Un article de Libé, intitulé avec bonheur « Vide fait, bien fait » (19 août) m’a suffisamment interpellée pour que j’aille farfouiller dans les blogs et les sites tournant autour du sujet.
Le sujet, moitié frivole, moitié posant de vraies questions, tourne autour de l’interrogation « Avec combien d’objets vivez vous ? ». Il m’a aussitôt précipitée dans un souvenir très marquant. C’était dans un village du Burkina, une poignée de cases où vivaient des familles entières. Dans chacune, moins de 5 à 10 objets. Une grande calebasse, une cuillère de bois, une sorte d’amphore de terre pour conserver l’eau. Dehors le soleil qui tapait comme sur une enclume et dedans, rien.
Il y a loin entre les photographies ou les films et la perception totale, brutale, d’une situation. Il en est ainsi du dénuement de l’Afrique. La question posée par Libé se double d’une autre : combien d’objets faut-il pour vivre ?
Les adeptes du « 100 things challenge » cherchent à y apporter une réponse occidentale. Il ne s’agit pas seulement d’acquérir le minimum mais de se débarrasser du maximum et de réduire à cent les objets que l’on possède. Inclus, tous les objets personnels, de l’ordinateur portable à la brosse à dents (avec son dentifrice) et aux chaussettes (par groupe de trois paires). Exclus, les biens partagés par la famille, si famille il y a : table de repas, frigo, bibliothèque … tous cependant revus selon les critères du minimalisme.
Il est intéressant de noter que tous les protagonistes internautes de ce nouveau mode de vie sont des hommes. Pour les femmes, avouons-le, le pari ne semble pas très réaliste. La moindre trousse de toilette, la plus petite penderie, le simple contenu d’un sac de ville compromettent radicalement les chances de ne pas outrepasser le nombre fatidique.
Je propose pour elles des aménagements : compter la trousse de toilette pour une unité, admettre les chaussures par groupe de 4 et les vêtements par catégories… A quoi l’on voit que je suis totalement de parti pris. J’assume.
Mon score ne serait en tous cas pas très favorable. La difficulté à jeter, le goût de la théorie des ensembles appliquée aux objets (ce qu’on appelle vulgairement collectionner) m’ont atteint très tôt, mais je me soigne avec de plus en plus d’efficacité. L’obligation de me déplacer chaque semaine m’a appris à faire des listes de ce qui est essentiel et à m’y tenir. La leçon est loin cependant d’avoir gagnée la partie casanière de la maison.
Il n’est jamais mauvais de débattre, surtout quand on n’est pas sûr d’avoir raison. Il n’y a pas que des vertus à cette nouvelle morale. D’abord est-elle bien écologique ? Car il s’agit non seulement de peu consommer mais de se débarrasser, de jeter à tout va, comme en témoigne le leitmotiv « Get rid of that crap ! » (« Débarrassez vous de ces saletés »), ce qui réduit à néant la possibilité de réutiliser, réparer, réinventer et de s’adonner au « vintage ».
Et puis il y a des objets qui aident à vivre. Amicaux à la main, plaisants au regard, familiers. J’ai comme ça tout un petit clan d’amis fidèles sans lequel j’écris moins bien, je me trouve plus moche, rien en tout cas qui incite à l’action et au dépassement de soi.
Sujet frivole en effet. Sujet d’été ou de week end qui m’a donné l’occasion de réviser mon anglais familier et de me sentir quelque part sur la west coast. Dans un pays où on bouge, on pose des questions et où on cherche à faire, même mal.