m

Universités, suite

L’Assemblée a donc voté hier à la majorité le texte de loi « libertés et responsabilités des Universités ». Aucun des amendements présentés par l’opposition n’a été retenu et cela pose un problème véritable à l’encontre d’un pouvoir qui se targue d’ « ouverture », mais aussi sur la place du parlement et le fonctionnement démocratique de nos institutions. J’y reviendrai.

Un des problèmes posés par ce texte est la place des enseignants, chercheurs ou toute autre fonction, recrutés par contrat, et non selon les lois de la fonction publique. Qu’une plus grande souplesse soit introduite dans ce type de recrutement est une bonne chose : il permet, dans des secteurs en panne, ou insuffisamment dynamiques, d’embaucher dans les labos des chercheurs prestigieux, en pointe dans leur domaine. Il permet également des recrutements hors des compétences habituelles de l’Université et l’on comprend par exemple qu’une Université qui a choisi d’assurer la propriété et l’entretien de ses bâtiments puisse avoir besoin d’un architecte.

Mauvais au contraire que nous n’ayons pas obtenu que ce type de recrutement soit encadré et limité à un pourcentage de la masse salariale. Il risque sans cela d’en accaparer une part prédominante, et disons le mot, ouvre la voie à la privatisation de l’Université. Si le recrutement des chercheurs issus de l’industrie ou des labos privés devient majoritaire , la recherche publique risque d’y perdre plus que son âme.

Je suis intervenue pour exprimer que cette possibilité de recrutement extérieur, dynamisante si elle concerne un nombre restreint de cas, devient délétère pour la dynamique interne de l’Université si Universitaires et chercheurs se voient régulièrement préférer pour occuper les postes les plus prestigieux des candidats venus d’ailleurs. Ils n’auront alors plus qu’à ronronner devant l’absence de toute perspective valorisante. A droite comme à gauche, des têtes ont opiné mais la proposition n’a pour autant pas été reçue. Elle ne mettait pourtant pas en cause l’esprit du texte et ne compromettait pas son objectif, au contraire, qui est de dynamiser nos Universités et notre recherche.

Voilà un exemple parmi bien d’autres dans ces trois jours de débat. Et une fois encore, une vraie interrogation sur notre rôle et nos possibilités d’action.

Le marathon des Universités

Troisième jour ce mercredi du marathon universitaire : la loi pompeusement appelée « Libertés et responsabilités des Universités » est en examen devant l’Assemblée nationale après l’avoir été devant le sénat. Le mot d' »autonomie » suffirait ; liberté, au singulier comme au pluriel, me parait d’un ordre différent.

Ce n’est pas la pire des lois que nous examinons à marche forcée cet été. Réformer l’Université est un besoin unanimement ressenti et exprimé sur nos bancs. Mais une fois encore la précipitation amène à des surprises et à la constatation de graves insuffisances du texte.

Un exemple. Un des points majeurs de la loi est de renforcer les pouvoirs du Président des Universités. Il devient une sorte d’ « omni-président », à l’exemple sans doute du Président de la République lui-même qui s’est mis en tête de s’occuper de tout, tous les jours et de préférence sous les yeux des caméras (François Hollande a eu à ce propos une formule percutante et pleine d’humour comme à l’habitude : « Nicolas Sarkozy, c’est le coup d’éclat permanent », parodiant ainsi le titre du pamphlet de François Mitterand « le coup d’Etat permanent »).

Mais je reviens à mon Président des Universités : le voilà sommé d’être à la fois un VIP-VRP de l’Université avec la mission d’en assurer la promotion dans le monde, de contribuer à la dynamique de sa région et à l’insertion professionnelle des étudiants, d’animer les équipes scientifiques et d’être en outre un formidable gestionnaire. Un seul homme n’y suffit pas et François Bayrou a fait très justement remarquer que la répartition des pouvoirs dans les Universités américaines se faisait entre quatre personnes aux fonctions étanches : President, « Provost », « Dean » et « Chief financial officer ». Cela a plus ou moins été reconnu par la ministre qui a indiqué que, pour pallier à la pléthore de cette fonction, elle « musclerait » les prérogatives des secrétaires généraux des Universités en matière de gestion.

Plus gravement encore, il n’a rien été prévu en cas de désaccord majeur entre le Président et son Conseil d’Administration. Le Président doit soumettre annuellement un rapport d’activité, déclinant les orientations politiques et scientifiques de l’Université : il n’a été prévu qu’une approbation de ce rapport. Alors pourquoi le soumettre, si seul le « quitus » est envisagé ?

Là aussi, sans doute, une contamination sarkozienne. Nous avons proposé un amendement prévoyant que le Président engage sa responsabillité et qu’en cas de désaccord majeur, et de vote d’au moins les deux tiers du Conseil, il doive remettre son mandat. Il est normal que cet homme omni potent et omni soit aussi responsable. Mais non, l’amendement a été rejeté et nous restons donc dans le flou.

Un autre sujet majeur sur lequel je suis intervenue, est la situation particulière des « Unités de Formation et de Recherche » des facultés de médecine. Les Universitaires des CHU sont des bi-appartenants : moitié médecins hospitaliers, moitié Universitaires, à la fois enseignants et chercheurs. C’est donc en réalité une triple appartenance, dont l’usage est obligatoirement différent selon qu’on est orthopédiste ou médecin nucléaire. Dans certaines spécialités, l’enseignement est d’abord un enseignement de technicité, et le rôle de beaucoup de nos chirurgiens est d’abord d’apprendre à leurs étudiants et à leurs internes à bien opérer et à acquérir de nouvelles techniques. Le malade se fiche un peu qu’il passe une partie de son temps dans un labo à trifougner sur des cellules ou des molécules pour remplir sa valence recherche.

Or les jeunes agrégatifs, bien conscients déjà que la « valence recherche » leur apporte d’avantage de chance de sélection que les meilleurs soins aux patients, ont très fortement tendance à privilégier cet aspect et à être moins présents dans les services . La loi conserve la double nomination des bi-appartenants par le ministère de l’Enseignement supérieur et par le ministère de la Santé. Mais prévoit que leur rôle universitaire soit intégré dans la politique de recherche de l’Université, elle-même décidée par le Président de l’Université. Il y a fort à craindre qu’on puisse imposer à l’orthopédiste que j’évoquais tout à l’heure des travaux très éloignés de sa spécialité et, plus gravement encore, que l’on détourne des postes très nécessaires sur le plan médical vers des activités de recherche portées par l’Université. En clair, que l’on puisse nommer un chimiste là où il faudrait en priorité un orthopédiste.

Voilà une réserve qui a d’ailleurs été exprimée également sur les bancs de la droite et ceux de la gauche. La pratique jugera et j’espère que nous conserverons un niveau élevé autant en chirurgie orthopédique qu’en médecine nucléaire ou en biologie moléculaire.

Qu’avons-nous besoin de ministres ?

Qu’avons-nous besoin de ministres puisque nous avons Cecilia ? Et que comble de félicité Nicolas Sarkozy a plusieurs épouses, plusieurs enfants, plusieurs frères … Qu’a-t-il eu besoin de former un ministère, il l’avait à la maison !

En face de moi, dans le train, une femme ouvre grand le Figaro du jour « Infirmières : Cecilia face à la surenchère Libyenne ». Kouchner a parait-il déclaré « Qui mieux que l’épouse du Président peut traduire sa pensée, qui est plus proche de lui ? ». Elémentaire, mon cher Bernard.

Tout cela fait penser aux familles saoudiennes, irakiennes qui se partagent ou partageaient les pouvoirs et les rentes. Même Louis XIV avait eu la sagesse de prendre dans le « commun » ses ministres, et « Monsieur frère du roi », comme la reine elle même n’avait guère de fonction autre que décorative ou protocolaire. Comme quoi il serait une erreur de penser que nous vivons dans une République monarchique.

Morceaux de promenade

Première promenade de l’été. Pour quelques heures à Hossegor, où ce blog l’an passé a plus ou moins commencé à prendre forme. Depuis que je suis enfant, ces retours devant mon océan marquent le cycle des années, et immanquablement, dès la première marche le long de l’eau, l’inventaire se fait dans ma tête de ce qui a marqué l’année écoulée ou au contraire de ce qui l’a laissée uniforme et plate malgré des journées pleines et l’apparence de l’agitation. Un an, dans une vie qui est faite pour en contenir combien ? Un an d’une vie, et un jour celui où je ne reviendrai pas.

Beau temps fragile qui porte la marque presque insaisissable du gris brumeux et des accès de pluie des jours passés. Les matins sont ici ce que je connais de plus libre au monde. Chaque promeneur, devant l’éternité inviolée de ce décor, est le premier homme. Chaque promeneur ressent à la fois l’étonnement et l’inquiétude d’exister, dans une nature à la fois amicale, douce aux épaules, fraîche aux jambes et indifférente, sûre de sa constance, sûre d’être là bien longtemps après cette promenade et des milliers d’autres.

J’enregistre à l’instant sur mon petit dictaphone, ce que je transcrirai tout à l’heure sur l’ordi (et « tout à l’heure » sera devenu « à l’instant »). Ces petits morceaux décousus sont-ils compréhensibles ? Sans doute tenterai-je l’expérience quand je reviendrai pour un moment plus long d’utiliser un appareil plus contemporain et de verser l’enregistrement directement sur le blog. Il doit bien y avoir quelque manoeuvre magique qui me permette de faire un « audio-blog », à la façon dont mes jeunes coéquipiers de la campagne électorale ont introduit des « video-blog ». On entendra alors derrière les paroles le petit « rouf-rouf » des vagues brisantes à mes pieds, le curieux sifflement du moindre souffle de vent dans le micro, ou par moment le petit cri d’un enfant sautant dans l’eau. C’est tout ce petit monde que je retrouve dans les cassettes quand je les retranscris et il n’est pas sans signifiance et sans interférence avec la parole qui les couvre en partie. C’est certainement une conversation que ces marches du matin, une conversation très longue dont personne, pas même moi, ne pourrait dire l’année où elle a été enregistrée. Les événements extérieurs en sont presque totalement absents et je pourrais sans doute copier ici une cassette « écrite » il y vingt ans sans que rien ne permette de la situer dans le temps.

C’est dimanche, au coeur de la saison, et pourtant la longue plage est encore presque déserte. Les plus beaux moments sont ici les plus préservés. Ce n’est guère qu’à partir de midi que les vacanciers descendent la dune pour accomplir leur devoir de bronzage. Il y a quelques personnes au monde auxquelles je voudrais livrer tous les secrets de ces heures. Plus profondément encore, je voudrais que tous les enfants du monde puissent y avoir accès et les découvrir eux-mêmes. C’est un luxe finalement assez simple de marcher devant soi, le long d’un horizon sans limites, à l’heure où la journée est encore largement ouverte aux attentes et à toutes les formes du possible. La journée, dans l’enfance, c’est la vie elle-même, et la découverte de cette « promesse de l’aube » qu’on fait dans la solitude, dans le silence, et jamais mieux que devant un horizon libre est une expérience essentielle au désir de s’accomplir.

En copiant ces morceaux de promenade quelques heures après les avoir enregistré, je ne sais aucunement s’ils ont la moindre cohérence. J’interromps en cours pour ouvrir mes dossiers « prison » et préparer la conférence de presse que je tiendrai demain pour attirer l’attention sur les mesures qui viennent d’être prises (la loi de lutte contre la récidive) et qui se préparent.

Accoyer

Bernard Accoyer ce matin à France-inter. Le nom ne vous est sans doute pas encore familier : il n’a pas de véritable raison de le devenir.

Bernard Accoyer est le Président de l’Assemblée. Petit homme imbu de sa personne, regardant autour de lui si on le regarde, et surtout très absent. Je n’ai pas assisté à la totalité des séances mais il n’en a jusqu’alors présidé que deux : l’ouverture de la législature, et la présentation des deux ministres Christine Lagarde et Rachida Dati. Il a la troisième fonction de l’Etat, sans doute la plus belle résidence (l’hôtel de Lassay), un salaire sans doute décent, une plus grande assiduité ne serait pas fâcheuse.

Il parle ce matin d’un ton patelin et douceâtre que je déteste particulièrement. Et vante l’ « ouverture », la choix de Nicolas Sarkozy de confier de hautes responsabilités à des « talents » issus des rangs de l’opposition.

Quelle ouverture en réalité ? Confier à des hommes de gauche le soin de faire, mot à mot, une politique de droite, est-ce cela l’ouverture ? Faire diversion quand on fait passer des lois socialement injustes ? Nicolas Sarkozy ne s’est d’ailleurs pas caché de ses intentions : ne pas laisser à l’opposition la chance de gagner du terrain, spécialement dans la perspective des municipales. « Vous m’en remercierez demain », a-t-il dit hier aux cadres de l’UMP.

Une fois encore, ne nous laissons pas abuser. Les leçons d’instruction civique d’autrefois devraient être aujourd’hui d’abord des leçons d’esprit critique vis à vis des media et de la politique de com’ qui remplace aujourd’hui la politique.

Suivi et Infogérance par Axeinformatique/Freepixel