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Week end d’été, côté people

Le moment où jamais d’avouer, dans la torpeur du week end le plus « off » de l’année. Autour de moi, ni Jaurès, ni Mosco, ni Martine, la haute pile des numéros spéciaux « collections » dont je m’offre un exemplaire ici chaque année depuis des lustres.

J’adore la mode. Ca y est, c’est dit. J’adore la mode, pas pour m’y conformer (je porte toujours la robe rouge de mon bac et la jupe plissée de ma thêse de médecine), mais pour la renifler, sentir derrière les couleurs et les formes un peu de l’air du temps, de la place de la femme dans cet air-là, de la manière de donner du style à à peu près n’importe quoi.

Résultat : une haute pile de « Vogue » ou de « L’officiel », depuis trente ou quarante ans, dont je feuillette toujours l’un ou l’autre, en plus de celui de l’année. Dans une autre vie (j’en ai déjà plusieurs de promises à mille activités), je serai chroniqueuse de mode. Le vocabulaire m’enchante, d’une époustouflante variété et il fait sans aucun doute partie de la mode, comme la maniière de nommer les plats fait partie de la cuisine. Dans les deux cas, c’est d’ailleurs mon point le plus fort. Rien que pour les chaussures, les mots rempliraient une armoire, avec chaque année de nouveaux venus. Pour les amateurs, j’annonce que cette année ce sont les « plates-formes » qui tiennent le haut du pavé.

Une surprise dans ma flânerie de fashion-victim d’un jour. Une interview de Carla Bruni, datant d’aout 2007 : « Je veux être mondialement célèbre et reconnue. Je sais, ce n’est pas facile, mais je ne travaille que pour ça. Mais attention, je ne veux pas être reconnue pour les raisons que l’on croit, je le veux pour des raisons aimables ».

Plus loin, en réponse à la question « Vous aimez faire partie du gratin ? »: « J’aimerais faire partie d’un certain gratin » (jusque-là, c’est gagné) « celui des gens très justes, très généreux, très bons » (ça se gâte un peu) « des gens qui savent tout le temps changer de vie » (attendons, donc). « Mais ce n’est pas vraiment le gratin, ça, car le gratin est lié à une position sociale. J’aimerais faire partie des gens qui n’ont aucun sens social ».

La phrase est suffisamment équivoque pour qu’on lui accorde quelque crédit.

De l’Hossegorois tardif

L’Hossegorois nocturne est une authentique plaie. Je parle de cette variété tardive, hantant cette partie de la nuit qui appartient déjà au lendemain. Celui-là, aux abords de mon océan, met tout son génie à en nier l’existence et à en couvrir le bruit régulier et profond comme la musique des astres elle-même.

Une plaie d’abord pour lui-même. Savamment rempli de mélanges d’alcool blanc, gin, vodka, calva et quelques autres, souvent relevés d’herbes ne poussant pas dans les Pyrénées voisines, cet Hossegorois-là est, après quelques heures, hors d’état de nuire, dormant sur la plage ou dans un ailleurs pleins de rêves troubles qui le tiennent abasourdi jusqu’à tard dans la journée suivante. Et l’en prive.

L’Hossegorois tardif, jeune en général, quelquefois très jeune, désesperement jeune, n’ est pas pour autant privé d’altruisme : prestidigitateur capable de transformer une nuit légère et pleine d’étoiles en l’atmosphère pesante d’une cave ou d’un club quelque part à Aubervilliers ou sur cette partie des quais de Bordeaux où les jeunes filles n’ont pas toujours l’étude pour seul souci, il tient à vous faire partager sa magie à l’envers. Cris, hurlements, tams tams, vous qu’une insomnie amenait là dans le sillage de Chateaubriand, vous voilà contraint ou à la communion vociférant, ou à une piètre retraite, abandonné aux noirs constats et aux interrogations éternelles « Je suis venu trop tard dans un monde trop jeune » …

Le poète disait « un monde trop vieux », mais franchement-là, au milieu de cette variété d’Hossegorois du 4ème type, ça ne colle pas…

Un autre poète, sur les paroles duquel Mahler a déposé d’inoubliables plaintes, interrogeait « O, homme, prête attention ! Que dit la nuit profonde… »

La nuit profonde, en juillet-aout, à Hossegor côté mer, ne dit rien. Médusée, terrassée, réduite à une contemplation consternée, elle qui depuis des siècles s’était accoutumée à être laa belle ténébreuse que l’on contemplait, celle à laquelle on écrivait des poèmes, la nuit profonde la boucle.

L’océan ne s’y résout pas. Et même s’il est difficile de l’entendre, il ronfle, il bougonne, il roule ses longues et hautes mécaniques qui se fracassent bruyamment à son bord, il ne désarme pas.

Au petit jour, l’Hossegorois tardif rendu à ses réalités, à ce mélange de déceptions et de renoncements qui fait qu’on ne sait plus vivre, l’océan reprend ses droits et débarbouille la plage à longs coups de langue.

De la variété des Hossegorois

Les promeneurs du matin ne sont pas des Hossegorois ordinaires. Amis de la plage quand elle est vide, arpenteurs de dunes quand seuls quelques gros chiens la dévalent et n’aimant devant eux sur le sable que les hiéroglyphes laissées par les oiseaux. Bref, ils sont tout au contraire des autres qui se pressent « en ville » quand eux tardent à rentrer de leur promenade et qui s’amassent sur le sable quand ils n’y sont plus depuis longtemps.

Le promeneur du matin a une autre plaisante caractéristique : il salue son congénère quand il le croise, comme autrefois les paysans sur les chemins de campagne. Bien souvent, il a un chien, tournoyant autour de lui, flairant en bord d’écume des relans de poissons marins, allant bruyamment saluer lui aussi tout ce qui jappe ou aboye à une demi-lieue à la ronde. Le promeneur du matin s’encquiert souvent de la race ou de la bonne santé du chien de l’autre promeneur, évoque un chien semblable qu’avait son grand oncle ou un autre encore qui se promenait avec lui avant d’être écrasé par un tracteur.

Le promeneur du matin connait depuis deux ou trois décennies une variété rapide : le joggeur du matin. Celui-ci ne bavarde pas, il souffre, les pieds demi-enfoncés dans le sable toujours trop mou pour ses performances, le regard fixé sur un point loin devant où certainement lui est promise une récompense visible de lui seul.

Le joggeur du matin, majoritairement masculin, n’est pas mauvais bougre pour autant et il est souvent joli garçon. Quoi que… Depuis que la mode s’est répandue de cette race éprise, sinon d’absolu, de rapidité qui comme on sait est toute de relativité, la joggeur du matin a vieilli, et les nounours soufflants et grisonnants sont de plus en plus nombreux entre les apprentis Carl Lewis.

Une variété nouvelle, rencontrée plusieurs fois cette semaine, est le joggeur du matin entrainant à ses côtés, en laisse ou pas, son chien qui pourtant aimerait si fort musarder d’un bris de lame à un autre canidé. Remarquons que l’inverse n’est jamais vrai et qu’aucun chien à cette heure n’a été vu faisant courir son maître à l’insu de son plé gré comme disait il y a peu un célèbre joggeur sur roues.

Au retour, le (ou la) promeneur du matin regarde du haut de la dune, tel le sage, la plage se remplir et la chaleur s’étendre lourdement.

Hasards de lecture

Parmi mes plaisirs d’été, l’un qui n’est pas si innocent : apporter par grands sacs les journaux que je n’ai pas pu lire pendant l’année, et les lire ici, aux hasards des sacs, sans regarder la date, que l’on devine d’ailleurs assez vite.

Quelle malignité à cela ? Modeste mais pas moins gourmande. Découvrir a posteriori les déclarations de l’un ou de l’autre, que les faits ont démentis, voir la rivière couler et emporter tant de cadavres qui ne sont pas même des ennemis, entendre l’actualité dévorer ses héros et les oublier en trois jours, pouvoir trier dans les pages ce qui perdu toute importance et au contraire garder ce qu’on n’aurais sans doute pas aperçu le jour même…

Tout cela donne en plus une grande impression de richesse : les journaux et magazines que je conserve jusqu’à l’été prochain ne sont pas les plus mauvais. L’abondance d’informations, le nombre de dossiers, de vrais reportages permet de mesurer notre chance. Une grande part de ce qu‘écrit la presse passe bien les semaines et les mois et me procure chaque année une grande encyclopédie du temps juste passé dont malheureusement j’oublierai beaucoup.

Il y a aussi les petites perles qui ne sont pas moins goûteuses après quelques mois. Un dossier « décryptages » du Monde, en date du 14 mai, était consacré à la Chancelière Angela Merkel. Celle qu’on appelle souvent, et sans doute à raison « la femme la plus puissante du monde ». Et au passage aussi la plus populaire des chefs d’Etat Européens.

Féministe à sa façon, Angela Merkel a ce mot « Je ne suis pas vaniteuse, je sais utiliser la vanité des hommes ». Le petit Nicolas lui fournit sans doute ample matière, mais au moins est-il prévenu.

Très belle, très nordique, la simplicité de son mode de vie. Avec son mari qui ne porte pas son nom et déteste la vie publique, elle habite toujours dans l’appartement que tous les deux occupaient avant d’être élue. « Au quatrième étage d’un petit immeuble gris, qui en compte cinq, vaguement gardé par deux policiers qui discutent le coup sur le trottoir et au bas duquel se trouve une banale taverne ouverte à tout vent’. Pour qui a vu la débauche de policiers entourer l’hôpital militaire lors de l’historique bilan de santé de notre Président cet été, quelle leçon ! Le terrorisme a bon dos en France pour cacher la peur constitutionnelle, irrationnelle d’un Chef de l’Etat, moins en vue pourtant, moins pesant dans l’équilibre du monde, que sa tranquille consoeur d’outre-Rhin.

Jeux en ligne : ça commence !

Menaces, provocations, ce dont nous avons eu un aperçu lors des auditions à l’Assemblée des opérateurs de jeux en ligne commencent à arriver au grand jour.

Jean-Michel Aulas, président de l’Olympique Lyonnais menace de faire porter à ses joueurs, dimanche au Mans, un maillot sponsorisé par son nouveau partenaire Betclic.

Qui est Betclic ? Tout le monde le connaîtra bientôt davantage que Coca Cola ou Redbul. Et même si ces deux-là ne sont pas très bénéfiques à consommer régulièrement, ils sont un élixir de santé relativement à l’utilisation de Betclic ou de ses homologues. Betclic est un opérateur de jeux en ligne, qui opère actuellement dans l’illégalité mais presse le gouvernement de manière quasi-comminatoire de faire voter la loi de légalisation des jeux en ligne.

Pourquoi ? Betclic et ses homologues n’ont pas un soucis excessif du droit ni de la justice. Ils (les représentants de l’un de ces homologues) nous ont d’ailleurs bien manifesté, lors des auditions, que « tout le monde savait où les trouver » mais que ce même tout le monde se gardait bien de les inquiéter pour leurs activités illégales. Autremant dit : on fait ce qu’on veut. Cette tranquillité à narguer la loi devant ceux-là mêmes qui sont supposés l’édicter n’est pas très éloignée des pratiques de la mafia.

Non, ce n’est pas le souci du droit, mais l’impatience à pouvoir faire de la publicité pour piéger un nombre chaque jour plus grand de gogos qui dépenseront en ligne l’argent que, bien souvent, ils ne gagnent pas et qui, pour beaucoup, détruiront leur vie en quelques semaines de mal être passées à cliquer comme on se drogue.

Eric Woerth, qui a rédigé la loi que nous aurons à voter dans quelques semaines, tonne dans le Journal du Dimanche contre la provocation de Aulas. « Je ne l’accepterai pas ! Je ne l’accepterai pas ».

On verra. En attendant, Betclic se sera offert une publicité gratuite sur le dos du Ministre qui a petite mine en assurant « la loi ne s’appliquera pas avant 2010 ! ».

Mais elle s’appliquera. Les désoeuvrés, les chômeurs que la crise va multiplier comme petits pains, les mal dans leur peau, les vulnérables, les gogos de tout poils, les pauvres à l’intérieur de leur tête, se feront plumer par les multi-nationales de cette drogue nouvelle, au moins aussi rentable que l’autre, et que notre gouvernement va faire légaliser pour des raisons qui ne sont que trop faciles à comprendre.

voir aussi « last exit to decline », billet en date du 8 juillet

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel