La Cour des comptes demande de revoir le soutien de l’Etat aux buralistes
PARIS, 8 février 2017 (APMnews) – La politique de santé publique conduit à une baisse de la consommation de tabac, ce qui nécessite que l’Etat réexamine les modalités de son soutien aux buralistes, estime la Cour des comptes dans son rapport annuel rendu public mercredi.
La vente au détail repose pour l’essentiel sur un réseau de 25.492 débits de tabac (fin 2015), dont les tenanciers sont des préposés de l’administration des douanes. Cette organisation structure les relations entre ces commerçants et l’Etat, rappelle la Cour des comptes.
Depuis 2004, « considérant que sa politique de lutte contre le tabagisme aurait un impact sur la vente du tabac dont le prix a fortement augmenté », l’Etat a mis en place de nouvelles aides pour soutenir le revenu des buralistes dans le cadre de « contrats d’avenir » sur 2004-2007, 2008-2011 et 2013-2016, signés avec la Confédération des buralistes.
Alors que la Cour des comptes avait déjà recommandé dans son rapport annuel de 2013 de procéder à une remise en cause de ce troisième contrat, elle constate que ce dernier n’a pas corrigé les défauts qui avaient été relevés.
« Les dispositifs [d’aide au revenu des buralistes] sont toujours nombreux, peu ciblés et insuffisamment contrôlés, alors que les revenus des débitants continuent d’augmenter et que le nombre de d’établissements en difficulté apparaît limité. »
L’évolution des revenus « continue d’être dynamique », favorisée notamment par la hausse du prix de vente du tabac qui se répercute sur le chiffre d’affaires et par l’augmentation du taux de remise nette (le revenu de la vente qui revient au buraliste).
Les magistrats de la rue Cambon pointent le nouveau protocole qu’a conclu l’Etat avec la Confédération des buralistes, le 15 novembre 2016, prévoyant une nouvelle hausse de la remise nette et maintenant les aides financières « sous diverses formes » et ce, « sans attendre d’avoir observé les éventuelles conséquences de la mise en place du paquet neutre sur le revenu des débitants ».
Le nouvel accord est conclu pour cinq ans « sans considération des besoins réels des débits véritablement en difficulté » et il est « inadapté aux évolutions souhaitées ». « La politique de santé publique conduit à la baisse inéluctable de la consommation de tabac et l’objectif principal doit être la reconversion de ces commerces à d’autres activités. »
La Cour regrette aussi que la situation profite d’abord aux débutants de tabac, « au détriment des recettes de l’Etat », et « invite les pouvoirs publics à réfléchir aux modalités d’organisation de la vente au détail du tabac » et « à reconsidérer au plus vite […] les dispositions du protocole d’accord du 15 novembre 2016 ».
Les arguments avancés pour le maintien de cette organisation, notamment la mise en oeuvre de la politique de santé publique et l’interdiction de la vente aux mineurs, sont peu étayés. « Ainsi, aucune donnée n’a pu être fournie sur le nombre de contrôles et éventuellement d’infractions des buralistes au regard de leurs obligations en matière de santé publique. »
La Cour pointe aussi la relation particulière de l’Etat et des buralistes de par leur statut de préposé des Douanes et relève que les dispositifs de soutien sont « élaborés et mis en oeuvre sous l’égide de la seule direction des Douanes du ministère de l’économie et des finances, en lien étroit avec la Confédération des buralistes […], mais en l’absence du ministère de la santé ».
Dans une réponse commune, le ministère de l’économie et des finances et le secrétariat d’Etat chargé du budget défendent l’accord qu’ils ont signé et l’organisation actuelle de la vente au détail du tabac.
Ils estiment notamment que le réseau des buralistes permet d' »assurer une mise en oeuvre efficace des règles de publicité et d’interdiction de ventes aux mineurs » et que « le buraliste est ainsi un acteur de la lutte contre la prévalence tabagique », contrairement aux pays où la vente de tabac se fait dans des distributeurs automatiques.
Quant à la Confédération des buralistes, elle considère notamment que « plus que repenser les modes de commercialisation et de régulation, il conviendrait de repenser les politiques de santé publique au niveau européen (en termes de prix, d’emballage et de prévention) ».
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