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Jaurès vivant

Le Parti Socialiste, les Socialistes eux-mêmes, sont de ces chênes qu’on n’abat pas. Ce qu »il n’a pas planté, nul n’a le droit de l’abattre ni de le déclarer mort.

« Nous avons tous quelque chose de Jaurès en nous » pourrait chanter un Johny de gauche, qui ne serait pas en Suisse, mais aujourd’hui à Carmaux. Celui-là, au demeurant, nous manque bien..

A Carmaux où l’on célèbre le quatre-vingt quinzième anniversaire de ce jour fatal où les petits vendeurs de journaux criaient dans les rues « Jaurès est mort ! ». Ou les gens s’interpellaient sans se connaître « Ils ont tué Jaurès ! Ils ont tué Jaurès ! »

« Mort pour la paix », mort pour que la guerre ait bien lieu, mort pour avoir voulu l’empêcher. Y a-t-il plus belle épitaphe ? Et avant cela, plus belle vie à construire une pensée pour le socialisme de son siècle et à l’incarner. A planter le chêne.

Quatre vingt-quinze ans, et combien encore jusqu’à celui où nous pourrons crier à notre tour, toutes querelles tues :

– « Jaurès est vivant ! »

ou encore mieux, où l’on criera dans la rue, pensant aux socialistes :

-« ils ont ressuscité Jaurès ! »

Terminal méthanier : une erreur grave

Alors que la France se désindustrialise, le secrétaire d’Etat aux transports Dominique Bussereau, suivi par le Ministre Jean-Louis Borloo, rejette le projet de terminal méthanier au Verdon.

En aout 2007, Dominique Bussereau avait déjà tranché. Elu de Saint-Georges de Didonne, commune qui fait face au Verdon, les raisons de son refus n’étaient que trop claires. A l’époque, son choixse portait sur La Rochelle, ce qui confirmait la nature électoraliste et non écologiste de ses motivations.

En tant qu’élue de Bordeaux et ardente défenseur de ce qui s’appelait alors le « Port autonome », j’avais pris une position publique pour dénoncer l’opportunité des déclarations du Secrétaire d’Etat, alors même que la concertation mise en place par la commission du débat public n’était pas même ouverte.

Une fois encore (on n’en a que trop d’exemples à Bordeaux), on concerte après avoir décidé.

Le Port autonome, depuis la loi sur les ports, est devenu « Grand Port Maritime ». Sa gouvernance a changé, ses équipements ont été transférés à des opérateurs privés. Son activité n’a pas augmenté pour autant.

Avec le rejet du projet de terminal, ce sont deux millions de tonnes de trafic et un milliard d’investissement que perd le port de Bordeaux. Et à terme le risque de voir La Rochelle le dépasser, voir même le risque d’un déclassement hors de la courte liste des grands ports maritimes Français.

La crise aggrave encore la décision ministérielle et ses conséquences. Elle va à l’encontre du plan de développement des ports Français qui était supposé sous tendre la loi de réforme portuaire du 4 juillet 2008.

Pour ma part, je viens d’écrire au Ministre pour le mettre en garde contre cette dégradation de la situation du Port de Bordeaux. Voilà un dossier que les Bordelais, inquiets de l’avenir de leur ville, doivent porter de concert .

voir dans la rubrique « rejoignez michèle à Bordeaux » ma lettre à Dominique Bussereau

Il suffit d’un jardin

Il suffit d’un jardin pour suivre la course du jour, de l’angle où le soleil apparaît à celui où il disparait, bien souvent prématurément, dérobé par les murs et les toits.

Si ce long mouvement ne fût pas ma seule activité du jour, il en fut le décor, je dirais presque le fond sonore. La multiplicité des visages d’un jardin au cours des heures est bien plus complexe que le seul changement d’éclairage qu’imprime sur toutes choses la course du soleil. Il y a la température, les odeurs qui montent ou qui décroissent avec elle, les bruits qui arrivent d’au delà des murs (presque aucun en de dimanche de coeur d’été). Il y a les activités que l’on ordonne en fonction de la chaleur, de l’énergie ou de la flemme du moment.

A la fin du dimanche, la semaine est déjà entamée. Quoiqu’il arrive, c’est déjà elle qui m’occupe, deux ou trois contrariétés, une masse de courrier, des rendez-vous et le travail « ordinaire » qui n’est jamais ni ordinaire, ni totalement prévisible.

Journée « belle comme le jour », comme on dit si justement. Belle, équilibrée entre faire et ne rien faire, entre le concret et l’un peu plus savant.

Il suffit d’un jardin… Mais quel privilège, supérieur à presque tous les autres !

Prison, Gradignan (III) : qu’est-ce qui a changé ?

Entre ma première visite à la prison de Gradignan, au lendemain de mon élection (2007) et celle de cette semaine, qu’est-ce qui a changé ?

Ce fût, le 19 juillet, lors de notre visite commune avec les deux Alain (Anziani et Rousset) la question d’un journaliste ; à laquelle, il ajouta « Et à quoi servent ces visites ? »

Essayons d’y répondre une deuxième fois et par écrit.

Au plan national, le nombre de détenus a augmenté de 5000 (68 000 contre 63), sans que des moyens supplémentaires, en termes d’éffectifs au sein des établissements, aient été donnés. Plusieurs lois ont été promulguées dont la « loi sur la récidive », allongeant les peines des condamnés dès la première récidive et augmentant mathématiquement le nombre d’incarcérés.

Heureusement, nombre de juridictions déployent tout leur talent à n’appliquer cette loi qu’en utilisant tous les moyens d’en contourner la rigueur. C’est le cas de Bordeaux, en tête de peloton en la matière, ce que l’on doit saluer. Mais quelle étrange loi dont les bienfaits sont liés au talent que les professionnels mettent à la détourner !

La loi pénitentiaire, votée au Sénat il y a quelques mois selon le régime de l’urgence (deuxième coup de chapeau au passage à Alain Anziani, responsable de la loi pour notre groupe, et à Robert Badinter : tous les deux ont obtenu des améliorations de la loi) demeure bloquée dans quelque étrange tuyau et n’est pas apparue encore à l’Assemblée. On nous l’annonce pour septembre. Espérons.

Plus généralement, la politique du gouvernement demeure incohérente. Les lois pénales, les prescriptions de la Ministre, vont au petit malheur la malchance à l’encontre de l’urgence de la situation des prisons. On comprend que le « petit » malheur » est souvent grand et que je n’ai utilisé l’expression qu’en miroir de son contraire.

A Gradignan, qu’en est-il ? Grâce à l’ouverture de la prison de Mont de Marsan (50 incarcérés « délocalisés » vers les Landes) et à la sagesse de nos juges, l’étau de la surpopulation s’est un peu désseré : 180% au lieu de 220%. Il n’y avait plus la semaine dernière de cellules de 7m2 abritant trois détenus au lieu de deux, c’est à dire plus de matelas par terre pour le troisième. Il y en avait 60 à 80 lors de mes précédentes visites.

Pour mémoire, je rappelle que la SPA exige 9 m2 pour l’abri d’un gros chien.

La « mise en peinture », ainsi que la désigne joliment le nouveau directeur, M Audouard, a beaucoup progressé : cellules jaune pâle, couloirs et escaliers bleu clair, c’est un progrès relativement à la masse de gris sâle que j’avais reçue en pleine figure lors de ma première visite. J’avais alors demandé à M Casagrande, le précédent directeur, d’utiler une petite partie de ses maigres moyens d’entretien du bâtiment pour ce coup de maquillage. Deux avantages : fournir de l’activité aux détenus (et un petit revenu), rendre le cadre moins triste et déprimant.

Je veux espérer que mon intervention a été pour quelque chose dans ce petit progrès : c’est une part de ma réponse à deuxième partie de la question du journaliste.

Pratiquement aucun progrès, par contre, sur l’état des fenêtres : vitres minces, bien souvent cassées pour obtenir un souffle d’air, les cellules sont dans ce bâtiment en forme de barre, caniculaires en été, glaciales en hiver. La chaleur de l’été, le soleil dehors donnant envie de grand air et de liberté, sont une des raisons de l’habituelle recrudescence des violences et des suicides pendant la « belle » saison. Ce sera une de mes demandes à l’administration pénitentaire et à la Ministre d’obtenir des crédits pour que des fenêtres assurant l’isolation, situées en avant des barreaux de manière à pouvoir s’ouvrir largement en été, puisse être installées dans les cellules.

Hors de cela, à quoi servent les visites d’élus ? D’abord, à les informer, à leur faire toucher du doigt une réalité qui, sans cela, resterait distante et théorique. Mais aussi à contribuer à informer le public, à faire changer les mentalités. Et surtout : à faire pression sur le gouvernement, à intervenir dans chaque situation où une amélioration peut être obtenue, à résister quand une loi stupide, n’ayant que la communication ou la réponse à un événement médiatique pour but, va à l’encontre de la situation des condamnés et des prévenus, des conditions de travail du personnel et du sens véritable de la peine.

Gradignan (II) : le travail du personnel pénitentiaire

A Gradignan, un surveillant chevronné, en poste au 4ème étage où se situe le quartier disciplinaire m’a dit comme une évidence : « un détenu heureux, c’est un surveillant heureux ».

Que l’on puisse être heureux en prison est discutable. Que l’on doive y être ni humilié, ni malade, ni désoeuvré, ni laissé sans préparation de sa sortie est une certitude. Et c’est cela que voulait exprimer ce surveillant : le personnel va mieux quand les détenus vont mieux. Et quand nous exigeons de meilleures conditions de vie et de formation en prison, c’est aussi pour le personnel pénitentiaire.

Les normes européennes sont, petits pas après petits pas, mises en place à Gradignan. Nous avons pu lors de notre visite en apprécier quelques effets, en particulier au rez-de-chaussée où a lieu « la mise sous écrou ». Mais ces petites améliorations des conditions matérielles d’entrée sont mises à mal quand, dans une seule nuit, 15 personnes sont amenées à la prison, doivent être reçues, informées, fouillées, avant d’être « écrouées ». C’est alors l’un ou l’autre du personnel de nuit qui se détache pour ces entrées. Leur nombre les rend hâtives et un point très important qui est le choix de la personne avec laquelle le nouveau venu sera encellulé ne peut être fait avec toute la réflexion et la prudence nécessaires.

La structure de Gradignan –une barre HLM de six étages- ne facilite pas le travail des gardiens. La descente à la promenade ou au parloir se fait par groupes par les escaliers. Les ascenseurs ne servent que pour les déplacements d’une structure ou d’un lieu à l’autre et, du fait de leur grand âge, il fonctionnent de manière assez irrégulière. Autant de contraintes pour les gardiens.

Les six étages sont séparés entre eux et non disposés en coursives autour d’un espace libre (comme on le voit dans les films) afin qu’un incident survenant à un étage soit aussitôt repéré par un surveillant d’un autre étage. Au quartier d’isolement, le surveillant dispose d’un petit bureau sans fenêtre de 2m05 de hauteur sous plafond où ni vous, ni moi n’aimerions travailler.

Un des gardiens m’a expliqué qu’il parlait beaucoup avec les détenus. Il le tenait pour le plus important de sa mission et c’est aussi sans doute ce qui l’aidait à l’accomplir avec foi.

On ne dit pas assez que la bataille des conditions de vie en prison, de la formation et de l’occupation des détenus, c’est d’abord le personnel pénitentiaire qui la mène, et ceci en tenant compte de l’obligation de réserve liée à leur statut. Pour ma part, je la mène aussi pour ces femmes et ces hommes, à tous les échelons, qui ont non seulement un mêtier difficile mais un mêtier dont la difficulté augmente chaque année.
A lire également sur la page Bordeaux : « Michèle Delaunay visite la maison d’arrêt de Gradignan »

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel