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APL and Co

Il était très remarquable (au sens littéral) d’examiner le visage et l’expression d’Emmanuel Macron quand il est intervenu pour demander aux propriétaires de baisser leurs loyers de 5 euros.

L’affable, le candidat radieux et souriant, était devenu un maître d’école un peu revêche. Cela n’aurait pas bouleversé l’accueil fait à cette proposition, mais un brin d’humour, de cordialité, deux brins de pédagogie (« est-il illégitime de demander aux propriétaires, disposant globalement de plus de moyens) de participer à l’effort en faveur de ceux qui en ont le moins) auraient sans doute adouci la sanction de l’opinion.
Peut être, également, une concertation avec les groupements de propriétaires, mais plus encore avec les bailleurs sociaux, en amont des mesures, eût pu avoir meilleure presse. Par exemple : on diminue les APL de 4 euros, vous diminuez les loyers de 2..
Cela a cependant quelque chose d’un peu mesquin, mais aurait au moins évité l’impression qu’Emmanuel Macron « externalisait » la mesure d’économie prise par le gouvernement. Et aussi, l’impression que tout cela était un peu bricolé..

Il n’y a que celui qui ne fait rien qui ne fait pas d’erreur. Mais quand une mesure touche 6,5 millions de Français, mieux vaut aller moins vite et y regarder à deux fois…

Non cumul des mandats dans le temps : que devient la promesse de Macron ?

Même si l’interdiction du cumul dans le temps au delà de 3 mandats successifs identiques a piteusement disparu -en même temps que Bayrou- de la loi « confiance et modernisation de la vie publique », il est curieux que cet interdit ne soit pas un instant évoqué dans le grand papier de @sudouest consacré ce jour à une possible nouvelle candidature d’Alain Juppé à Bordeaux en 2020.

Premier mandat en 95 : en 2020, aura donc accompli 24 ans de mandat. Non, je ne fais pas d’erreur de calcul : il a été un an éloigné de Bordeaux pour inéligibilité, ce qui a valu aux Bordelais une élection municipale supplémentaire (2006) à l’occasion de laquelle Juppé a d’ailleurs promis qu’il serait l’homme du mandat unique.

L’opinion publique est très majoritairement favorable à ce non cumul dans le temps, machine à fabriquer des potentats locaux inamovibles. Cela Alain Juppé lui même ne peut l’ignorer. Qu’il ne « s’exprime pas avant 2019 » est de bonne guerre : si c’est oui, tous les aspirants vont faire grise mine, si c’est non, Juppé lui même comptera moins et dans ses rangs les « conspirants » feront rage.

Mais de quelle élection s’agit-il ? de l’élection municipale ? de l’élection à la tête de la métropole, laquelle gagne chaque jour en importance ? La messe n’est pas dite de ce point de vue non plus. Comme Emmanuel Macron a fait disparaitre le non cumul dans le temps, il peut faire apparaitre l’élection au suffrage universel des Conseillers métropolitains ..

Derrière le Brexit, le risque de réveiller le serpent qui dort

Commentateurs et journalistes se focalisent le plus souvent sur l’impact commercial et financier du Brexit. Il n’ont pas tort, le recul qu’il constitue pour les échanges internationaux et en premier lieu européens, risque d’être du modèle  « perdant/perdant » pour toutes les parties. « Perdant » pour la Grande Bretagne qui d’ores et déjà affiche un recul de sa consommation et de son PIB, « perdant » pour les pays de l’Union Européenne et pour ce qui nous concerne, de la France avec laquelle elle entretient des rapports commerciaux dynamiques et bénéfiques aux deux parties. Ainsi, le Royaume-Uni est le premier des pays avec lequel la France enregistre une balance commerciale positive.

Mon sujet n’est pas ici de parler des Britanniques, bienvenus en France et particulièrement dans notre Nouvelle-Aquitaine. Non plus, des Français installés outre-manche. Londres est la sixième ville française et permet à nombre de ceux qui la choisissent de trouver des emplois et des carrières qui leur sont refusés en France. Pour ceux-là aussi, « perdant perdant ».

Le poison venimeux qui risque de bouleverser le Royaume jusque-là Uni est pourtant d’un autre ordre . Ce poison potentiel est celui d’un petit serpent sillonnant -actuellement sans heurt- le tiers nordique de l’Irlande : la frontière entre l’Irlande du nord et celle du sud. Aujourd’hui, sans postes de contrôle, sans frais de douanes, ce serpent endormi permet, dans l’honneur, à tous les Irlandais de se sentir citoyens européens. Qu’ils soient du nord ou du sud, protestants ou catholiques, ils vivent et ils commercent ensemble sans faire rougir leurs ancêtres, lesquels ont versé tant de sang dans cette guerre cruelle qui a enflammé ce pays pendant un siècle.

Cette frontière de 360 km, aujourd’hui bienheureusement invisible, sépare deux provinces de cette terre d’histoire, lesquelles se trouvent constituer aujourd’hui deux pays ; l’un au nord, le plus petit, est partie intégrante du Royaume-Uni. L’autre, au sud, constitue un état indépendant, membre de l’Union Européenne et désireux de le rester.

Depuis 2005, et conformément à l’accord historique dit « du Vendredi saint » en 1998, tout barrage, toute frontière douanière ont disparu tout au long de la frontière. Les villes qui y sont situées ont retrouvé leur dynamisme économique d’antan et de nombreuses usines et communautés agricoles sont implantées de part et d’autre et prospèrent sans heurt.

Problème, on ose dire même drame potentiel, le Brexit risque de faire de ce paisible serpent de 360 km, un animal venimeux, ravivant les haines et les conflits du siècle dernier. Il est en passe en effet de devenir la seule frontière terrestre du Royaume-Uni avec l’Union Européenne, ce qui le condamne à dépendre des accords commerciaux et douaniers entre l’Union et le Royaume-Uni et qui, en l’état, ne lui permettra pas de maintenir une frontière ouverte.

Le Brexit ne divise pas seulement les familles dont rares sont les membres qui ont voté du même côté, mais l’Irlande elle-même. Les Irlandais du sud verraient d’un bon œil que ceux du nord décident de rallier l’Union Européenne, avec la sourde arrière-pensée de retrouver une Irlande unie. Le Royaume-Uni,  quant à lui compte bien respecter le vote du Brexit lequel implique le contrôle des frontières, mais n’a pas réuni la majorité des Irlandais du nord…

Rien n’est écrit à ce jour des exigences de chacun et ce silence pèse lourd en arrière-plan des négociations qui s’ouvrent en ce moment entre l’UE et le Royaume, de moins en moins « Uni ».  Les cicatrices de la guerre d’indépendance et du conflit nord-irlandais demeurent très vivaces dans de nombreuses familles et chacun redoute la résurgence des « troubles » qui ont coûté la vie à plusieurs milliers d’Irlandais.

Le petit serpent qui sillonne entre les deux Irlandes, endormi par tant d’années d’efforts et après tant de douleurs, est bien capable de retrouver  demain son venin. Montesquieu avait raison : comme à la loi, il ne faut toucher à la démocratie -en l’occurrence au réferendum- que d’une main tremblante. David Cameron en a fait la douloureuse expérience.

 

 

Changer de nom, oui, si c’est pour conserver le même !

Changer de nom, oui, si c’est pour conserver le même ! C’est le Parti Socialiste qui nous a déçu, pas le socialisme !
Pour ma part, j’applaudis l’initiative de @slefoll qui propose que nous nous appelions « Les Socialistes ». Le nom a parait il été préempté par Marie-Noelle Lieneman mais je suis sûre qu’elle comprendra sans difficulté qu’elle ne peut en être seule propriétaire et autorisera ce choix si nous sommes nombreux à l’approuver.
Socialiste, je suis et socialiste je resterai, fidèle à ce mot chargé d’histoire, plus qu’à ce parti qui a d’ailleurs eu lui même quelques vagabondages de dénomination. Ces dernières années de fonctionnement nous ont enlevé souffle, unité, conscience de l’exigence que constitue pour un parti de gauche de soutenir un Gouvernement dans la tourmente.

Alors « Les Socialistes » ? D’autres propositions ?.. Mais surtout pas, le choix deux fois calamiteux fait par le groupe parlementaire de l’Assemblee : « nouvelle gauche ». D’abord parce que ce choix avait quelque chose d’un peu honteux et de pleutre, mais aussi parce que rien en politique ne reste nouveau plus de 3 ans.
Vos avis ?

« J’ai cru en une grande coalition et je me suis retrouvée avec un parti unique »

J’ai cru en une grande coalition, je me suis retrouvée avec un parti unique. Cette phrase n’est qu’une vague réminiscence d’une autre, qui n’a rien à voir avec le sujet : «J’ai épousé une amazone, je me suis retrouvé avec une jument ». Dans un cas il s’agit d’Emmanuel Macron et de son Parti, dans l’autre d’un humoriste du siècle dernier et de l’une de ses épouses. Ainsi va le cerveau : de vieux rythmes, des mots anciens, se croisent sans prévenir avec des idées de l’instant.

J’ai eu un grand intérêt de la démarche initiale d’Emmanuel Macron. J’avais soupé près de dix ans de suite, du manichéisme imbécile qui fait qu’à l’Assemblée rien n’est bon pour la gauche qui est proposé par la droite et inversement. Dans quelques rares occasions, nous avons eu l’occasion de contrarier la règle : lois bioéthiques, sujets concernant le grand âge ou le grand handicap, quelques exceptionnelles questions de santé publique… L’ordinaire politique est bien davantage : tout est blanc, tout est noir. Oubliées les 50 nuances du gris, oubliées les couleurs variées de la lumière, oubliée la réflexion, l’honnêteté et même l’intelligence, la politique s’enfermait chaque jour davantage dans des phrases stéréotypées et des réactions pavloviennes.

J’en reviens aux premières expressions de politique générale d’Emmanuel Macron. Il était déjà Ministre, cela n’allait pas durer bien longtemps.. « Déjà Napoléon perçait sous Bonaparte » ou plutôt déjà Bonaparte perçait sous le Directoire.

Il fustigeait alors les oppositions stériles, affirmait fréquenter la droite comme la gauche et vouloir travailler avec l’une comme avec l’autre. J’avais précédemment souvent évoqué avec des journalistes comme avec des collègues députés, l’intérêt d’une grande coalition à l’allemande pour pouvoir concrétiser des avancées difficiles, obtenir une majorité pour des projets sortant des sentiers battus.. Je savais que Hollande y avait songé mais avait rétrogradé devant l’inadéquation de nos institutions –et de nos habitudes de controverses- à cette perspective.

C’est dans cette réflexion que j’ai été tentée par le projet que Macron esquissait, d’ailleurs plus avec des paroles que des exemples. Je pensais alors qu’il restait dans la généralité du vocabulaire pour faire monter l’idée en évitant de brutaliser les appareils politiques. Il rentrerait plus tard dans les propositions.

J’y ai cru, avec quelques-uns et surtout quelques-unes de mes plus proches à l’Assemblée. Je n’avais alors par de barrière envers les macronistes puisque je pensais que chacun pourrait rejoindre les idées en conservant son étiquette et même en l’affirmant.

Doucement, insidieusement, cette possibilité s’est diluée jusqu’à devenir impossible, à la faveur de l’incroyable casting qu’il a lancé en vue des législatives. Il ne s’agissait plus alors de montrer de l’intérêt, de contribuer par des notes techniques, il fallait envoyer une fiche de poste avec photo (à la suite de quelques légitimes critiques la photo ne fut plus, pas après un temps obligatoire, pour concourir, mais sans doute le demeura-t-elle pour avoir le job).

J’ai pour ma part, et je ne le regrette que parce que cela a été totalement inutile, envoyé à la suggestion de Gérard Collomb, une note sur la transitition démographique et les « affranchis de l’âge ». « Les affranchis » étaient le thème d’un des grands discours du futur candidat, qu’il abandonna d’ailleurs rapidement, quelque conseiller en communication l’en ayant sans doute dissuadé. Je ne reçus ni réaction, ni réponse et la suite a montré que le sujet de l’âge était un sujet résolument absent des perspectives programmatiques, puis gouvernementales du futur Président.

Je n’ai ni concouru, ni demandé quoi que ce soit. Je n’aurais pu le faire que si chacun avait pu conserver son identité et son étiquette, particulièrement s’il avait été précédemment élu sous cette étiquette, et pour défendre les idées qui y correspondaient. La grande coalition à l’allemande contraint les députés à ne pas déroger à ce qui a été signé, après des semaines de dialogue entre les partis contractants. Le texte final du contrat de coalition correspond à un texte de plusieurs centaines de pages.

LREM est devenu un parti si largement majoritaire à l’Assemblée qu’on peut l’appeler un parti unique ; ses statuts ont été votés par 30% des membres déclarés (180 000). La grande majorité de ses élus sont des nouveaux venus, peu en capacité au moins dans les premiers mois de contrer ou d’amender un seul mot des projets de loi du gouvernement, et plus gravement encore, n’en ayant pas le souhait, tout réjouis qu’ils sont d’assumer un mandat qui demandaient à tant d’autres des années d’engagement local et, pour beaucoup, de culture politique.

Je suis mal à l’aise, fondamentalement mal à l’aise, de cette évolution : d’un rapprochement de partis (ou de portions de partis) sur des projets définis, on en est venu à un parti unique, monocolore, souscrivant sans réserve ni modification à UN projet, rédigé à grands traits pour une campagne électorale. Bien sûr je souhaite la réussite de Macron, j’espère (encore) en sa capacité de rassembler au lieu de dégager et in fine de diviser , car je souhaite la réussite de la France. Mais quelque part, je crains que le contrat de mariage avec le pays, n’ait été quelque peu faussé au départ.

 

 

 

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