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Y’a du boulot !

Titre de Sud ouest aujourd’hui pour annoncer l’ouverture de la grande exposition d’arts ménagers de Bordeaux ;

« Conforexpo : 50 ans au service des femmes »

Et alors ? Les hommes, ils ne se servent ni du réfrigérateur, ni de la machine à laver, ils ne font pas même une omelette à la maison ?…

Oui, je sais, bien moins qu’il faudrait. Mais c’est pas une raison pour pérenniser l’image de la fée du logis.

La magistrale ânerie des cigarettes « bio »

Alors que la consommation de tabac repart à la hausse, des marchands en quête de gogos durables lancent la cigarette « bio », élevée sous la mère, garantie sans pesticides, ni colorants, bref, le poison propre.

Le souci permanent des marchands de tabac est de compenser la baisse globale du nombre de fumeurs des dernières décennies par un élargissement du marché et, sans amalgames hâtifs, leurs cibles privilégiées sont les Asiatiques, les femmes et les pauvres. J’y reviendrai.

Ils viennent de lever un nouveau lièvre : le consommateur « durable » que l’on peut gruger en lui ventant la fraîcheur de la feuille élevée en plein air pour lui faire oublier le goudron produit en la faisant brûler. Pour ma part, je l’avoue, j’aimerai deux fois plus José Bové et ses faucheurs volontaires quand ils déborderont sur les champs de tabac. Non pas que ces innocentes plantes comportent en elles-mêmes le moindre risque mais parce qu’elles fournissent à l’homme une arme incomparable de destruction massive. Une tempête ferait en France 70 000 morts, nous en resterions sidérés d’effroi. Les morts du tabac, pourtant ô combien dramatiques, font moins couler d’encre que les colorants et autres pesticides qu’il faudrait manger en tartines entières pour encourir un millième des risques du tabac.

Je reviens aux cibles des marchands et en particulier à deux. Les femmes sont les premières et avec succès. Une femme sur quatre fume tous les jours, une femme sur trois dans la tranche d’âge 45-54 ans alors que les risques sont plus grands encore pour elles que chez les hommes. Le taux de mort par cancer du poumon des femmes de 40 ans a été multiplié par quatre de 1984 à 1999 alors qu’il baissait de moitié chez les hommes. C’est aujourd’hui, globalement, le cancer qui augmente le plus en fréquence et comme on sait, c’est aussi un des plus efficaces et des moins recommandables.

Les pauvres ? Comment cela, alors que le prix du tabac ne cesse d’augmenter ? Eh bien tout simplement parce que, quand on est pauvre et chômeur, il est encore plus difficile d’arrêter. Combien disent « je n’ai plus que cela » et anesthésient leur souffrance avec cette sorte pause qui fait un instant dire « pouce » que constitue la cigarette. Les marchands de tabac et les vendeurs d’addiction sous toutes ses formes sont sans limite dans leur intérêt pour les plus vulnérables.

Que faire ? Interdire le tabac alors qu’il pourrait n’être qu’un plaisir comme un autre s’il était occasionnel ? Notre société n’y est pas prête. Les mouvements écologistes, curieusement, se désintéressent du problème, alors qu’il devrait être en tête des préoccupations autant sanitaires que sociales.

Interdire toute forme de publicité ? Même déguisée comme l’imbécillité des cigarettes bio : oui, certainement oui. En augmenter encore le prix alors qu’on sait que certains y engloutissent jusqu’à 20% de leurs revenus. Oui, encore une fois oui, même s’il faut là aussi un certain courage politique qui n’est généralement, lui, pas durable (Mme Bachelot avait promis une augmentation de 10% par an…).

Déplacer aussi la culpabilisation. Les coupables ne sont pas les fumeurs mais les vendeurs. Je ne parle pas du bureau de tabac du coin, mais des majors companies qui continuent leur lobbying et multiplient les artifices de vente.

Al, Nicolas, José, Jean Louis et les autres, sauver la planête, OK, c’est pas mal. Mais 5 millions d’humains ordinaires et à priori sympathiques, chaque année, cela mérite qu’on y pense…

Bataille pour l’AME

Forte offensive des députés de droite, lors de la discussion en séance du Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale, contre l’Aide Médicale d’Etat dont peuvent bénéficier les étrangers en situation irrégulière dont les ressources sont inférieures à 634 euros par mois.

Un amendement de Dominique Tian, député ump de Marseille visait, entre autres limitations, à restreindre les soins donnés au titre de cette AME, aux « soins d’urgence, ayant un caractère vital ».

Qu’est-ce qu’un « soin d’urgence » ? Et qui le définira quand le malade se présentera ? Nous avons été nombreux, dont certains députés de droite, à poser ces deux questions sans y trouver de réponse satisfaisante.

Un malade se présentant en service d’urgence avec une forte fièvre et des frissons relève-t-il de la catégorie décrêtée par Dominique Tian ? Il peut avoir la grippe ou une tuberculose avancée, mais justement on ne le saura que quand on aura pratiqué les premiers soins et une batterie d’examens.

J’ai raconté en commission le cas assez spectaculaire d’une patiente que j’ai suivie en dermatologie (on va découvrir pourquoi). Elle s’était présentée avec une fièvre, une baisse de l’état général et un nez qui coulait. Relevait-elle des soins d’urgence ?

J’ajoute que cette malade travaillait dans une usine de yaourts. Qu’est-ce que ça vient faire là ? Eh bien, c’est justement très important et même Dominique Tian en a convenu. Nous avons découvert que ma malade, qui au départ n’avait pourtant pas l’air trop atteinte, avait la lèpre. Maladie, relevant de la dermatologie mais qui se transmet en particulier par le jetage nasal et que la jeune patient distribuait donc largement du bacille de Hansen dans tous les yaourts de Charente.

L’urgence n’était donc pas que pour elle. Un dramatique oubli du député Tian est que le soin aux étrangers constitue, en plus d’un devoir humanitaire, une obligation de santé publique.

Le deuxième objectif des députés de droite était de ne plus faire bénéficier de l’AME les collatéraux du patient. Dans le cas évoqué, non seulement nous en avons fait bénéficier ceux qui étaient en France, mais les très proches qui étaient restés dans leur pays d’origine. Nous avons ainsi pu éradiquer un foyer de lèpre totalement ignoré. Un peu cher sans doute, mais humainement plus utile que presque toutes les actions dont peut s’honorer un député.

La gauche a gagné sur un point : plus de restrictions dans le type des soins. A l’inverse, leur bénéfice est désormais restreint aux conjoints, ascendants et descendants directs. Reconnaissons que cette restriction est en partie théorique : si un cousin du malade se trouve déjà en France, il a lui-même également droit à l’AME.

Autre point sur lequel nous avons ferraillé : le droit d’entrée de 30 euros annuels pour bénéficier de l’AME. C’est une somme insignifiante au regard du coût des soins, qui est supposée « correspondre aux frais de constitution des dossiers ». Dossiers qui seront faits de toutes manières et bien sûr sans embauche particulière de personnel. Inutile donc pour l’Etat.

Mais cette somme est aussi dramatiquement élevée quand on a des ressources inférieures à 600 euros. Le principe est le même que pour les franchises médicales : voilà une mesure qui ne pénalise que les plus pauvres et restreint leur accès aux soins alors que ce sont eux qui en ont le plus besoin.

Au total : la bataille n’a pas été pour nous totalement perdue, mais la part de victoire de l’ump ne la grandit pas.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel