m

L’adieu aux armes

C’est de manière lourdement symbolique la veille de la fête d’un fleuve désormais vide qu’à été dissoute l’Ecole de Santé Navale.

Sans excès de faste, ni grand concours de peuple : ordre avait été donné de réduire les invitations au strict minimum et les Bordelais ont été ainsi privés d’accompagner ce moment poignant où le glorieux drapeau de l’Ecole a été déposé, roulé et emporté à destination d’un musée parisien où il ne prendra plus que la poussière. Aucun des milliers de Bordelais qui avaient signé la pétition de défense du site de Bordeaux n’avaient été même prévenus. Santé Navale a rendu les armes sans que ces Bordelais soient aux côtés des élèves et de tous les personnels, désormais invités à se reclasser, mais écartés de ce moment.

La cérémonie a été sobre, presque austère, comme il convenait. La dernière promotion a défilé pour une dernière revue du dernier médecin général, Gilles Coutant. Un discours sans fioritures a relaté l’histoire de l’Ecole, son engagement dans toutes nos guerres où sont tombés 300 de ses élèves. Tous avaient le coeur serré.

L’Ecole a marqué la médecine de quelques grands noms, de nombreux professeurs de notre Université de Bordeaux, mais peut-être plus encore de milliers de médecins qui ont porté sur tous les théâtres d’opérations, dans les villages les plus reculés d’Afrique ou d’Asie l’image de notre ville et celle de la France. Je n’ai jamais écouté de témoignage négatif de la présence des Navalais, du Mali au Cambodge, de la brousse aux instituts Pasteur qu’ils ont fondés. J’ai apprécié en direct ce que mes copains de la « colo », comme on disait, on fait sur le terrain, chaque fois qu’ils revenaient d’une affectation. J’ai vu sur le terrain la suite de ce qu’ils avaient construits ou implantés. Je défendrai Santé Navale même après Santé Navale et désormais j’en porterai l’insigne aussi souvent que possible.

Un moment extrèmement pénible a précédé la cérémonie : nous attendions dans une salle l’heure précise de début. Une douzaine de généraux, quelques officiels civils. Alain Juppé, dans une totale inconscience de ce que tous ressentaient, a commencé à vanter ses projets pour le site de l’Ecole : ici, une grande percée, là un parking, là un hôtel… Les militaires étaient changés en statues de sel, nous nous taisions tous. Nous savions pourquoi la gloire d’une Ecole, le rayonnement d’une ville et son avenir scientifique avaient été sacrifiés.

Ce matin dans Sud Ouest : un immense titre et une photo occupant les trois quarts de la première page « la fête qui fait chavirer la ville »; plus haut dans un tout petit cadre « Santé Navale baisse pavillon ». Le Maire sera content : sa hiérarchie pour notre ville est respectée.

Ouverture du mariage aux couples de même sexe : 222 voix pour, dont la mienne

je viens de voter l’autorisation du mariage aux couples de même sexe. C’est une décision réfléchie, qui n’est pas allée sans interrogation en particulier sur un point : de nombreux homosexuels se réclament d’une transgression (la gay pride en témoigne, au moins pour une part des participants), ce qui vient en contradiction de la réclamation du droit au mariage « comme tout le monde ».

Une réflexion l’a emporté. Le législateur établit le droit et le droit suppose l’égalité. Le mariage est un acte civil, établissant un certain nombre de droits et de devoirs dont ceux qui le concluent doivent être informés ; ces droits et devoirs doivent être les mêmes pour tous. Le mariage civil n’est pas fondé sur une « essence », c’est un contrat et en particulier la procréation n’est pas en cause. Pour cette raison d’égalité j’ai voté cette proposition de loi.

Résultat : 293 voix contre, 222 pour, ce qui ne constitue qu’une différence assez faible. Le mariage des couples de même sexe attendra encore un peu. Rappelons qu’il est inscrit dans le projet socialiste.

Une vision de la métropole

« La géographie prime toujours sur l’histoire » disait mon père, prof’ de l’une et de l’autre et passionné des rapports adultères de ces deux belles maîtresses de notre avenir.

« Maîtresses », pas tout à fait bien sûr. Mais là aussi le précepte peut servir : nous n’avons de chance d’imprimer durablement l’histoire qu’en mettant la géographie à profit.

Les passionnantes rencontres de « La fabrique métropolitaine » initiées à Bordeaux par Vincent Feltesse viennent de s’achever. J’y ai participé chaque fois que possible avec cette idée toujours en tête. Nous devons parcourir le monde (ou le faire venir chez nous pour écouter ce qu’il nous apprend) mais c’est NOTRE métropole qu’il faut construire avec le soucis de sa spécificité qui fera que l’on viendra la voir de loin et qu’on aura envie d’y habiter.

Bordeaux, comme son nom l’indique, est bienheureusement dotée d’un fleuve, d’un estuaire, d’une côte très proche, d’un climat amicalement tempéré, ni trop pluvieux, ni heurté, bref ni trop atlantique ni continental, comme qui dirait parfait en ces temps de réchauffement climatique où bien d’autres s’inquiètent avec raison. La côte Aquitaine est la Californie de l’Atlantique : curieux comme nous sommes timides à le dire.

Dans ce contexte deux questions se posent : doit-on concevoir une métropole circulaire, rayonnant autour de son centre historique, ou doit-on la laisser s’évader ici vers le fleuve et l’estuaire, là vers la côte ? Je revois Vancouver, Los Angeles ou San Diego : oui, j’ai envie de voir les planches de surf, rangées comme des vélos, au pied des labos. Il y a un héliotropisme pour les pays, qui amènent les populations vers les côtes et vers le sud, doit-on interdire qu’il y en ait un pour les villes ?

Une autre question (qui n’est pas sans lien) est celle de la densification urbaine. Vertu écologique universellement reconnue car elle économise les déplacements, n’est-elle pas déjà un peu de l’écologie d’hier ? L’écologie de demain doit être d’abord une écologie humaine : à quoi bon sauver la planète, si l’on ne pense pas un peu aussi aux hommes qui l’habitent et qui sont guettés par pires maux ? Ceci surtout quand les déplacements « propres » se multiplient et se développent et que nous avons aussi un devoir d’aménagement du territoire. Non, je ne souffrirais pas de voir la LGV connectée à une ligne rapide desservant la côte, une autre longeant la Garonne, et permettant aux entreprises comme au développement urbain de prendre un peu leurs aises.

Ouaf ! Je vais me faire massacrer : n’est-ce pas le spectre du BAL (Bordeaux-Arcachon-Libourne) que je suis entrain de réveiller ?

La densification urbaine a un autre défaut, et nous en avions convenu lors d’un colloque à son unanime célébration : tous les orateurs étaient eux-mêmes possesseurs d’un jardin. Moi compris, mais justement je la bouclais.

Tout le monde, absolument tout le monde s’accorde sur les vertus d’un contact familier avec la nature (on dit maintenant : l’environnement, la nature est devenue ringarde comme un vieux clou) et certains qui ne perdent pas le nord et y voient une occasion de profit initient désormais des stages de « jardinothérapie ». Mais soyons plus simples : qui n’a envie que ses enfants tapent du balon dans leur jardin quand ça leur chante, y voient pousser les graines qu’ils y ont planté et aillent arracher une salade pour y découvrir le goût de manger des légumes ? Qui ne sait pas que ces modestes activités constituent sans doute la meilleure thérapeutique préventive au désarroi urbain, à la séparation des générations et à la perte des repères ? Pourquoi ceux qui s’exprimaient à ce colloque l’avaient-ils voulu pour leurs enfants et le refusaient-ils aux enfants futurs ?

J’entends, j’entends, qu’il y a des parcs publics, des jardins partagés dans les villes (à Bordeaux, plutôt dans les quartiers chics où les habitants ont déjà des jardins !) mais ce que j’exprime reste si vrai que des riverains soulèvent aujourd’hui le bitume qui borde leur maison pour y faire pousser des graines qu’ils glissent comme un secret dans l’interstice et vont surveiller tous les jours…

Non, je ne suis pas pour une ville pavillonnaire, ennuyeuse comme un bonnet de nuit, uniforme, étalée sur des kilomètres, chacun refermé sur sa petite propriété. Mais je veux que l’entreprise puisse se développer dans la métropole le long des voies et des fleuves, en direction des côtes, qu’on puisse s’installer à côté ou même y venir travailler en bénéficiant d’un transport collectif rapide. Bref, que la métropole amorce cette « biological valley » qu’à tous les sens du terme (des labos et des entreprises de biotechnologies et une qualité de vie « biologique » c’est à dire naturelle) que doit être notre région.

Taxation des oeuvres d’art : ce n’était qu’un rideau de fumée !

Hier, en séance de nuit, le député ump Marc Le Fur, a retiré son amendement après nous avoir baladé deux heures en belles proclamations d’équité fiscale.

L’amendement le Fur, dont nous avons ainsi découvert qu’il n’avait été avancé que pour occuper la galerie, et en particulier la galerie médiatique, visait à inclure les oeuvres d’art dans le calcul de l’ISF. Cette proposition, à la condition d’en définir les limites, était justifiée ; elle était même impérative si l’on considère les plus-values sur les transactions sur les oeuvres d’art et la bulle spéculative que constitue le marché de l’art.

Quel était l’objet réel de cet amendement ? Détourner l’attention du solde de la réforme fiscale (perte de revenus pour l’Etat au profit d’une baisse de l’imposition des plus riches) ; ça a marché jusque-là mais la discussion ne fait que commencer, nous saurons nous faire entendre dans les jours à venir.

Qu’ai-je appris pendant ces 4 années de législature ? Que la politique de Sarkozy n’est que de la stratégie, C’est un vaste jeu de coups pendables qui peuvent aller très loin. Espérons que dans une affaire récente, nous saurons un jour toute la vérité, non seulement des agissements de DSK, mais de tout ce qui a pu se situer en amont. Ce n’est pas la plus légère des inquiétudes.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel