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A la recherche du corps soignant

C’est un signe : même l’estimation du nombre des professionnels de santé en France varie du simple à près du double soit de 1,2 à 2 millions. Beaucoup plus homogène est l’estimation du « corps enseignant », puisque celui-ci est considéré comme l’ensemble des salariés du Ministère de l’éducation et celui de la recherche et de l’enseignement supérieur. Le double système d’exercice, libéral ou privé, de nombre de professions de santé, n’aide sans doute pas à la cohésion mais les limites mêmes du secteur ne sont pas clairement établies. Les acteurs de la prévention et de la santé publique en général doivent- ils être inclus au même titre que les soignants ? La réponse est pour moi évidemment « oui » : la santé est d’abord de la prévention et celle-ci ne doit certainement pas être considérée à part. Le plus soignant des soignants fait aussi de la prévention, qu’elle soit primaire, secondaire ou tertiaire.

Est-ce à dire que le « corps soignant » n’existe pas vraiment ? D’ailleurs, l’a-t-on jamais vu défiler ensemble pour quelque cause que ce soit ? S’est-il jamais mobilisé autrement que pour des revendications sectorielles ? Tiers payant  ou prix de la consultation pour les médecins, conditions de travail pour les infirmiers, « mastérisation » pour des groupes particuliers… Voilà qui est doublement et gravement dommageable.

Nous en faisons en ce moment-même l’expérience : la santé demeure très absente du débat présidentiel, alors qu’elle constitue la préoccupation majeure des Français et que chacun d’eux est très attaché à notre système de santé. Dans notre paysage républicain, l’ Hôpital est un mot aussi fondateur que l’Ecole, pourtant aucun candidat n’en fait un fer de lance et quand on en parle, les propositions et les engagements relèvent plus souvent de la généralité que des faits. Tel « facilitera l’accès aux soins pour tous », tel autre « réduira les inégalités » sans préciser plus avant.

Le dommage va plus loin : a-t-on vu jusque-là les professionnels s’engager unanimement pour un des grands enjeux de santé publique qui mettent à mal l’état de santé général de notre pays et créent une fracture chaque jour plus grande entre riches et pauvres? Les « maladies de la misère » (tabac, alcool, obésité, addictions diverses..) n’ont jusqu’à ce jour pas vu se lever les professionnels de santé dans leur ensemble, alors qu’ils ont dans les mains une grande part de la solution, à la fois par leur pratique et par leur capacité à exiger que ces sujets figurent dans les programmes politiques et y trouvent des réponses concrètes.

Le sujet le plus propre à l’unanimité des professionnels de santé est le tabac qui tue en un jour plus  qu’aucun soignant ne sauvera dans la durée de son exercice. De cela, personne ne discute, les faits ne sont que trop établis. Comment les acteurs de santé peuvent-ils rester taisants sur ce drame qu’ils partagent au quotidien avec leurs patients et qui par ailleurs met en péril notre système de sécurité sociale et notre capacité à financer les considérables progrès de la médecine (27 milliards/an pour les seuls soins des maladies du tabac).

Bien d’autres sujets, au-delà même de la réduction des maladies évitables, relèvent de notre capacité à faire pression. Le développement des soins palliatifs en est un parfait exemple. J’oserais dire qu’il s’agit d’une urgence politique pour qu’enfin, toute personne en ayant besoin sur l’ensemble du territoire, puisse y accéder. Qui d’autre que les professionnels de santé peut exiger que cette question soit mise sur la table ?

Les professionnels de santé ont aujourd’hui beaucoup plus que la responsabilité de soigner. Eux seuls sont en capacité d’exiger que la santé soit au coeur de la politique, que nul candidat n’échappe à exposer sa vision, à détailler ses engagements concrets et pour tout dire, qu’il soit mis dans l’obligation de s’exprimer aujourd’hui et d’agir demain dans l’exercice de sa fonction.

 

 

 

 

Le double objet

Le tabac est le pire fléau sanitaire de l’histoire. A la fin de ce siècle, un milliard d’humains auront payé de leur vie notre tolérance à sa consommation et à sa vente. Ceci malgré les chiffres qui s’alourdissent, et les preuves scientifiques irréfutables de sa responsabilité.

L’ « Alliance contre le tabac » a lancé « l’appel des 100 000 », première « mobilisation générale » de l’ensemble des acteurs de santé pour un objectif de santé publique, lequel comporte un engagement à ne jamais laisser personne (patient, client, collègue..) sans évoquer avec lui la question du tabac et l’accompagner en direction du sevrage. Arrêter de fumer est très difficile, ce produit étant plus addictif que l’héroïne, les candidats à cet arrêt doivent être soutenus (c’est en particulier l’objectif de l’opération « moi(s) sans tabac » actuellement en cours).

Le premier objet de l’appel est donc cet engagement, qui n’est pas totalement superflu… Une étude a montré que la question du tabac n’est évoqué lors des consultations que dans 17% des cas, dont pour 11% à la demande du patient lui-même.

Le second motif est d’imposer la question de la santé et particulièrement celle du tabac au sein du débat présidentiel. A chaque orée de quinquennat, l’Alliance et les associations qui la composent interrogent chacun des candidats sur ses engagements pour lutter contre le tabagisme et publie les réponses qu’elle reçoit (ou pas) dans la grande presse. L’objet est donc de peser sur les prises de position des candidats sur le plan national et européen. Il est bien évident que si l’interrogation est portée au nom de plusieurs milliers de signatures, elle aura un impact de beaucoup supérieur à la fois sur la politique à venir et sur l’opinion.

Merci à tous de votre concours à cette mobilisation dépourvue de tout caractère partisan et soutenue par des personnalités de toutes sensibilités politiques, des associations et des institutions dont l’indépendance ne peut être mise en doute.

 

 

 

 

 

La méritocratie républicaine a-t-elle vécu ?

Crainte devant l’épidémie de dénigrement de l’ « élite » et du « système » qui gagne les candidats aux primaires de la droite de voir l’idéal républicain d’émancipation, d’éducation et de liberté brûlé en place publique. Que restera-t-il après lui ?

« Le peuple a toujours raison » est démenti par l’histoire. Pas toujours, pas totalement, mais « le peuple » s’est quelquefois lourdement et dramatiquement trompé. Je ne veux pas citer d’exemples, pourtant l’histoire contemporaine en est riche (ou plutôt : pauvre, pauvre de manière effrayante et terrible, et ceci dans des pays très différents).

Alors quoi ? Le peuple n’a pas non plus tort. Ni aujourd’hui, ni hier. Sa voix, toute aberrante qu’elle puisse paraître  dans une occasion ou autre (comme nous parait aujourd’hui l’élection de Donald Trump), a des raisons de s’interroger. Aujourd’hui, c’est la connivence d’une partie de l’élite avec ses comparses de domaines très différents qui légitimement, choque.  Economie et finance, médias, politique, doivent être, non pas radicalement séparés (nul ne peut gouverner ni légiférer sans une connaissance des domaines des uns et des autres) mais tenus à distance par un « mur de transparence » les différenciant clairement. Je le dis fortement : ce quinquennat a fait beaucoup en ce sens. Continuons et ne prenons jamais le risque de jeter des millions de bébés dans l’eau boueuse d’un bain sâle.

La méritocratie républicaine, significative d’effort, d’apprentissage culturel et professionnel, doit rester un idéal et un idéal atteignable par tous (ce qui n’est que trop peu le cas). Ne le noyons pas dans cet espèce de vachi-vacha populo-compassionnnel que l’on devrait abhorrer. « Je pense donc je suis » ne doit pas devenir « je suis (du verbe suivre) donc je n’ai pas besoin de penser ».

 

 

 

 

Leonard Cohen

Quelques mots, quelques lignes pour fixer la date où l’on découvre que la voix qu’on entendra toujours, que l’on a toujours entendue, ne parlera plus jamais, qu’elle viendra désormais d’ailleurs comme une blessure que l’on rouvre.

So long, Leonard.. Depuis tant d’années, compagnon de vie, fréquent ou occasionnel, dans des lieux ou des moments si différents mais toujours avec une sorte de communication directe, instantanée, au premier mot, au premier son. Cette masculinité blessée, cette voix si profondément sonore qui aurait pu donner des ordres, rendre bouleversant un discours politique, et qui avait choisi un tout autre registre : celui d’un mot, d’un son, de faire croire à qui l’écoutait que c’était lui, l’ « écoutant », qui avait du talent, lui, personne d’autre, qui avait été un jour bouleversé, remué et qui en garderait éternellement la marque.

Il y a 20 ans, sûrement plus, j’avais traduit « Suzanne » en français (qui retrouvera un jour ce papier parmi tous les autres de mes papiers ?) pour voir si l’émotion ne venait que de la voix ou aussi du texte, pour faire, à l’inverse et dans une autre langue, ce que Ferré a fait des poèmes de Verlaine ou de Baudelaire.

Pour le moins, j’aurais voulu que Cohen partage le Nobel avec Bob Dylan, l’impact universel et l’inexplicable symbiose entre texte, mélodie et voix sont pour moi plus grands encore pour le premier que pour le second.

Il est mort. Trois mots si simples et si terribles que l’on n’utilise qu’avec crainte et quelque fois pas du tout, les remplaçant par toutes sortes de formules. Non, il ne nous a pas quittés, il ne s’est pas éteint, il est mort, comme avant lui sa « muse » à laquelle il disait qu’elle le devançait à peine de la longueur d’un bras..

Compagnon d’une vie pour tant d’humains de tous pays de ma génération. Plus mystique que rock star, tellement plus fascinant que tant d’autres talentueux et inspirés pourtant qui l’ont précédé dans ces derniers mois terribles pour le chant et la musique populaire contemporaine.

Celui qu’on entendra toujours et qui ne parlera ni n’entendra plus dans un néant, tellement néant, que l’imagination ne peut pas même concevoir.

Soutenir le cirque Romanès

Le cirque Romanès présente actuellement son nouveau spectacle au public parisien et sera en début d’année prochaine accueilli au Parc des Angéliques à Bordeaux Bastide.

L’an dernier, dans le 16ième arrondissement de Paris, ce cirque qui partage et promeut la culture tzigane basée sur la rencontre, la tolérance, l’amour et la solidarité a été victime de nombreuses attaques, vols, dégradations, insultes raciales…

Afin de poursuivre ses activités et renouveler le matériel détruit ou dégradé, le cirque a lancé un appel aux dons. Pour sa part, je leur ai attribué une fraction de ma réserve parlementaire.

Le 9 novembre, la Ministre de la Culture Audrey Azoulay remettra à Alexandre Romanès, directeur du cirque et poète, les insignes de la Légion d’honneur. Je serai présente lors de ce moment de reconnaissance.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel