Les trois piliers battent de l’aile
Entre deux gros tas de cartes de voeux, un « tour de journaux ». Expression non brevetée, sans doute obscurément inspirée du « tour de peigne » de Montaigne. Le vocabulaire de Montaigne, fort de toute la verdeur du français naissant, est une merveille dont on ne se lasse pas.
Mais rien à voir avec « ma pioche » dans les journaux.
Un sondage, initié par « la Croix » mais publié par plusieurs journaux et magazines montre que les trois beaux mots supposés figurer au fronton de nos mairies et de nos écoles filent un très mauvais coton dans l’esprit de nos concitoyens ; et peut-être pas seulement dans leur esprit. Où en sont la liberté, l’égalité, la fraternité, dans notre ressenti de tous les jours ? Où en sont-ils dans la réalité des faits ?
Les trois piliers de la République battent, inégalement, de l’aile. L’expression est osée, elle traduit en tout cas une grande inquiétude et un vécu où la dureté l’emporte.
Le plus mal en point des trois est l’égalité ; 32 % des Français seulement pensent qu’il s’applique bien à la société d’aujourd’hui. Même pourcentage qu’en 2002 (au mois de mars, les socialistes auraient sans doute du mieux l’examiner à cette date…, mais beaucoup moins bien qu’en 2004, où ils étaient 40% à juger, que de ce côté, ça allait plutôt bien.
Un Français sur trois aujourd’hui se disent satisfaits. Les deux autres pensent que le mot s’applique « mal » à « très mal ». Que répondrions-nous ? Pour ma part : mal.
La fraternité s’en tire un peu mieux ; 45% trouvent qu’elle s’applique bien à notre société. Pour tout dire, ce n’est pas mon mot favori : il a vieilli, je ne sais exactement pourquoi, peut-être un peu (comme pour les droits de l’ « homme » à cause de sa masculinité, mais ce n’est pas certain). Chaleur, amitié, proximité me sont plus familiers. En tout cas, le score n’est ici pas si mauvais : presque un Français sur deux fait l’expérience de la fraternité.
La liberté tient le haut de l’affiche, en tout cas, réjouïssons-nous, 60% des Français n’ont pas encore perçu sa limitation. Elle est en effet marginale, c’est à dire focalisée à des situations ou des groupes particuliers, et il faut savoir en renifler les moindres menaces pour sentir qu’elle aussi, a du soucis à se faire.
Voilà, je voulais juste vous livrer ces chiffres. Les trois mots en tout cas méritent qu’on soit autour d’eux comme de gros chiens fidèles et, si besoin, menaçants.
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