Aout
Aout est le premier mois où l’on perçoit sans pouvoir l’éviter, le raccourcissement des jours. Enfant déjà, il me forçait à compter les jours jusqu’à la fin des vacances. Je ne nous vois avec ma mère, près de cette fenêtre (celle de la chambre des parents) écrire une lettre à ma grand mère de retour chez elle pour quelques semaines. Il y avait sa fête et son anniversaire et nos lettre étaient à peu près quotidiennes.
A Bordeaux, elle se tenait près de la vitre du premier salon, son ouvrage en mains comme au siècle précédent. Elle était la première à entendre le déclic de la porte que les policiers dans la conciergerie, déclenchaient. Chaban, un jour, la voyant à son poste, s’était précipité pour la saluer et en avait profité pour lui dire tout le bien qu’il pensait de sa fille. Avec son bon sens de paysanne éclairée et avait ensuite déclaré « il est quand meme fort, il a trouvé le seul compliment qu’il m’était possible de croire ». Chaban, en effet, était fort pour plaire… A moi, il avait prédit « toi, petite, tu feras de la politique… ». Je pense vraiment qu’il considérait que c’était une belle prédiction et un grand compliment, de faire un jour « comme lui ».
Je ramasse à la fourchette, les quelques souvenirs qui trainent par là. Quand le futur se tait, quoi d’autre pour remplir le silence intérieur que les bribes de passé qui trainent par là. Les fenêtres sont toujours un utile repère. Le soleil sur les parquets de saint Laurent quand l’après midi avançait, les verres colorés qui s’allumaient au matin dans ma chambre et si l’on ouvrait la fenêtre le bruit des oiseaux presque aussi intense que dans ma chambre d’aujourd’hui à Bordeaux.
Des bruits de raquettes en ce moment sur la plage privée de soleil et l’inlassable bruit des vagues. Cela aussi, intemporel, lié à cette maison. Je me raconte souvent qu’il était exactement semblable aux oreilles de Montaigne quand il chevauchait les dunes aux confins de son Aquitaine. On ne finit jamais de se raconter des histoires…
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