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Micro-partis : autant de possibilités de contourner la loi.

L’affaire Woerth est une longue pelote qui déroule bien des surprises. L’une est la génération spontanée de plusieurs dizaines de micro-partis, à tropisme ump largement prédominant, dont le principal objet est le financement de l’ump et de ses candidats.

Autant de petites rivières qui viennent nourrir le grand fleuve financier dont ce parti s’est fait une spécialité. Rien d’illégal : la loi est seulement contournée et l’esprit de la loi trahi.

De quoi s’agit-il ? De petits partis destinés à soutenir l’action ou à promouvoir les idées de personnalités politiques sous l’entête d’un beau sigle. Nicolas Sarkozy, comme d’hab, a été un des premiers à la manoeuvre avec son ASANS (Association de soutien à l’action de Nicolas Sarkozy) . Eric Woerth (ASAEW), Laurent Wauquiez (Oxygène), sont bien placés dans le sillage présidentiel, le dernier ayant eu le bon goût, en pleine affaire Woerth d’aller demander des subsides lors d’un dîner d’affaires à Londres, dîner qui était inclus dans un déplacement officiel.

Pourquoi est-ce si grave ? En raison de deux principes simples et malheureusement toujours vérifiés : – c’est le candidat qui dispose des plus gros moyens financiers qui l’emporte – l’argent va préférentiellement au pouvoir et aux candidats en place : le sur-financement est donc une machine à la perpétuation des pouvoirs en place. – les gros financements lient les mains des politiques une fois élus.

L’exemple de ce troisième principe est le bouclier fiscal : promesse faite aux gros donateurs du premier cercle, il est pour cela, en pleine crise, un principe intouchable. J’entends bien qu’il n’est pas du tout sûr que, même indépendamment du premier cercle, Sarkozy ne l’aurait pas mis en place, ou aurait eu la moindre vélléité d’en soulever le couvercle. La proximité de la droite et des milieux d’affaires pourrait y suffire. Seulement si de gros chèques ont été faits sous promesse de retour sur investissement, les cordes qui lient les mains des élus n’en sont que plus grosses et plus serrées.`

Plus profondément : s’il faut des moyens à une campagne électorale, il faut que ces moyens restent dans un ordre raisonnable pour que le débat politique ne devienne pas que le concours du plus gros portefeuille. Nous devons protéger la politique des excès d’argent et des excès que permet l’argent.

Demain à l’Assemblée où je vais trois jours travailler sur le projet de réforme des retraites, je vais essayer de réunir des députés autour de l’idée d’une proposition de loi limitant les possibilités de détourner la loi sur le financement des partis politiques et des campagnes électorales. C’est possible ne serait qu’en limitant à une par donateur les contributions à un parti politique et en maintenant le plafonnement à 7500 euros.

La loi, on la respecte ou on la change. Et c’est le rôle de chaque député d’y veiller.

Un héros de notre temps

Ce n’est pas à Bernard Giraudeau, ni à ses semblables dans l’épreuve que pensait le poète Lermontov en intitulant ainsi un court roman. C’est à ce titre de roman au contraire que j’ai si souvent pensé en soignant, en connaissant chaque jour davantage tant de cancéreux graves qui vont de rechutes en traitements lourds avec un héroïsme discret et anonyme qui a toujours forcé mon admiration.

Je ne connais pas le détail de l’épreuve de Bernard Giraudeau et je ne l’ai en rien partagée. Dix ans depuis le diagnostic d’un cancer du rein, quatre récidives et autant de longues séquences thérapeutiques. J’ai seulement écouté un interview de lui, il y a quelques semaines à peine. Il s’exprimait avec une ludicité, une connaissance de sa maladie et une élégance qui m’ont fait une fois de plus évoquer le héros de Lermontov.

Les traitements du cancer du rein qui comportent souvent des biothérapies par interleukine sont difficiles à supporter. Plus difficile encore, et ceci quel que soit le cancer quand il se complique, est la suite d’épreuves que constitue chaque récidive, l’attente des résultats des examens qui les découvrent, la mise en oeuvre d’un traitement, puis d’un autre quand il ne marche pas, ce feu incessant de l’ennemi qui a incontestablement quelque chose à voir avec la guerre.

Dans cette bataille de plusieurs années, quelquefois dix comme pour Bernard Giraudeau, quelquefois bien davantage, nombreux, très nombreux sont les malades qui font preuve de ce que je n’hésite pas à qualifier d’héroïsme. Nul ne sait s’il a en lui cet héroïsme, non plus que les militaires ne connaissent pas à l’avance leurs réactions devant le feu, non plus qu’aucun citoyen ne peut dire s’il aurait été résistant ou s’il aurait tenu devant la torture. J’ai rencontré pour ma part de véritables héros, non seulement par leur courage, mais par l’élégance avec laquelle ils l’ont manifesté, leur attention à leurs proches, leur volonté de n’en rien montrer, d’assumer leurs engagements ou de conduire leurs affaires. Quelquefois, de continuer à soigner leurs malades.

J’ai évoqué un jour cet héroïsme avec un militaire. Il n’avait jamais connu l’engagement direct en « opérations » , comme on dit maintenant, mais il s’est conduit en face d’une maladie particulièrement éprouvante par le nombre de tumeurs visibles sur son corps, comme un de ces héros. Il m’avait dit, comparant au courage militaire : « Sur le champ de bataille, on risque sa vie ; dans la maladie, on cherche à la sauver ». Lui, ne cherchait plus à la sauver, il savait et voulait seulement être ce « héros de notre temps ».

Hommage donc. A lui, à Bernard Giraudeau pour tous les autres auxquels je pense, non pas toujours, mais toujours intensément.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel