La politique, c’est pas automatique
La politique, c’est comme les antibiotiques : affaire de sens clinique, de bons sens et de ce flair séculaire des vieux médecins qui mettaient la volonté de guérir des malades à égalité avec la volonté de détruire la maladie des médecins.
Mille analyses peuvent être faites du scrutin européen. Et je peux, avec la même bonne foi, faire l’une ou l’autre. L’Europe quasi entière a voté pour la droite qui est en train, peut-être pas de la détruire, mais de lui enlever son panache, sa séduction et son élan. C’est pour moi une interrogation de la crise qui dépasse le jeu de mots : comment le maroquinier peut-il convaincre le crocodile qu’il est seul à pouvoir sauver sa peau ?
La France, qui s’est mobilisée pour discuter, échanger, s’invectiver au moment du traité constitutionnel est restée aux abris quand il s’est agi de donner à cette Europe un visage désirable. Etrange. Etrange que nous ayons fragilisé ce qu’il y a de beau et de grand dans le projet européen (=l’union de nos pays) et qu’au moment de donner à cette Europe les moyens de rendre désirable, humaniste, solidaire, ce beau et grand visage, les mêmes qui ont voté « non » n’ont pas été voter contre cette majorité qui fait de notre Europe un club berlusconien de nantis sans idéal.
Mille analyses ; et je n’ai aucune intention d’échapper à l’analyse bordelaise. Mauvais résultats pour tous et mauvais résultats d’abord pour nous, le PS. C’est un lien de plus entre la politique et les antibiotiques : on les utilise les uns et l’autre de moins en moins. Dans un cas c’est excellent, dans l’autre, c’est plus qu’une inquiétude, c’est la première marche vers un pouvoir bananio-totalitaire.
L’ump, qui pavoise, doit le faire avec prudence : quand Alain Juppé se rend à la mairie dans sa Prius, écologie oblige, il ne croise malgré cela qu’un Bordelais sur 10 ayant voté pour le parti qu’il a fondé. Quand je vais, comme tout à l’heure de la place Pey Berland à la place de la République, un seul des 20 Bordelais que j’ai croisé a voté pour le Parti Socialiste.
Tout cela ne fait pas grand monde.
J’en prends ma part. Ce n’est pas le Parti Socialiste qui est mauvais, c’est chaque socialiste.
J’ai écouté au Conseil national que le mot était ringard. Il est pour moi une force et je prends d’autant plus volontiers ma part de son affaiblissement du moment.
Oui, je suis entrée à reculons dans cette campagne, blessée de chez blessée que le Député qui incarne l’Europe dans notre région, Gilles Savary, ait été écarté pour cause de jeux de motions et de personnes. Sans doute, aurais-je dû dépasser plus vite cette blessure. Je vous le disais : la politique, c’est pas automatique.
Une chose est essentielle et nous ne l’avons pas compris : ce sont ceux qui ont voté non au référendum constitutionnel qui se sont abstenus. Nous ne sommes pas allés vers eux pour leur dire que le vrai « non », c’était maintenant. C’était changer la majorité commercialo-libérale qui défigure notre Europe, ses idéaux de liberté, d’humanité et de justice.
Nous sommes passés complètement à côté.
Chaque citoyen aujourd’hui, chacun de ces jeunes sans emploi que seule l’Europe (une vraie Europe) peut sauver de la précarité et de la fatalité et qui, pourtant, n’a pas voté doit s’interroger.
La politique, c’est pas automatique, c’est fragile, c’est moitié raison, moitié saison, idée du jour, mode qui passe…
Mais, avant tout, c’est nous et c’est tout de suite.
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