Immigration : bonne question, médiocres réponses
Oui, l’immigration est un vrai sujet, méritant que l’on en parle et qu’on y apporte une analyse posée et des réponses responsables à l’occasion d’une élection présidentielle.
Oui aussi, et malheureusement, le débat avarié sur la viande Halal, la dénonciation du « trop grand nombre d’immigrés » constitue une réponse pour laquelle « médiocre » est un faible qualificatif. Les propos de Marine le Pen, repris à Bordeaux par Nicolas Sarkozy, n’étaient pas des réponses, ils étaient là pour accutiser la question, tendre le débat, voire prendre le risque de provoquer des réactions violentes.
Le chiffre de 2,9 millions d’immigrés, avancé par Sarkozy et qualifié d’excessif, ne veut rien dire. Immigrés de quel pays, de quel continent ? D’outre Rhin, d’outre-mer ou d’outre-méditerranée ? De qui parle-t-on ? Quel est le chiffre considéré comme satisfaisant, admissible ? Que Sarkozy s’exprime au lieu d’attiser les peurs et de les utiliser !
Le noeud gordien de la question de l’immigration est sa répartition ou plus justement sa concentration . Une politique du logement imbécile a concentré les migrants du sud dans quelques dizaines de quartiers où on continue de les concentrer. La faute originelle dans notre pays est de ne pas tout mettre en oeuvre pour faire éclater la ghettoisation qui continue au contraire de s’aggraver dans chacune de nos grandes villes et autour d’elles.
Résultat : des quartiers entiers de noms labellisés « bien de chez nous », sans une exception où l’on cultive l’entre-soi comme un des beaux arts, sans savoir qu’il est au contraire ce par quoi les civilisations sont mortelles. Cette phrase de Valéry, Claude Guéant, à l’instar de son Président, ne la connait sans doute pas. On ne lit jamais assez cet apparent pisse froid de Valéry.
Et, bien séparé des précédents, des quartiers refermés sur eux-mêmes, où le communautarisme n’est même pas une volonté mais une conséquence inéluctable, où quelquefois la République se retire, laissant l’ordre aux mains des fauteurs de trouble et des commerces parallèles.
A toujours constitué pour moi une immense interrogation, le fait que lors des révoltes dans les banlieues ce sont les quartiers mêmes de ceux qui se révoltent qui sont saccagés, les voitures de leurs proches qui sont brûlées .. C’est au fond compréhensible : la haine mal formalisée de cet enfermement, de ces quartiers où l’on erre faute d’un job, d’une perspective, d’un équilibre social.
C’est de cet enfermement que nait la repli communautariste et, avec lui, le repli sur une religion portée comme un instrument politique. Je dis « portée » sans négliger le sens premier du mot : longs vêtements, calots, barbes des hommes, foulards, burkas des femmes, sont d’abord des drapeaux que l’on agite… Et dans lesquels tant de nos politiques foncent, quand ils n’y ajoutent pas les boucheries halal et les horaires de piscines.
Contre cette ghettoisation, qu’a été « le plan Marshall des banlieues » de Sarkozy ? La réponse est courte : rien. Et c’est ce même Sarkozy qui aujourd’hui utilise le chiffon rouge de l’immigration alors que c’est celui de la défaite absolue à toutes les guerres qu’il a déclarées en 5 ans (guerre à la délinquance, à l’insécurité, à la fraude …) qu’il devrait piteusement tenir serré dans sa poche avant de se retirer.
Quoi faire, quoi faire ? Remettre de l’éducation dans ces banlieues, imposer de la mixité réelle dans tous les projets immobiliers, imposer la mixité scolaire dans tous les établissements publics ET privés, quitte à transporter les élèves d’un quartier dans l’autre, mettre de l’emploi dans les quartiers, y construire des établissements d’excellence, matraquer financièrement les villes qui ne font aucun effort ni pour le logement social ni pour la mixité sociale (notre ville en est le bon exemple).
Je dis tout cela en vrac. Comme Ségolène lors de son débat de 2007, « je-suis-en-co-lè-re ». En colère qu’après n’avoir rien fait de substantiel, la seule mesure que l’on propose à droite soit l’étiquetage de la viande selon le mode d’abattage. Voilà, c’est sûr, c’est cela qui sauvera la République !
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