haute fenêtre devant laquelle je travaille.

Aujourd’hui, ma fenêtre est ouverte à deux battants, ce qui est rarement possible. Même en des jours que l’on qualifie ailleurs de canicule, le vent toujours présent, est quelquefois si fort, qu’il faut interposer une vitre entre ciel et table de travail, si l’on veut se maintenir à son poste. Mais, en cette fin d’après-midi, ce ne sont que des brises qui viennent par bouffées, avec le bruit des vagues qui s’éboulent, jusqu’à mon ordinateur.

Car c’est maintenant lui, depuis 10 à 15 ans, je ne sais plus, qui joue le rôle de fenêtre dans la fenêtre. Dès la première fois où j’ai ouvert mon portable ici, j’ai été frappée par la similitude de couleur entre le fond gris bleu de mon écran et celui du ciel ; par la similitude de sens aussi. Ma fenêtre et mon écran sont ouverts sur le monde, un monde sans limites, sans autres repères que ceux que je crée moi même en imprimant des lignes de petits caractères noirs, qui avancent sagement comme des traces de pas, sur cet infini liquide.

Camus a appelé sa première résidence sur les hauteurs d’Alger, où il vivait en bohème avec sa femme inoubliée Simone Hué, « ma maison devant le monde ». Ma maison devant le monde a toujours été celle-ci, une fenêtre ouverte sur la mer, où que ce soit dans le monde. Même si je n’en ai connu que très peu, outre celle-ci où je suis ce soir, elles font toutes plus que se ressembler, elles sont les mêmes.

Un autre écrivain, Suédois celui-là, a écrit devant cette fenêtre (cette fenêtre universelle) un roman qui m’est toujours demeuré en mémoire, moi qui ne sais plus lire de romans. L’écrivain s’appelait Wilhelm Möberg, et le livre « Mon instant sur cette terre ». Rien que ce titre démontre le pouvoir et la signification universels de ces fenêtres ouvertes sur un large horizon et une mer grondante. L’homme qui regarde à travers elles ne peut qu’avoir conscience de la brièveté de cet instant qu’il lui est donné pour contempler au dehors et au dedans de lui même.

Le héros de Möberg, si je me souviens bien, va d’un chapitre à l’autre de ce dehors à ce dedans. A l’extérieur, comme ici, les couleurs du ciel, les formes mouvementées et les bruits de la mer, les échos d’un village situé quelque part à ses pieds. Au dedans, le souvenir d’un frère mort à la guerre, emporté avant lui et soustrait à la perception même de la brièveté de « son » instant.

C’est devant cette fenêtre, sur la longueur de cette plage, que j’ai commencé à écrire, il y aura dans peu d’années cinquante ans. Relativement à ce que j’ai connu alors (les paroles littéralement dictées par une voix extérieure, ou plus justement, totalement involontaire et inattendue), je peux dire que je ne sais plus écrire. La vie réelle est trop pressante autour de moi pour que cette sorte de grâce trouve son chemin. Ou peut-être, tout simplement, est-elle tarie.

Comme chaque année, je m’interroge : reviendrai-je ici ? pourrai-je encore marcher loin le matin en attendant que la fatigue me ramène d’où je suis partie ? Toutes les années sont délimitées pour moi entre ma venue et mon départ de ce front de ciel et de mer. Toutes les années apportent et emportent en proportions différents. Certaines m’ont donné de la force, d’autres ont creusé des vides. Aucune à ce jour, ne m’a enlevé l’envie d’être.

La potemkinisation des clients de magasin

Pas d’humour à l’ump ? Me voilà prise, pas plus tard qu’hier, en flagrant délit de sous-estimation de ce groupe d’amis, facétieux et rieurs.

Le dernier en date : Luc Chatel, entouré hier dans un supermarché d’élues ump des communues voisines pour vanter les bienfaits des fournitures scolaires à prix basique. C’était l’an passé Nadine Morano, même date, même lieu, qui interrogeait des militantes, toutes enthousiastes, sur la réforme de l’allocation de rentrée scolaire, qui pourtant correspondait à un moins donnant de l’Etat.

Ces innocentes facéties sont à vrai dire un grand classique du « Mouvement Populaire ». Les bains de foule de Nicolas Sarkozy ? Savamment pris au milieu de militants dont la carte est contrôlée par les forces de l’ordre. Bordeaux a connu cela lors d’une visite à la chambre de commerce. Les grands discours publics ? Devant un parterre du même métal, non moins bien organisé, pointé, contrôlé.

On se souvient du regretté Ministre Potemkine. Pas à l’ump, celui-là, mais avouons qu’il l’aurait mérité. Il faisait monter en hâte des isbas proprettes le long des routes et des villages que traversait Catherine de Russie. Si une escale était prévue, on ajoutait quelques moujiks roses et gras, témoignant des bienfaits du règne de l’impératrice.

La rentrée s’annonce sombre ? Que nenni ! les « pops » sont là pour l’égayer !

Zéro pointé au projet de notation des Ministres

Parmi les plaisirs de la lecture des journaux des mois passés, celui de découvrir nombre de dossiers laissés en plan, d’affaires évoquées mais jamais menées à leur terme, et de grandes annonces qui ont fait florès et dont on n’entend plus parler.

De cette dernière variété, reconnaissons que les gouvernements Sarkozy sont particulièrement prodigues. Les ballons d’essai qui ont été pudiquement retirés et soustraits à la curiosité des journalistes par l’envoi d’une autre bombinette sont légion.

Parmi eux, l’annonce en grande fanfare il y a environ dix-huit mois de l’évaluation et de la notation des ministres. On allait voir ce qu’on allait voir. A chaque Ministre était fixé un « tableau de bord », à chacun serait appliqué « en toute transparence » une notation des résultats obtenus. La culture sarkozienne du résultat tenait là son fleuron.

Les mois ont passé. Le gouvernement a été remanié selon un jeu savant de chaises musicales qui tenait plus de l’inspiration du moment que de l’évaluation objective. Sur quelle appréciation, sur quelle note, MAM aurait-elle, par exemple, été déménagée du Ministère de l’intérieur à celui de la justice ?

Interrogé en septembre 2008, le premier Ministre avait d’ailleurs reconnu que l’évaluation chiffrée des Ministres s’était transformée « en un point d’étape sur la feuille de route confiée à chacun ». Le cabinet d’audit qui avait été embauché pour la notation (ou du moins qui devait l’être) a disparu du paysage. Les indicateurs que l’on avait soit-disant établi n’ont à aucun moment été transmis à la presse comme il avait été promis.

Dommage ! Les médias se seraient certainement beaucoup amusé de publier des tableaux d’honneur ou d’horreur, de distribuer lauriers ou bonnets d’âne.

En réalité, l’annonce n’était qu’une annonce, le projet irréaliste, comme, sous beaucoup d’aspects, cette culture du résultat qui relève plus souvent de l’intoxication que de l’objectivité.

Et si les Français se mêlaient à leur tour de noter à leur juste valeur les annonces du gouvernement et les résultats de sa politique ?

La réponse est simple : les Socialistes seraient au pouvoir pour dix ans. Il doit y avoir quelque part quelques chose qui cloche…

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel