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Retrouver son latin

En réalité, je sais bien pourquoi je me souviens de ce « capax imperii, nisi imperasset » évoqué dans le billet précédent. Dans un livre, Golo Mann, frère de Thomas, donne la phrase pour exemple de la densité et de la force de l’expression latine. Quatre mots pour exprimer ce que Golo Mann traduit par « Qu’il eût été un grand roi si seulement il n’avait pas régné ».

Traduction littéraire et non pas littérale, et pourtant pleinement justifiée par la nécessité de rendre l’équilibre roi/règne que l’on trouve dans imperii/imperasset. Il n’y a en français qu’une manière de régner, que l’on soit roi ou empereur, et la traduction littéraire est en effet meilleure que toutes celles que donnent les latinistes non écrivains (« si digne de l’empire » ou encore « si bien capable d »être empereur » pour les deux premiers mots, et « si du moins il n’avait pas régné » pour les deux derniers).

Les peuples heureux sont ceux où l’on se dispute sur la place du point virgule dans la phraséologie française ou sur la traduction d’un vers latin : on se doute que j’aimerais être disputée sur mon parti pris en faveur de la traduction de Golo Mann. Cher Jean Philippe Daney, n’hésitez pas à me contrarier, ni à me contredire sur ce point, vous qui évoquiez Lucilius et m’avez donné l’idée de ce billet.

Cette parenthèse étant faite, je reviens en effet à mon latin. L’Argentin Borges, qui figure lui aussi au rang de mes auteurs favoris, donne un autre exemple de la densité et de la force de contraction du latin, celui-ci carrément sublime.

Il s’agit d’un vers de Virgile, si doux à ce dire la nuit, seul ou à deux, quand la nuit l’emporte sur tout autre sentiment.

« Ibant obscuri, sola sub nocte »

« obscurs passagers de la nuit solitaire » . Traduction littéraire que je tente ici. Une autre est possible (bien d’autres..) : « l’un et l’autre ils marchent, obscurs sous la nuit solitaire ».

L’incroyable force de ce vers de 5 mots est dans l’inversion de « seuls » et « obscurs ». Un poète ordinaire (il n’y a pas en réalité de poètes ordinaires, même moins grands que Virgile, ils ne sont pas ordinaires parce qu’ils ont gardé cette possibilité d’entendre et d’exprimer la vie autrement) aurait écrit « ils marchent seuls dans la nuit obscure ». Mais qui ne sait pas que la nuit peut être, plus que toute autre chose au monde, solitaire ?

La tentation de Virgile… Quelqu’un en cette ville a eu « La tentation de Venise », que le merveilleux blog « Alain Youpi » évoque avec finesse comme « la tentation de Denise », l’une l’ayant finalement emporté sur l’autre. Quand je serai grande, et bien sage, je m’appliquerai et je prendrai du temps pour retrouver mon latin.

Tellement plus grand, si du moins il ne régnait pas

« Capax imperii, nisi imperasset » : « Combien digne de l’empire si seulement il n’avait pas régné » . Cette citation de Tacite à propos de l’empereur Galba m’est toujours restée dans un fond de mémoire. Ce qu’elle vient faire ici, on le verra tout à l’heure.

Visite ce matin de Mme Roselyne Bachelot, ministre de la santé, des sports et de deux ou trois autres bonnes choses. La visite était celle du pôle ouest du site de Pellegrin, bientôt en pleine activité. Comme sa charge l’y oblige, M le Préfet m’a adressé le programme de la visite. Comme ma charge m’y oblige (accueillir un ministre quand il vient dans sa circonscription), je me suis rendue au point de rendez-vous à l’heure dite.

Et une fois encore, Alain Juppé a déployé mille stratégies
– pour que je sois le moins visible possible dans le reportage
– pour que ne sois pas présente au côté du ministre ni au sien sur les photos

L’affaire serait drôle si elle n’était pas un peu tristement ridicule. Voulant contrecarrer l’effort d’Alain Juppé de garder à chaque instant entre lui et la ministre Mme Bourragué ou M Heriaud, directeur général du CHU, j’ai rappelé gentiment à notre Maire que j’étais la députée de la circonscription, et donc que je me devais à accompagner la Ministre

Sa réponse en dit plus long qu’il n’y parait : – Oui, mais Madame Bourragué est une amie !

En un mot : le protocole bordelais n’a rien à faire de celui de la République. La légitimité s’acquiert non par grade mais par la bénévolence du Maire.

La visite a continué, le Maire prenant le bras de Mme Bourragué, Alain Heriaud tenant curieusement le Maire par la taille pour bien faire pack..

Je dis souvent que la politique, ou plutôt le pouvoir, rend bête, et c’est tout le sens de la citation de Tacite .

Euthanasie

Il y a une longue distance sémantique entre « euthanasie » et « droit de mourir dans la dignité »… Essayons-nous à l’éxercice par des voies à la fois pragmatiques et détournées.

En 36 ans d’éxercice de la cancérologie (d’abord non majoritairement, puis exclusivement), pas un seul malade ne m’a demandé de l’aider à mourir. Les familles, oui, souvent, et cela allait de la compassion véritable au désir pur et simple que « ça finisse » (« on va quand même pas faire la route tous les jours de Périgueux à Bordeaux… »).

Dans ce même temps, et surtout dans les 20 dernières années, je peux assurer que nous avons calmé la douleur de manière quasi-totale (que le patient ne souffre plus du tout) et dans la quasi-totalité des cas, comme le prévoit et le permet la loi Léonetti, c’est à dire, non rarement, en prenant des risques vitaux.

A la suite de la mort de Chantal Sébire, une journaliste de France info m’interroge : au regard de votre expérience, pensez-vous que la loi actuelle suffise ou faut-il aller plus loin ?

Mon opinion est que dans l’immense majorité des cas (voir ce que j’ai écrit sur ma pratique personnelle), la loi actuelle suffit. Il faut qu’elle soit mieux connue, mieux comprise, mieux appliquée, mais elle suffit.

Les cas de Chantal Sébire, Vincent Himbert sont des exceptions. Sans doute n’y en a-t-il pas en France chaque année plus que les doigts de deux ou trois mains. Je ne crois pas que la loi générale doit être dictée par des exceptions aussi aigües.

La conjonction d’un absolue conscience, d’une réelle détermination, d’une maladie gravative sans recours et in fine mortelle, ne sont pas des expériences quotidiennes. A ces cas d’exception, il faut une « juridiction » d’exception.

Juridiction ne veut pas obligatoirement dire « loi » , mais peut correspondre à une réunion de sages ou d’experts, ou d’un comité d’éthique… Mais surtout ne légiférons pas à tort et travers et encore, moins dans l’émotion.

« Je joue collectif »

Sud Ouest, le 20 mars 2008

MUNICIPALES. Touchée par le cumul des mandats, Michèle Delaunay démissionne de l’opposition municipale pour rester conseillère générale de Bordeaux 2.

Elle a choisi. Michèle Delaunay a finalement quitté le Conseil municipal pour sauver son mandat de conseillère générale du canton de Bordeaux 2. « C’est d’abord une raison politique. Car c’est un canton chèrement conquis à la droite, en 2004 », précise-t-elle. Ce bastion chabaniste, longtemps tenu par Simone Noaille, n’avait en effet pas basculé à gauche depuis plus de 60 ans. « Ce fut une victoire monitrice de la suivante, aux législatives, sur la 2ème circonscription, estime la députée Michèle Delaunay. Nous aurions donc aimé faire le grand Chelem en remportant aussi la mairie. C’est raté. »

(suite…)

En direct du Conseil Général

Sous l’oeil des caméras et des photographes (notre Assemblée n’est pas habituée à cette affluence), nous venons à l’instant d’élire Philippe Madrelle Président du Conseil général. Score supérieur d’une voix à notre majorité : 49 voix pour Philippe, 13 blancs, 0 nuls.

Dixième élection pour Philippe. La première en date du 17 mars 1976, à l’âge de 38 ans. Le Conseil Général siégeait alors, avec la Préfecture, dans l’hôtel de Saige, aujourd’hui occupé par … Fayat.

Un point noir à cette séance : Gilles Savary qui devait aujourd’hui être intronisé Vice-Président ne pouvait siéger. Ceci à cause d’une loi imbécile qui a fait tomber automatiquement son mandat de Conseiller Général à la suite de sa candidature, puis de sa démission de Conseiller Municipal de Talence. Il peut aujourd’hui se représenter, alors qu’il ne peut sièger. Aberrant et en opposition avec l’esprit des lois autant qu’avec le bon sens.

Huit femmes siègent aujourd’hui sur nos bancs. On peut sourire de ce faible nombre (8/63), il marque cependant une progression relativement à l’assemblée précédente où nous n’étions que 6. Toutes siègent sur les bancs de la gauche.

En plus des deux femmes qui viennent d’être élues, onze nouveaux élus dans ce cycle entier qui matérialise notre assemblée. Curieusement, on n’utilise jamais ce mot de « cycle » pour une assemblée circulaire, alors qu’on parle à Paris d’hémicycle.

Séance très solennelle, que je voulais vous conter en direct, en profitant des interstices entre les votes et des interruptions de séance.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel