Dépistage de la délinquance dès la petite enfance ? ou : la responsabilité citoyenne des scientifiques
B.B., commentateur-expert de ce blog, a attiré mon attention (et celle de tous les lecteurs de ce blog) sur le colloque exemplaire de l’INSERM, consécutif à la publication par ce prestigieux institut d’un rapport sur « les troubles des conduites chez l’enfant » (sept 2005). On se souvient, au cours de mois suivants, en plein politique sécuritaire, de l’usage qu’en ont fait plusieurs hommes politiques de droite, au premier rang desquels Nicolas Sarkozy.
Ce colloque, exemplaire en effet par la remise en question qu’on manifesté les scientifiques à leur encontre, vient d’avoir lieu.
Voici le texte du communiqué que j’ai adressé ce jour aux media sur ce sujet qui nous interroge tous.
A propos du repérage précoce des troubles de conduites
Responsabilité citoyenne des médecins et des scientifiques
Dans le débat concernant le repérage à la crèche « d’enfants prédélinquants », on doit aujourd’hui saluer l’ attitude exemplaire de l’INSERM (Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale) qui a réagi en sachant remettre en cause sa propre pratique, à la suite de la mauvaise utilisation d’une expertise publiée sous son égide.
On se souvient de l’écho qu’a eu en septembre 2005 la publication par l’INSERM d’une expertise sur « Les troubles de conduite chez l’enfant ». La publication préconisait en particulier « le repérage des perturbations du comportement dès la crèche et l’école maternelle ». Différents hommes politiques de droite, parmi lesquels Nicolas Sarkozy, s’étaient aussitôt engouffré dans la brèche et avaient intégré cette notion dans une politique sécuritaire tous azimuths, avec des projets de propositions de loi particulièrement préoccupants (carnet de comportement……..)
Une pétition s’en est suivie sur le thême « Pas de zéro de conduite pour les enfants de 3 ans » réunisssant … 200 000 signatures (nombre rarement atteint) dont de nombreux intervenants médecins et/ou issus des milieux de la petite enfance. L’INSERM a aussitôt pris l’initiative d’un colloque où tous les avis pourraient être entendus. Ce colloque a eu lieu hier et a donné lieu a des débats passionnés, remettant en cause la notion même et le terme de « trouble de conduite », ainsi que les exploitations qui pourraient en découler, et restreignant ces questions à leur strict cadre médical.
Cette démarche et ce colloque ont abouti à la résolution d’une réforme des expertises publiées par l’INSERM , qui verront désormais la participation d’experts d’autres spécialités comme les science humaines et qui projettent d’y associer aussi associations de malades ou de parents ; qui, enfin, seront débattues avant publication et porteront mention des critiques formulées.
Un exemple à suivre de responsables acceptant la critique et le débat, montrant que les milieux scientifiques et médicaux mesurent leur responsabilité sociale et sociétale et qu’ils se comportent non seulement comme les scientifiques qu’ils sont mais comme des citoyens concernés par leur place dans notre société.
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