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6+4+1 = ?

Décidément les sous-marins nucléaires ne valent rien aux candidats à l’élection présidentielle. On a fait grand cas de l’erreur de Ségolène Royal en Janvier, qui n’en dénombrait qu’un seul. Michele Alliot-Marie, bonne copine, avait jugé bon de dénoncer par voie de presse les lacunes de la candidate..

Espérons qu’elle aura la même exigence pour Nicolas Sarkozy auquel on posait hier la même question et qui, tout fier, a répondu « quatre ! » . La petite déconvenue, très médiatisée, de Ségolène aurait pourtant du l’inciter à s’informer…

« Cinq ! » , a redressé le journaliste … Eh bien, non, le juste nombre c’est six ! « Libé' » donne leur nom : le Rubis, le Saphir, le Casablanca, l’améthyste et la Perle. En plus de ces six sous-marins d’attaque, il y en a quatre lanceurs d’engins. Un seul porte avion est armé de missiles dotés d’armes atomiques, le Charles de Gaulle.

Donc 6+4+1 = 11 . Des fois que vous voudriez, in extremis, vous lancer dans la course présidentielle…

Petit plaisir du matin (26)

Petit plaisir du matin, je l’espère, ne fera pas comme le rossignol et chantera jusqu’au soir… Sur France-inter ce matin, Ségolène Royal plaide pour la recherche et l’entrée des femmes dans les carrières scientifiques. Son analyse n’est pas différente de la mienne (cf billet 23) sur les freins qui limitent presque inconsciemment à la fois les jeunes filles et leur famille : l’idée confuse qu’une scientifique est une binoclarde sans grâce et sans féminité. Une fois encore les stéréotypes. Faisons les résolument bouger !

Un plaisir ne vient jamais seul : dans mon bureau, une orchidée blanche d’une grâce infinie entame sa troisième floraison. La malade qui me l’a offerte est aujourd’hui très loin et cette orchidée obstinée est là pour dire que tout vit, meurt et renait, et que nous devons laisser trace.

Bonne journée à tous. On ne fait plus assez attention au sens de « bonjour ! » quand on le prononce. Ni sans doute (tant mieux ?) au sens de bon-heur, qui n’est le plus souvent rien d’autre qu’une bonne heure.

Brève

Je m’inquiète de la santé de l’ancien ministre Pierre Joxe. Si je connaissais son médecin, je lui adresserais des encouragements à le maintenir en bon état.

Pierre Joxe, en effet, est le dernier membre du conseil constitutionnel nommé par la gauche. Après la fournée de nominations faites avant départ par Jacques Chirac, cette honorable institution est désormais dans des mains peu partagées.

Au premier rang, le fidèle Jean-Louis Debré qui a désormais « la république en héritage ». Son père Michel Debré n’avait pas accepté le job, pour n’avoir pas à se contraindre à un « devoir de réserve ». C’est maintenant au tour de Jean-Louis. La République, comme la médecine, n’est pas indépendante des lois de la génétique.

Les femmes et la science (23)

Les femmes demeurent très mal représentées dans le secteur de la science. Ce n’est peut-être pas le meilleur critère mais il est spectaculaire : sur 516 prix Nobel scientifiques… 12 seulement ont été attribués à des femmes ! Et encore, l’une –qui nous est particulièrement chère, puisqu’il s’agit de Marie Curie- en a reçu deux. Un quart seulement des chercheurs en France sont des chercheuses. Pourquoi ?

Il ne s’agit pas d’une compétence insuffisante, d’une différence naturelle entre les cerveaux masculins et les cerveaux féminins qui prédisposeraient les uns et handicaperaient les autres. La montée exponentielle des femmes dans le secteur de la médecine, alors que les études et la pratique deviennent toujours plus scientifiques, le démontre. Il ne s’agit aucunement non plus d’une ségrégation au sein des mêtiers scientifiques qui sont très ouverts à la mixité.

C’est au contraire une différence d’habitudes culturelles qui s’éxerce dès le très jeune âge sur collégiennes et lycéennes. Il est encore de bon ton de considérer que les femmes doivent éxercer leurs talents dans le domaine des belles lettres, de l’histoire, des arts… Une « matheuse » fait un peu peur. Elle ne répond pas aux canons féminins traditionnels. Les jeunes filles sont donc orientées, ou s’orientent elles-mêmes inconsciemment, dans d’autres voies que les « sciences dures ».

Beaucoup d’initiatives, à tous les échelons, se mettent en place pour combattre ce handicap culturel. Parmi elles, la création d’un prix Unesco « Les femmes et la science » récompensant une femme dans chaque continent pour le niveau exceptionnel de ses travaux. L’originalité de ce projet tient non seulement au choix de récompenser des femmes mais au choix de le faire dans chaque continent. Une femme mauricienne est, cette année, au nombre des lauréates. Ceci est particulièrement propre à créer dans chacun de ces continents des « modèles féminins » qui pourront entrainer les jeunes filles dans leur voie.

La parité, la vraie, passe d’abord par le fait de surmonter les stéréotypes. D’autant que les professions scientifiques sont actuellement celles qui ont le plus de débouchés. Si les femmes n’y entrent pas de plein pied, nous ne dépasserons pas l’image de « mêtiers féminins », bien souvent vécus comme secondaires, et bien souvent en pratique moins bien rémunérés. Imaginez un film où la femme soit astro-physicienne, et l’homme décorateur d’intérieur … Eh bien, ce film n’existe pas ! Celui qui dépeint la situation inverse, si !

Bougeons, faisons bouger, ça aussi, c’est de la vraie politique !

Suicide, l’envers de notre société

Trois suicides en 4 mois au technocentre de Renault. Trois employés reconnus comme particulièrement investis dans leur travail. Il n’est pas question de s’engouffrer dans des conclusions hâtives, et très probablement, comme dans tout suicide un faisceau de facteurs entre en jeu. Facteurs personnels, familiaux, mais il semble qu’on puisse dire sans conteste que dans cette multiplicité de facteurs, le stress professionnel a joué pour ces trois personnes un rôle important.

L’occasion de s’attarder un moment sur le suicide et son évolution en France.

Chaque année près de 11000 personnes se suicident en France. Il ne s’agit bien sûr pas des tentatives de suicides mais des suicides que l’on appelle, très mal à propos, « réussis ». Le chiffre est de beaucoup plus élevé que celui des morts sur la route. Il interroge l’état de notre société.

Son évolution est instructive. Contrairement à ce que l’on pourrait craindre, le suicide des jeunes diminue, et ceci grâce à une politique de prévention réussie, à des réseaux d’écoute et de vigilance qui fonctionnent. A l’inverse, et c’est là que se situe l’interrogation majeure, le suicide des adultes entre 30 et 59 ans augmente régulièrement.

30-59 ans, c’est le coeur de la vie professionnelle. En effet, et nous rejoignons le problème posé par nos trois salariés de Renault, toutes les études montrent, que dans la conjonction de facteurs qui amène au suicide, les conditions de travail ou le non-travail ont désormais une place prépondérante. C’est d’abord pour cela que le suicide constitue un problème politique et social. Nous devons y être attentifs parce qu’il est le miroir de la marche et des errements de la société.

Ce suicide miroir d’étain de la société constitue l’idée dominante d’une très belle analyse publiée cette année par Chr.Baudelot et R.Establet*. Ils montrent que selon les pays, ce ne sont ni les mêmes groupes d’âge, ni quelquefois le même sexe qui constituent les groupes « cibles » où le taux de suicide est le plus élevé. Ainsi, en Chine, où les femmes sont encore mariées contre leur gré, et souvent utilisées comme une sorte de personnel ménager subalterne dans les belles familles, le suicide des jeunes femmes est particulièrement élevé et constitue une sorte de mode dramatique de revendication sociale.

En France, comme dans les autres pays européens, les femmes se suicident trois fois moins que les hommes. Plus qu’eux, elles ont la capacité à la fois d’exprimer leur détresse et de se rattacher à la concrétude de la vie et à ce qui marque sa transmission ou sa continuité.

Au chapitre de l’interrogation de la société, la place « privilégiée » de la France parmi les pays européens mérite que l’on s’y arrête. Les taux de suicide les plus faibles (inférieures à 10 pour 100 000 habitants)sont enregistrés en Grèce, en Espagne, en Italie et au Portugal, pays où le lien social est mieux conservé qu’en France. Tous les spécialistes s’accordent sur ce point simple : la meilleure prévention du suicide passe par le rétablissement du lien social. Un lien social simple, non discriminant comme peuvent l’être certains clubs ou certains groupes qui font au contraire ressentir leur faiblesse aux plus faibles.

Voilà qui nous concerne tous, tous les jours : se battre sur les conditions de travail, promouvoir une société plus simple, moins engoncée dans le jeu des apparences et des appartenances. Tout cela est malaisé à exprimer : je me suis faite un jour ramasser par mes coéquipiers de campagne électorale parce que je voulais écrire cette formule « une société plus simple » dans un document. « Qu’est-ce que ça signifie ? » m’ont-ils dit.. Pourtant c’est profondément ce que je ressens : une société où la prise de conscience de l’unicité de notre condition soit plus clairement ressentie et partagée.

Bon, d’accord, c’est peut-être pas évident à formuler dans un tract ! Je crois pourtant que, jusque dans la prévention de ce paroxysme de souffrance qu’est le suicide, cela peut constituer à la fois un moyen et un but. Tous les jours, pour nous tous.

  • « Suicide, l’envers de notre monde », éd. Seuil

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